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27/03/2013
Moi, Youssouf F., né le 13 février 2006, meurtrier
Remise en une de ce long texte publié en avril 2009.
Réalisée le 14 février 2006 à l’hôpital d’Évry (Essonne), l'autopsie du cadavre d'Ilan Halimi a révélé des «brûlures» sur 80 % du corps, de multiples «hématomes et contusions», «une plaie à la joue» faite au cutter et «deux plaies à l’arme blanche sous la gorge». Conclusion du médecin légiste : aucun de ces coups n'a été la cause de la mort. C'est l’ensemble des violences et tortures subies pendant trois semaines qui ont causé cette dernière.
Le meurtre d'Ilan Halimi est, pour sa mère, Ruth Halimi, une tache sur la France.
Voici l'homme.
Regardez-moi, je suis un enfant.
Un enfant, car je viens de naître du corps supplicié de mon jumeau d'ombre, que j'ai tué de mes propres mains. Lui aussi était un enfant, lumineux alors que je suis sombre. Que voulez-vous, je cède à la facilité en écrivant cela, j’ai la tête pleine à craquer des images qu’utilisent les journalistes, ces vautours qui ne vous débarrassent d’aucun corps mais en discutent sans fin la subtile putréfaction.
Regardez-moi. Je suis votre propre fils.
Et regardez-les maintenant. Ceux qui m'entourent, m'épient. Ces ombres, bavardes et plaintives. Ces paltoquets. Ces commis.
Ils m'ont fait capturer par leurs propres commis, ceux que l'on désigne pour accomplir discrètement les basses besognes de la République. Des tueurs anodins, qui n'éprouvent aucune jouissance particulière à tuer de leurs propres mains. Le devoir, rien de plus, un métier comme un autre, oui. Des vengeurs sans goût de la vengeance, agissant au nom de l'ombre d'une ombre, un pays de missionnaires de la civilisation qui a honte de ses forfaits passés, de sa grandeur légendaire et de sa force perdues, de sa propre ombre, de son inexistence de plus en plus certaine. Un pays de commis.
Je suis l'un des fils de la France. Votre fils.
J'aurais pu choisir, comme disent ces idiots, de profiter des bienfaits de l'ascenseur social, cette fumisterie qui va chercher, jusque dans les caves des barres d'immeubles de la diversité, quelques péquenots qu'elle conduira dare-dare à un poste de cadre, avec à la clé meublé Ikea et vacances d'été au milieu des zombies halés de la côte.
Bien trop facile et, je vous le dis, indigne de mes talents.
J'ai choisi un moyen plus rapide que l'argent pour m'élever, puis chuter, puis m'élever encore par mon abaissement. J'ai choisi de détruire l'un des symboles de l'argent, et uniquement pour en gagner plus, le diable est un tel amateur de bons tours !
J'ai fait fort je dois dire, puisque je suis devenu encore plus célèbre, du jour au lendemain, que les singes turgescents qui beuglent quelques pauvres rimes au milieu des putes en string et qui, de l'argent, en gagnent beaucoup, bien plus que moi qui pourtant ai tué, alors qu'eux ne font qu'appeler au meurtre.
J'ai choisi la voie la plus étroite pour atteindre la seule trace de grandeur pas encore effacée de ce monde plat, la grandeur du meurtre : j'ai en effet tué un homme, comme vous le savez.
Pas n'importe lequel. J'ai tué un Juif de France. J'ai tué un Juif d'Israël. J'ai tué un Juif de l'époque d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, de l'époque d'un autre Juif, le Christ ! J'ai tué un Juif.
Le contraire même, disent les médias que j'écoute comme n'importe quel honnête citoyen, de tout ce que j'incarne : il était discret, intégré (comme un autoradio peut-être ?), sans la moindre histoire notable à son actif. Il était même aimé des siens paraît-il. Je n'en doute pas.
Surtout, enfant de la France, il avait plus que la France, alors que je n'ai, moi, rien, sinon un pays d'origine qui ne veut pas de moi, parce qu'il ne veut sans doute pas s'encombrer en entassant sur son sol les déchets les plus toxiques produits par la société française. Je n'ai rien, puisque mon pays, la France, ne me reconnaît pas dans le miroir que lui tend ma face hilare, insultante et cruelle, ma face d'enfant diabolique.
Il avait Israël. Il avait la foi immémoriale de ses pères. Il avait la possibilité de plonger, comme dans un bain de jouvence, dans une langue sans âge qui a inventé le dialogue, d'égal à égal, avec Dieu.
Je n'ai eu que la France, son catéchisme républicain poussiéreux et vidé de sa substance, seriné par de pauvres types qui n'osaient même plus regarder dans les yeux des gamins de douze ans, de petits professeurs tout pétris de grandes certitudes, humanistes honteux de nous délivrer une nourriture aussi misérable. Souvent, ils baissaient les bras et semblaient regarder dans le vide, alors qu'ils faisaient cours. Nous savions tous, en un éclair de lucidité sauvage, que celui-là, quoi qu'il dise ou fasse, était fichu dès ce moment-là. Il avait perdu. Il finirait, dans le meilleur des cas, par demander sa mutation dans un autre établissement et, dans le pire, en se jetant sous un train, les professeurs sont souvent romantiques.
Moi, je n'ai eu que la croyance dans le progrès désormais électronique, virtuel, même si elle a été débarrassée de ses pointes les plus dangereuses et qu'elle s'est grotesquement ornée de fariboles ésotériques. Un progrès à visage humain disent-ils, avec même une petite place pour une croyance diluée à l'eau plate de Taizé, mais que demande donc le peuple ?
Je n'ai, surtout, qu'une langue que les plus hauts personnages de mon pays avilissent un peu plus tous les jours, contaminent de leurs innombrables mensonges.
J'ai grandi avec elle, j'ai grandi en elle, c'est votre langue qui m'a fait devenir ce que je suis, nulle doute que ce petit air sera repris par vos sociologues et psychologues qui auront compris de travers la terrible affirmation : la langue française est fasciste !
Regardez-moi.
Regardez ce que votre langue a fait de moi.
Un meurtrier.
Votre langue a fait de moi un tueur sans pitié. Chacun de vos mensonges. Chacune de vos dérobades. Chacun de vos mauvais jeux de mots. Chacune de vos subtilités.
Je ne sais donc parler qu'en récupérant puis utilisant de nouveau, après les avoir soigneusement sucés, les mots que ces eunuques galvaudent, blessent, gauchissent, dépècent, torturent, châtrent. Ces mots que vous avez détruits.
Qui a dit que les langues naissaient, vivaient puis mouraient ?
La langue française n'est pas morte mais éteinte.
Moi, je parle. Et je ne suis pas le seul à parler cette langue, oh que non ! Nous sommes des centaines, des milliers, humiliés et offensés, lie de la lie, rats parmi les rats. Cette langue est la vôtre et pourtant, dites-moi : comment se fait-il que vos oreilles paraissent ne point l'écouter ni même l'entendre, vos esprits se fermer à ce qu'elle raconte qui est, je vous assure, absolument passionnant ?
Cette langue est une langue morte, non : éteinte. C'est la langue française, c'est la langue de la mort, c'est la langue qui a tué un homme et, moi, c'est la langue qui m'a fait renaître. Quel singulier pouvoir ne conserve-t-elle pas, même avilie, souillée, violée des millions de fois par chacune de vos bouches puantes.
Moi, je parle, et j'ai tué le représentant d'une des langues les plus puissantes de l'humanité. L'une des plus saintes, sinon la langue la plus sainte.
Moi, Youssouf Fofana, je parle une langue plus ancienne que le français, le latin ou même l'hébreu.
Je parle la langue de la mort et de la folie. Je parle la contre-langue de l'abjection et vous ne semblez pas en comprendre le plus anodin de ses mots alors que, écoutez plus attentivement, ne l'entendez-vous pas bruire, l'ondée du sous-langage des brutes, dans les plus délicates constructions de votre admirable langue, que vous tentez d'exporter comme vos vins et vos fromages ? Votre langue pue, désormais, elle est éventée et a moins de force qu'un nouveau-né.
Je parle la langue dont le foyer d'infection se trouve quelque part dans les forêts sans âge des anciens temps, lorsque l'homme se tenait à peine droit et que, dans sa petite cervelle, la langue dansait pourtant en sautillant, aussi légère qu'une fée, comme en rêve, petite flamme qui ne tarderait pas à embraser le monde. L'homme ne parlait pas encore et pourtant tout son être était rempli de parole. Il l'attendait, et la création tout entière attendait, stupéfaite et impatiente, que l'homme parle pour savoir, enfin, ce qu'il lui dirait.
Cette langue maudite, Kurtz, en s'enfonçant dans la jungle infestée de dangers et de miasmes, l'a redécouverte et apprise, patiemment, nuit après nuit où il s'enfonçait un peu plus profondément dans l'horreur des premiers âges, et, avant Kurtz, bien d'autres dont nous ne savons absolument rien. Aguirre peut-être ? Un beau nom, Kurtz, claquant l'air comme un coup de fouet, là où Youssouf semble beaucoup plus doux mais avance masqué : Dieu a ajouté ? Je dirai plutôt qu'avec moi, il a retranché.
Un joli conte aussi, mais mensonger, comme tout le reste.
Parce que, la sauvagerie, je vais vous le dire : pas besoin d'aller la chercher au fond des marécages où se décompose l'âme humaine.
J'ai, moi, pourtant imbécile, homme de si peu de culture, appris cette langue ténébreuse en écoutant de toutes mes forces les mots qui sifflaient dans les recoins de ma cité.
Écoutez-la vous aussi mais... en avez-vous vraiment envie ?
Écoutez-moi.
Regardez-moi, je viens de naître, le sang de mon frère macule encore mes mains maladroites, tendues vers une lumière que je ne fais que deviner, que je ne vois même pas, que je ne cherche pas, pour tout vous dire.
Je viens à peine de prononcer mes premiers mots, et ils sont de haine pure. Écoutez-moi, voulez-vous que je les redise pour vous seul ? Tendez donc l'oreille dans ce cas. Plus près voyons, de quoi avez-vous peur ?
Regardez-moi.
Et regardez ces femmes et ces hommes qui n'en sont point. Qui se taisent. Qui ferment leurs yeux, leur bouche et leurs oreilles.
Regardez ces femmes et ces hommes qui, en me jugeant, refusent de se juger. La chute. Mais inversée. Nouveau mensonge, les livres ne font que mentir. Mon procès, le jugement qui en découlera les tirent, croient-ils, vers la lumière la plus pure. C'est bien évidemment faux et, se trompant, sachant qu'ils se trompent, ils n'ont qu'une seule hâte : en finir avec l'accusation bien vivante que je représente à leurs yeux.
Ils me regardent. Ils ne me voient pas. S'ils me regardaient, ils me verraient et se verraient immédiatement, eux. S'ils m'écoutaient, ils finiraient bien par entendre les mots qui ne cessent de tournoyer dans ma pauvre cervelle, elle va sans doute finir par éclater.
Ils font peine à voir, vous ne trouvez pas ? Ces pauvres diables qui plastronnent et prétendent me juger, entourés d'une ceinture de policiers, on ne sait jamais, un de mes regards pourrait les dissoudre, comme les moucherons des pissotières sont détruits par le plus minuscule rayon de soleil.
Je ne les vois même pas, je ne les entends pas, j'ai tant d'autres voix, plus subtiles, plus tentatrices, plus chaudes, plus autoritaires, à écouter. Eux me voient mais n'osent pas me regarder dans les yeux. Ils me regardent parfois, à la dérobée, et pourtant ne me voient pas. Ils me voient et ne me voient pas sourire : ce sont les journalistes qui le leur ont appris, mon ignoble forfait, comme ils l'écrivent. Scandale des bien-pensants. Leur grande peur, abjecte parce qu'elle les paralyse et les livre sans défense à leur proie, qui est en fait leur prédateur.
Ils m'imaginent en train de sourire. Ils me rêvent en train de sourire, le sourire a pris les traits de ma gueule aussi noire que le charbon, aussi noire que le gouffre dans lequel ils crèvent de trouille de tomber.
Ils y sont déjà tombés et ils le savent bien. Ils croupissent depuis leur naissance dans une cave. Mon procès est leur unique chance d'en sortir. Ils le savent bien. Les peureux reconnaissent infailliblement cela ou celui qui les arrachera, pantelants et pleurant de reconnaissance, de leur mauvais rêve, de l'empire sans partage que la peur exerce sur eux.
Et mon sourire leur fait peur. Il les hante, les poursuit. Ils ne peuvent plus s'en passer, c'est ma morsure. Ils ont peur. Parce qu'ils n'ont pas besoin de consulter leurs gros livres de procédure pour savoir ce que signifie ce sourire.
Ce sourire signifie que je les ai vaincus. Que moi, minable petite frappe et voleur de banlieue comme il en existe des dizaines de milliers dans un pays qu'ils pensent honorer par leur loyale neutralité, moi, comme l'autre assassin des vieilles histoires de roi tué dans son sommeil et de chevaux qui s'entre-dévorent, une fois que je me suis enfoncé si profondément dans le sang, je n'ai pas pu reculer davantage. J'ai avancé. Je ne pouvais pas reculer, car je suis un homme et de toute façon revenir sur mes pas aurait été plus difficile qu'avancer. Un homme. Un enfant. Inconscient du danger donc. Alors j'ai avancé. À d'autres, ma mère, mon père, la France, de guider mes pas. Ils n'ont rien fait, j'ai dû marcher. Qu'ils aillent au diable avec leur prudence ! Où étaient-ils donc lorsque j'ai trébuché ? Se sont-ils contentés de se dire qu'il fallait bien que jeunesse se passe ? Imbéciles ! Ils n'étaient pas là, il a bien fallu que je me débrouille ! J'ai avancé.
Je serais mort si j'avais reculé, si j'étais simplement resté, dans ma cellule, sans bouger et avant, dans cette ville crasseuse où j'ai tendu ma petite toile machiavélique, une cité qui ne se souviendra plus, dans quelques semaines, de mon existence, ou alors m'honorera comme comme un démon de petite envergure.
«Youssouf Fofana me dites-vous ? Ah oui, je crois me souvenir que ce pauvre type, chef du gang des Barbares ou ce genre de connerie de série pour ados un peu débiles, avait défrayé la chronique au début des années 2000, je ne sais plus trop quand exactement. Qu'est-il devenu ? Toujours en prison je crois. Aux dernières nouvelles, il se serait même converti. Non non non. Pas à l'Islam, auquel il n'a jamais cru réellement. Au christianisme, c'est autrement plus compliqué, surtout dans les prisons françaises n'est-ce pas, mais je pense que je ne vous apprends rien.»
Au christianisme ? Pourquoi pas ? Ma mère morte, et mon père, et mon frère, mes amis m'ayant oublié, la France me gardant dans son giron le plus obscur durant de longues années, que me restera-t-il, qui voudra encore me suivre ? Lui bien sûr. Il faudra que j'apprenne tout de même à aimer cette humilité au goût de faiblesse. Il faudra que j'accepte de perdre ma violence. Il faudra que je tue le vieil homme en moi, que je demande à cette petite voix de la boucler, à tout jamais. Mais, oui, pourquoi pas, ne serait-ce pas le meilleur moyen de provoquer, une fois de plus, l'attention de tous ? Imaginez donc la tête des journalistes ! La une des journaux, Libération titrant, ironiquement, la grâce de l'assassin ! La sainteté après l'ordure, la lumière après les ténèbres. Pourquoi pas, oui ? Certains saints n'ont-ils pas été de sacrés gredins, voire des criminels avant d'être retournés comme un gant par la parole formidable de leur Maître ? Alors, moi, pourquoi pas, puisque rien ne Lui est impossible ?
Cela sera dit dans quelques années, si je suis encore vivant, si mon meurtre n'aura pas eu, pour étrange conséquence, de m'avoir dévoré comme un cancer dévore la chair qu'il parasite, se nourrissant de sa substance.
Je mens car je sens bien que le meurtre ignoble que j'ai commis commence à me dévorer, non pas depuis la date de la mort de ce chien de Juif mais depuis la seconde où j'ai décidé de le faire chanter, avant même de penser à l'attirer dans un piège si évident, si facile, si grossier.
Pauvre Adam réfléchissant avec sa queue, une fois de plus c'est Ève la rusée qui aura eu raison, d'un sourire, de tes résistances les plus opiniâtres. Est-ce donc là tout ce que tu as appris depuis que l'on t'a chassé du Paradis, avec un glaive tournoyant pour en garder l'entrée qui t'est désormais refusée ?
Je n'ai même pas besoin de parler. Tant de mots inutiles.
Mon sourire.
Ce sourire leur hurle que j'ai vu l'Enfer.
J'ai même infligé certains de ses supplices à celui que j'ai tué, le laissant crever comme un chien, moqué, bâillonné, nu, couvert de sa propre merde, battu, brûlé, torturé. Humilié. Humiliation pour humiliation, dent pour dent, n'est-ce pas ce que répète, à toutes ses pages ou presque, leur livre le plus sacré ? Une litanie de vengeances s'étendant d'âges en âges. Une éradication impitoyable des ennemis, femmes, enfants, vieillards, jusqu'aux animaux ! Lisez, je n'invente rien.
Allez-vous me condamner parce que j'ai tué un de ces gosses prétentieux qui se pavanent place du Trocadéro, rue de la Pompe, rue de Passy ? Je suis l'un des leurs, regardez-moi de plus près. J'ai chacun de leurs vices. J'écoute leur musique. Je ne lis rien ou presque. La même insouciance. La même absence, effarante à vos yeux, scandaleuse, de jugement. Le bien et le mal n'existent pas, confondus l'un et l'autre dans une banalité dans laquelle nous nous dissolvons lentement. Nous n'étions pas des hommes.
Maintenant, j'en suis un.
Seule ma haine me différencie d'eux. Ils méprisent ce pays, incapable de les défendre. Ils ont bien raison. Voyez comment la France sauve ses Juifs. Moi, je le hais. C'est ma seule arme. C'est la seule chose qui me permet d'avancer. C'est la seule chose qui m'a empêché de revenir sur mes pas.
Je hais la France.
Car je ne puis me battre contre elle.
Cela aurait au moins quelque grandeur n'est-ce pas ?
Comment affronter ce qui n'a plus d'existence ailleurs que sur les registres poussiéreux ou électroniques ?
Comment combattre des gens qui ne croient plus eux-mêmes en leur propre pays ?
Qui demandent pardon pour les fautes qu'ils ont commises et celles qu'ils n'ont pas commises ?
Qui ont honte de leur histoire grandiose ?
Qui nous l'enseignent en nous prenant pour des imbéciles incapables de flairer, comme des chiens, les centaines de mensonges qu'ils ont édifiés pour abriter des regards leur trouille ?
Rassurez-vous, personne ne vous regarde. Car une vieille trace ancestrale de sauvagerie fait que les forts se détournent des faibles, sans leur accorder plus d'attention qu'ils n'en accordent au combat entre une fourmi et une autre fourmi.
En France, les forts croupissent dans les prisons et les monastères. Ceux qui ont volé, violé, assassiné et ceux qui ont tué, en eux, le vieil homme.
Je suis l'un d'entre eux, ne le voyez-vous pas ? Ma force est d'avoir choisi les ténèbres, sans même une dernière bouchée de pain tendue par la main amicale, la grâce sera que la lumière me ravisse peut-être.
Voyez-les, eux.
Celles et ceux que l'on appelle mes complices. Je n'ai pas échangé plus de quelques mots avec certains. Ils se sont tous levés pourtant. Maintenant, ils reculent tous. Ni bien ni mal. Juste une prodigieuse neutralité.
Non. Ils ne bougent plus, coquilles vides uniquement remplies, un temps, par ma présence, par mes mots. Ils sont vides à présent, je me suis retiré d'eux, comme les pèlerins de ce drôle de bouquin de Joseph Conrad. Allez savoir pourquoi, je l'ai lu en prison. Je vous le conseille, petites âmes de praline : lisez-le et vous comprendrez mon histoire, et celle de votre pays, et peut-être même celle de l'Europe, et peut-être même, par-dessus le marché, toute l'histoire de l'homme blanc.
Son triomphe apparent sur la sauvagerie.
Sa force invincible provenant de son savoir immense et de sa science phénoménale.
Son nouveau dieu, né sur le cadavre de l'ancien, le progrès.
Son nouveau dieu, né sur le cadavre du progrès, l'homme.
Son nouveau dieu, né sur le cadavre de l'homme.
C'est celui-là que je ne me flatte même pas de servir. Je ne connais pas son nom, nul, d'ailleurs, ne le connaît.
Il n'a pas de nom.
Eux n'en savent rien, bien qu'ils obéissent à ses commandements dont je ne suis que le plus fidèle interprète.
Regardez-les. Vous ne les voyez pas ? Oui, je sais, ils sont transparents.
Aucun de ceux qui m'ont servi n'a levé le petit doigt pour le défendre, voyez comme ils sont vides. Si c'était à refaire, je n'ai aucun doute : ils referaient tout ce que je leur commanderai d'exécuter à la lettre, sans même réfléchir.
Des bourreaux anodins. Des tueurs en série, comment n'a-t-on pas rapproché ce bon mot de son origine industrielle, marchande ?
Je n'ai même pas eu besoin de les remplir de mes paroles puisqu'ils les entendaient flotter dans leur pauvre caboche remplie d'un peu de bourre comme une rumeur lointaine qui leur commandait de marcher dans la nuit, sans se retourner.
D'avancer jusqu'à me trouver.
Ils m'ont trouvé, parce que je les attendais.
Cela n'était rien.
Maintenant, je renais pour la seconde fois. Je suis né le jour où ce Juif est mort. Je renais toutes les fois que je pense à ce que je lui ai infligé de mes propres mains.
Je renais ici, en ce jour où la France me juge pour le meurtre d'un des siens qu'elle a été bien incapable, malgré toute sa science, malgré ses forces de police, malgré son intelligence, malgré sa langue si vive à prétendre démêler le mensonge de la vérité, d'empêcher.
Pourquoi ? Voyons, la réponse est simple : nul ne peut empêcher que l'innocent périsse dans la gueule du fauve. Et j'en suis un, fauve mais innocent aussi, car je n'ai rien fait, je n'ai été que l'exécutant de la France, de l'homme blanc, qui a haï, continue de haïr et haïra toujours ses Juifs, comme une écharde dans la chair que décidément rien ne peut arracher ni extraire.
Je renais aujourd'hui, en cette heure où commence le procès qui me condamnera, je ne m'inquiète pas.
Le regard que je fixe sans sourciller, voilà le tourment le plus diabolique que j'ai inventé, qu'on m'a soufflé... Non non, que j'ai inventé, en cette seconde qui m'a brûlé et dépouillé des dernières parcelles d'humanité que je gardais, comme si j'étais un petit enfant pleurant doucement, se demandant si son père, parti sur la route dangereuse, allait revenir. Et si, justement, il ne revenait pas ?
Et si, justement, sa disparition le condamnait à devoir se débrouiller seul ?
Eh bien, père, regarde-moi, vois ce que je suis devenu, moi l'enfant humilié.
J'ai tracé ma propre route et elle avance sans peur dans le sang.
C'est le sang qui régénère les forces anciennes, oubliées. C'est le sacrifice qui soude le peuple et, voyez, le sacrifice d'Ilan ne soude que les Juifs, la France, malgré ses déclarations prudentes, prudentes même lorsqu'elles sont faussement outrées, la France, elle, n'a plus aucun ciment capable de la souder.
Même le sang ne rachète plus ses péchés. Même le sang le plus pur, celui de l'innocent Ilan, ne parvient pas à sauver la France de sa souillure, à alimenter un feu capable de dévorer la crasse plusieurs fois centenaire qui la recouvre et l'asphyxie.
Qu'elle crève si elle ne peut être sauvée.
Qu'elle crève si elle n'a pu sauver celui que j'ai tué.
Qu'elle crève si elle n'a pu me donner des raisons de l'aimer.
De la respecter.
De croire en sa grandeur.
En sa bonté.
En sa souveraine beauté.
En sa rareté.
Qu'elle crève, elle et ses mensonges crachés par tant de bouches qui redoutent les amalgames plus que la violence, la mort d'un innocent.
Qu'elle crève, si la seule chose qu'elle redoute, c'est sa peur, l'ombre (il n'y a plus rien d'autre, j'ai bien cherché, j'ai cherché dans le sang de ma victime, j'ai cherché dans les cachots où je me suis bien amusé à tourmenter quelques pauvres hères), l'ombre de sa vieille grandeur, autrefois respectée par la terre tout entière, sans même qu'elle daigne, au large des côtes sombres et inexplorées, déployer le feu de sa puissance guerrière.
Qu'elle crève puisqu'elle n'a pas su me nourrir et, en me nourrissant, en insufflant dans mes veines, ma tête et mon âme, la magnifique beauté de son histoire, faire que je la respecte et que je respecte la vie de son fils prodigue, prodigue parce qu'il est Juif, cœur du cœur de ce pays, saint des saints, lumière secrète que, d'un souffle, j'ai éteinte.
Regardez-les.
Regardez-moi.
Surtout, regardez-la.
Dans cette salle où je les tiens tous enfermés, sans ciller une seule fois, je fixe le regard de la mère de celui que j'ai tué.
Je fixe jusqu'en son âme terrorisée, détruite, magnifique, les yeux de celle à qui j'ai enlevé son enfant.
Et elle comprend immédiatement ce que je lui dis, sans même que je n'échange un mot, car la nuit à la nuit transmet la connaissance, la nuit du meurtre, sèche, avide, éreintante, aveuglante, à la nuit immémoriale des femmes, humide, douce, chantante, brûlante comme un feu qui se propagerait sans relâche.
Elle comprend que je n'ai pas tué son fils adoré, que je ne l'ai même pas tué.
Ce sont eux qui l'ont fait.
Voyez-la, elle ne parvient même pas à me haïr, puisqu'elle vient de comprendre que ces juges, ces photographes, ces journalistes, ces policiers, ces représentants de l'État, sont les véritables coupables.
Ce sont leurs mensonges, leur lâcheté, leur peur, qui ont tué son fils.
Ils ont vendu leur âme à mon dieu, avant même que celui-ci n'ait doucement chuchoté à leurs oreilles.
Elle comprend que c'est la France qui l'a tué.
La France et les mensonges que sa gueule pourrie déverse dans les millions de cervelles transparentes qui s'entassent pour former une masse informe et immonde de bêtise, de lâcheté, de peur, de malhonnêteté, de malfrance.
La France est lâche et c'est sa lâcheté qui a tué votre fils, madame.
C'est la peur à ce point consumante et impérieuse que, comme un cancer, elle se développe sur l'organe qu'elle finira bien vite par dévorer, c'est la peur qui a tué votre fils, madame.
Vous voyez cela dans mon regard et vous détournez le vôtre car mon regard est le vide, la béance, le mal qui n'est rien.
Peur de ne point avoir affirmé, depuis des années, que la haine est un poison qui n'a que faire des petites barrières pas même étanches que ses bien-pensants se sont empressés d'ériger.
Je suis un Noir et je te hais, femme juive, plus encore que j'ai haï ton fils.
En te voyant ma haine se décuple.
Je suis noir et je te hais parce que tu es blanche, et parce que ton Dieu n'a que faire du mien, que je me suis fabriqué en taule, crevant de trouille et parfois au contraire gonflé de fierté lorsque je croisais le regard de mes compagnons, sachant que viendrait le moment où je pourrais cracher ma haine et ma peur à la face de tous ces hommes qui n'ont que l'apparence d'hommes et qui pourtant prétendent me juger et me jugeront et me condamneront et ne me puniront point puisque je ne suis pas coupable de cela dont ils m'accusent.
Eux l'ont tué, votre cher fils, madame.
Vous l'avez tué, pas moi. Osez regarder cette femme et lui dire que ce n'est pas votre lâcheté, vos mensonges, qui ont tué son fils.
Je ne me cache pas, aucune voix ridicule ne me commande de me montrer, puisque je n'ai pas su garder mon frère.
Ils me jugent et c'est moi qui les ai déjà condamnés, ces criminels aux mains blanches, pas dignes d'appuyer sur un petit bouton rouge pour déclencher le feu nucléaire, même pas dignes d'actionner un levier qui remplira la petite salle vitrée d'une odeur de chair grillée. Ce ne sont même plus des techniciens du meurtre de masse. C'est l'homme des foules, à la fois infiniment stupide et infiniment malléable.
Ils me jugent, non pas parce que je me suis rendu coupable, comme disent ces minables avec leurs micros et leurs appareils photo, d'actes de barbarie. Ils me jugent parce que je ne suis à leurs yeux qu'un individu isolé et qu'en m'isolant un peu plus ils espèrent contenir l'épidémie.
C'est faux.
L'épidémie, même un temps contenue, n'en finit pas d'inventer de nouvelles formes de propagation. Et puis, pensez donc, elle n'a qu'à se servir, puisqu'elle prolifère sur un immense cadavre. Et quel cadavre ! Celui de la France.
Mes semblables, parfois bien plus jeunes que moi, sont légion. Ils prospèrent. Eux aussi se nourrissent de la pourriture qu'est la France.
Ils détestent les Juifs, encore plus que moi. Ils détestent aussi les Blancs, et les Jaunes, et les Noirs, vous ne m'apprenez rien. Ils ne s'aiment même pas. Ils n'aiment rien, rien d'autre que le goût éphémère de la puissance que confère le fait de torturer un autre homme, puis de le tuer.
Ils les tueront soyez-en sûrs, Blancs, Juifs, Arabes et Noirs et ils se tueront pour finir, se lançant, comme un seul troupeau, du haut des falaises noires.
Ils les tueront encore plus rapidement que je ne l'ai fait. Ils les tortureront avec méthode et délectation et sauront, eux, leur arracher leur précieux argent et leurs pauvres petits secrets, mieux que je n'ai su le faire.
Je n'ai été qu'un novice et cette société que je hais n'en finit pas, elle aussi, de perfectionner ses discrètes méthodes.
Il est vrai que j'ai beaucoup appris, en prison. C'est même le meilleur endroit pour comprendre que la haine de la France y naît comme une tumeur, bien chaudement abritée des regards. Prison et banlieue : la métaphore n'existe pas seulement sous la plume de ces tartuffes, experts en sociologie comportementale et psychologues qui, les lâches, tenteront d'expliquer mes gestes et verseront peut-être même une douce larme républicaine et fraternelle sur mes odieux forfaits. Prison et banlieue, c'est, rigoureusement, comme une équivalence infernale, la même chose et ce double cœur qui n'en est qu'un pourrit tout l'organisme. Sa pourriture a déjà distillé ses sucs dans toutes les veines de la si douce France aux prés verts.
Comment, vous ne voyez rien ? Et l'odeur au moins, ne vous incommode-t-elle pas un tout petit peu ? Quelle constitution que la vôtre, nom de Dieu !
Drôle d'histoire que la mienne, comme celle de tous les meurtres, surtout les plus ignobles : étalés aux yeux de tous, personne ne semble pourtant voir mes forfaits.
Je suis donc invisible. Tout-puissant. J'ai passé l'anneau à mon doigt puis commis mes larcins.
Vous ne voulez pas me voir ? Lâches que vous êtes !
C'est vous que vous ne supportez plus de voir dans votre miroir. C'est votre propre reflet que vous voyez en me regardant. Vous devriez vous répéter : Youssouf ! Youssouf ! Youssouf jusqu'à ce que ce que ce prénom se confonde avec le vôtre, Martin, Pierre, Jean, Éric, Philippe.
Car moi, Youssouf Fofana, je suis votre enfant.
Je suis l'enfant de la France qui a honte de ses Juifs.
Je suis l'enfant de la France qui a honte de ses Noirs, parce qu'elle est blanche et chrétienne. Je dis bien : chrétienne.
Je suis l'enfant de la France qui a honte de ses Arabes, parce qu'elle est blanche et chrétienne. Je dis et je répète : chrétienne.
Le vieux sang juif n'en finit pas de couler dans ses veines depuis qu'il a été recueilli aux pieds de votre Christ ridicule, crevé comme un chien, pire qu'un chien, mort d'une mort réservée aux criminels, puis qu'il est devenu le souverain le plus puissant de votre royaume, fils aîné de l'Église je crois, ou fille, allez savoir, tout se mélange, je ne sais plus rien.
Je suis l'enfant de la France qui a honte de ses Français, parce qu'elle est blanche et chrétienne.
Oh, vous avez beau faire, tenter à tout prix, à grand renfort d'eau claire, d'effacer le signe de votre baptême. Rien n'y fait. Pas même le feu le plus pur, la lame la plus tranchante, rien ! Un tel signe s'efface moins facilement que la marque de Caïn le meurtrier de son frère et bâtisseur des villes industrieuses.
Vous puez le Christ. Vous puez la faiblesse. Vous puez le pardon. Vous puez la faute que vous n'avez pas même eu l'audace de commettre. Regardez mes prétendus complices : ils font absolument tout ce qui est en leur pouvoir pour se faire oublier, minimiser leur participation, alors que moi, au contraire, j'en rajoute dans l'ignominie, l'indigence, la stupidité. Va-t-on me faire croire que ces placides agneaux n'ont rien vu, rien entendu, rien su des souffrances infligées à celui qu'ils m'ont aidé à capturer, cacher, torturer ?
Je ne veux pas de l'amitié de ces chiens castrés. Je ne veux pas de votre pardon. Mais vous vous fichez de mon avis comme de la date de votre première communion. Vous m'accordez, par avance, votre pardon, déclarant, la main sur la poitrine, que je ne sais pas ce que je fais, alors que je n'en veux pas et que ce que j'ai commis devrait suffire, au moins, à vous décider, à vous lever une seule fois dans votre vie d'assis, à marcher sur moi, à déborder de toutes parts les policiers qui me protègent, à vous repaître de mon corps déchiqueté, à tremper vos mains dans mon sang et à les lever devant les caméras, à boire mon sang giclant de ma tête explosée à coups de pied, corps et sang offerts en mémoire de ce que j'ai accompli et qui probablement, quelque jour prochain, sera considéré comme un véritable miracle, rien de moins que le réveil de la France.
Sang et corps partagés et distribués aux indigents, aux pauvres, aux nécessiteux, aux misérables, aux lâches que vous êtes, aux Judas indignes de la corde qu'ils n'ont plus le courage de nouer autour de leur cou bouffi de graisse.
Sang et corps distribués pour nettoyer la France. Pour la laver. Pour la purifier.
De sa honte.
De sa peur.
De sa paralysie.
De sa mort lente.
De sa mort précipitée par la mort de chaque innocent avili, humilié, tondu, battu, brûlé, torturé, abandonné comme un chien.
De sa mort accélérée par celle de chacun de ses Juifs, ces minuscules, risibles, lâches ou bien courageux, indignes ou bien humbles véritables qui sont, tous, jusqu'à la plus insignifiante des poupées peinturlurées, les centres rayonnants d'un mystère qu'en vain j'ai cherché dans les entrailles de mon frère dépecé comme une bête, Ilan, sans le trouver.
Maman, je vais me taire, je n'ai de toute façon plus rien à dire de bien important, juste quelques crachats à jeter pour choquer les bourgeois et faire travailler les journalistes. Ce que j'ai fait témoigne pour moi. Pardonne-moi de n'avoir pas osé te regarder une seule fois, durant tous ces jours d'audience. Je dois me détourner de toi, comme je me suis détourné de tout ceux qui me sont chers. Je ne vois même plus ceux qui m'entourent, ils sont des ombres, à moins que ce ne soit moi qui, lentement, commence à me dissoudre dans l'air.
Je ne vois plus, pour ne rien te cacher, qu'un seul visage : celui de l'homme que j'ai assassiné de mes mains. C'est curieux mais son visage me sourit continuellement. Je n'arrive même plus à me souvenir de lui lorsque je le frappais sans relâche.
Papa ? Papa, papa, à quoi bon t'appeler et te convoquer dans ce tribunal, puisque tu es déjà au milieu de nous, dans l'air que nous respirons, tous, ici, en nous levant le matin, de notre sommeil sans rêves, en venant, vous, la peur au ventre, dans cette salle ou à votre bureau, en regagnant votre piaule, le soir tombé, pour commenter avec votre femme ou votre maîtresse l'actualité du jour et vous écrouler, ivres de sommeil, dans votre lit buvant la sueur de votre solitude, mille fois plus évidente que la mienne, sur laquelle le sceau du meurtre et de la malédiction a été apposé ?
Mon père ? Papa, où es-tu ?
Ah, laissez-moi écouter, une dernière fois, la chanson haute et claire de mon enfance, roulant depuis les sommets des montagnes blanches pour finir dans la rigole des caniveaux où s'abreuvent les chiens errants !
Hélas, cette chanson n'est rien d'autre désormais qu'une rumeur que ne se transmettent plus que les rats et quelques créatures de l'ombre qui, un jour, peut-être, seront les derniers à garder le souvenir d'un pays que je hais de toute ma force, que ma haine ne parviendra pas, j'en ai la certitude, à transfigurer et qui va me condamner pour essayer d'enrayer le cancer qui le ronge: la France.
Qu'on en finisse maintenant.
Maintenant.
Compléments
Conte de la barbarie ordinaire, par Sarah Vajda.
L'enterrement d'Ilan Halimi, par Frédéric Gandus.
Le démon de la perversité : Youssouf Fofana et l'aveu.
Israël dans la Zone.
Langages viciés.
Commentaires
(Non pas un commentaire, Juan : de simples lignes.)
…Rapidement se met debout, du poing gauche l’attrape aux cheveux, le tire vers lui puis, après l'avoir rudement incliné, lève le poing qu'il a gros et lourd, plein de rage lui donne un coup tel qu'il lui casse la mâchoire puis le poignarde par quatre fois et le laisse enfin choir à terre.
C'est dans une paix de surface qu'on a gardé nos armes, nous, bien sages dans leurs râteliers mais sommes-nous pas aussi les plus morts du monde et partant, ses seuls vrais vainqueurs ?
On peut donc vaquer et ne rien souhaiter d’autre qu’une vraie paix à l’âme de tout le monde.
(Pas un commentaire en effet.)
Écrit par : Michel Hoëllard | 01/05/2009
J'entends dans ton texte Barry Seaman dans 2666 de Roberto Bolano quand il parle ARGENT REPAS ETOILES UTILITE. Lisez des livres écrits par des hommes noirs.par des femmes noires.mais n'en restez pas là.lorsqu'on lit ,on ne perd pas son temps.moi en prison,je lisais.c'est là bas que je me suis mis à lire.etc on pourrait dire tout le livre.et plus tard quand tout pue:vous puez le christ.vous puez la faiblesse.vous puez comme un cadavre la France,j'entends Léon Bloy parler aux bourgeois à la France. Juan que te dire, Christian Prigent a écrit un petit essais "A quoi bon encore des poètes"50 pages tout petit format.et dans ce petit livre la France ne pue pas.il faut des livres des français. Il faut là encore écrire comme tu le fais Juan avec courage et pensée Prigent dis:des raisons d'écrire:
qu'est-ce qui pousse à écrire (à écrire entre autres,de la poésie)?
premièrement l'expérience que la vie non écrite (non symbolisée personnellement),la vie soumise au PARLER FAUX,est une vie misérable et qu'il faut bien répondre,par un certain geste sur la langue,à la honte d'être sans parole et assujetti
deuxièmement le constat que la langue de tous n'est celle de personne et qu'il y a donc,comme je le disais,à se trouver une langue" pour verbalisé l'expérience que nous faisons intimement du monde et des troisièmement et quatrièmement,etc...
c'est l'effort inouï de Prigent du moderne,être une oreille aux moderne comme au anciens et plus loin:peut être nos société ne savent-elles plus ou ne veulent-elles plus voir ces formes esthétiques et ces geste d'écriture dont tout l'effort est de prendre en charge la négativité,sa symbolisation,l'effort pour la penser.il n'y a plus alors que soumission à l'utopie d'un monde sans mal (Gorbatchev déclarait il y a quelque mois: "l'angoisse doit quitter la terre"), croyance en l'épuisement possible du réel par la frontalité limpide des discours(la fameux "parler vrai"des politiciens) et assujettissement à un positif lénifiant et leurré.
ce comportement, bien sur,est celui de l'autruche:ne pas vouloir voir le mal,marginaliser les formes artistiques qui en relèvent le défi et persistent à vouloir le symboliser,ce n'est évidemment pas se débarrasser du mal.c'est plutôt s'exposer,si aucune médiation n'en effectue la symbolisation,à le voir revenir,comme acting-out,ensanglanter le corps social (les corps réels).qui alors en est désastreusement surpris (l'actualité,là encore,est parlante). La littérature est grande quand elle TRAITE le mal.non pas quand elle le soigne,quand elle veut ou croit le soigner: on ne le soigne pas plus qu'on ne soigne le réel.etc il faut lire tout ce petit livre, pour revoir tout ce qu'on dit mort en France. La France n'est pas seule morte au monde, c'est Ilan qui est mort, Ilan et aussi un homme dans ma région battu à mort pour quelques sous,par des gamins de toutes couleurs,ils sont en prison et des baptisés... mais eux dans des lettres sont loin de l'horreur qu'il ont commise et quant on connait depuis petit un de ces hommes,on pense à lui,au mort,aux parents,à la société,peut être à la France,au monde,on sent un grand choc d'angoisse,on prie dans l'immense ou le vide ou on prie dans la peine,on fait pas le malin qui pardonne,on est dans Isaïe et Ezéchiel le chaos D'Isaïe,et le maintenant là d'Ezéchiel, réel.
Écrit par : bob | 01/05/2009
J'ai comme l'impression que vous n'avez pas trahi cet odieux assassin, qui je pense, ne goûtera sans doute jamais aucun fruit de sa langue maudite.
Écrit par : hélène | 01/05/2009
«un Juif de France. J'ai tué un Juif d'Israël. J'ai tué un Juif de l'époque d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, de l'époque d'un autre Juif, le Christ !»
Un juif d'avant le premier juif, du temps d'Enoch ou de Mathusalem pendant qu'on y est...
«le dialogue, d'égal à égal, avec Dieu» ... «les centres rayonnants d'un mystère»
Le problème tient précisément en ceci que les juifs ou prétendus tels (car quel est la raison d'être du juif si ce n'est de servir la révélation?) ont un peu trop tendance à se prendre pour Dieu incarné.
Ainsi, le peuple juif serait à lui-même son propre messie. N'est-ce pas le fond d'une certaine pensée juive?
M'est avis, que ce "messie"-là n'est pas bien beau à regarder, qu'il ressemble foutrement à l'autre, à l'imposteur, que le pauvre Ilan, pour en revenir à lui, compte au rang de ses victimes et qu'il est vain de chercher ailleurs.
Ce n'est pas bien compliqué finalement. Pas la peine d'en faire des tartines.
Pourquoi s'évertuer à trouver un bouc émissaire?
(Remarquez c'est une tradition de la maison, et des mieux honorées)
Et puis, quand on est Dieu, on n'a de compte à rendre à personne, n'est-il pas?
Seulement voilà, la haine du "juif", ce n'est pas la haine du Christ et l'holocauste, ce n'est pas le golgotha.
Non. Ou alors, en radicalement inversé.
Écrit par : Gabriel | 02/05/2009
Michel : oui, et alors ?
Hélène : oui, et alors ? Ecrire, c'est ne pas trahir justement, y compris les chiens les plus galeux.
Gabriel : oui, et alors ? Il me semble avoir tenté de tracer un lien entre Golgotha et Shoah dans mon livre sur Steiner. Un lien évoquant une inversion...
Bob, mon cher Bob : toutes les fois qu'un Ilan a été massacré, est massacré ou sera massacré, mais oui, la France crève un peu plus. Ton regard est toujours imparable : Bloy évidemment, Bolanp aussi, puisque j'avais pensé, un instant, décrire, comme il l'a fait dans son génial 2666, la découverte d'un cadavre, un de plus, d'une façon absolument clinique : le presque cadavre d'Ilan, pas encore mort.
Pas lu Prigent.
Écrit par : Stalker | 02/05/2009
C'est le procès d'une France parvenue au nadir de sa vocation. Et encore, on peut hélas hésiter en écrivant "nadir" car à strictement parler, nous ne savons pas du tout si nous avons réellement atteint le fond, aussi sombre que soit la situation du moment. L'exigence est terrible: confronter nos conceptions intellectuelles que beaucoup d'entre nous acceptent sans problème, mais de façon trop souvent livresque, à savoir: le redressement ne s'opère qu'à partir du point le plus inférieur, confronter cela à l'iceberg de haine et de chagrin sur lequel nous nous fracassons. Nos livres pèsent-ils encore grand chose, alors? Mais c'est peut-être le moment de croire, plus que jamais, à la grâce de la consolation, à la justice divine, qui est justesse. Heureux ceux qui croient sans avoir vu. Moi, je n'ai vu que le mal. Mais plus je le vois, moins je me réfugie dans la naphtaline quiétiste. Plus je le vois, plus je crois à la loi des actions et réactions concordantes (que certains appellent le karma). Plus je le vois, plus je vois approcher le jour de la colère. Et ce jour-là, quelle qu'en soit la date, nous serons nombreux à nous en prendre plein la figure, car combien de trahisons de l'Esprit n'accumulons-nous pas depuis longtemps, combien de trahisons de la vocation française ne commettons-nous pas chaque fois que nous nions que cette terre est, de par la grâce de Dieu et depuis le matin baptismal de Reims, lumière des nations, Fille aînée de l'Eglise, et très réellement nouvelle Tribu de Juda?
Écrit par : Stéphane Normand | 02/05/2009
Bonjour,
J'ai lu, à voix haute, pour entendre. C'est la poésie des mots, en premier lieu, qui est venue, et le souffle. Sans démagogie, bien sûr, et pourtant autour de ce sujet il y en a tant. Sans excès, j'allais dire, aussi; et personne n'en sort indemne. A la limite, comme toujours (mais de quoi? l'admissible?...), sans basculer jamais. Ces exercices d'équilibriste forcent le respect. Vous vous mettez en danger, l'ignorez-vous? Ils(?) n'aimeront pas... Pour les détails, nous pourrions en reparler (longtemps), mais vous serez loin, déjà, ailleurs, vous écrivez beaucoup. Ce mouvement en vous, je le suis; je le ressens.
Ecriture 'christique' (il faut bien un mot), parce que votre 'colère' embrasse tout ce qu'elle touche. Elle embrase. Cette 'colère' est celle des gens que vous avez lus, et aimés, je la reconnais. C'est la vôtre, aussi, démesurément, lucidement la vôtre. Ils n'aimeront pas...
Je disais la voix lue, au début. Pourquoi, cette voix, ne l'entend t-on jamais? Pourquoi ne l'entend t-on plus? Pour quelle peur? Le désastre vient, et il faudrait tellement se raccrocher à ces voix qui hurlent...
J'étouffe, comme vous, nous sommes nombreux, je ne sais pas précisément de quoi, nombreux aveuglément.
Amitiés.
Écrit par : lataupe | 02/05/2009
Stéphane, merci.
La Taupe : de même.
Aux deux : j'ai écrit ce texte en quelques heures, d'un jet, y ayant beaucoup pensé, non pas en tentant d'imaginer le propre discours de YF (cela, il y faudrait le génie d'un Faulkner entrant dans la tête de l'imbécile du Bruit et de la fureur) mais la petite voix (que je connais paradoxalement mieux que celle de YF) qui a murmuré à cette crapule sa conduite.
Et, oui, me livrer à une sorte d'auo-accusation de YF, paradoxalement fils de la France et son ennemi.
Exercice difficile, je ne sais si je m'en suis sorti mais vos mots me font du bien, tout simplement. L'un d'entre vous, en privé, me demandait si je n'avais pas tenté de faire publier ce texte dans la presse française ! A sa décharge, il ne vit pas en France. En quelques mots, je lui ai expliqué l'impossibilité absolue de pareille chose bien sûr...
La presse française !
A mes yeux l'une des premières responsables de la mort d'Ilan, et de celles de tant d'autres personnes, par tant de mensonges accumulés depuis des années et déversés dans les cervelles de lecteurs qui n'ont pas tous notre culture et nous capacité de discernement.
Bob, comme toujours, a été sensible à cet aspect de mon texte : il a l'oreille absolue le bougre, faut-il dire à sa décharge !
Je ne dis pas cela par prétention nombriliste mais, tout simplement, parce qu'il me FAUT des lecteurs éveillés, ou plutôt : réveillés.
Écrit par : Stalker | 02/05/2009
Curieux et très beau texte, qui à mon sens appartient cependant nettement plus à la catégorie fiction qu'à celle d'analyse. Je lui trouve avec plaisir un petit air "Jour de la Colère de Dieu", où le péché serait en fin de compte (et en amont de toute cruauté cependant) le fait du collectif plutôt que du meurtrier. Il me semble que ça pose quelques problèmes, quand même...
Écrit par : Serge Rivron | 02/05/2009
"la vérité et la justice sont souveraines , car elles , seules, assurent la grandeur des nations" Emile Zola , La vérité en marche.
Écrit par : anne | 02/05/2009
Serge, bonjour et merci.
C'est, je le répète, effectivement un texte très personnel, qui n'a aucune prétention analytique mais qui va à mon sens bien plus profondément que toutes les analyses socio-économiques que l'on voudra, qui ne feront que relever les symptômes d'un mal souterrain.
La question que tu soulèves n'est absolument pas nouvelle mais difficile : c'est celle du prophète, du héros, de l'homme providentiel et, ici, du héros, en lequel la société tout entière, qu'elle se reconnaisse dans ses actes ou les rejette avec fureur et dégoût, incarne ses pulsions les plus inavouables.
L'écrivant, j'avais en mémoire plusieurs textes comme La psychologie des foules de Le Bon, le lynchage de Jambe-de-Laine ou encore Le Tentateur de Broch, avec l'étonnant personnage qu'est Marius Ratti, qui parviendra à convaincre un village tout entier de sacrifier l'une de ses jeunes filles...
Anne : ne recitez plus jamais dans la Zone un écrivain tel que Zola.
Je parviens à la préserver de la pandémie, il ne faudrait pas qu'un cochon de Troie sape mes efforts prophylactiques...
Écrit par : Stalker | 02/05/2009
Nous ne sommes pas tous coupables au même degré. Comme l'indique Juan Asensio, on déverse dans bien des têtes des "savoir-faire", des "méthodologies", sans oublier ces précieux "savoir-être", précieux en tout cas aux yeux de ceux qui voient surtout en l'école une antichambre de l'entreprise ou du village global-termitière-dans-les-nuages. La faute doit-elle être assumée par ceux qui n'ont jamais connu rien d'autre? C'est difficile à dire, d'autant que je ne suis pas juge. Mais il est facile de voir que lorsque le terrain est bien préparé, l'adhésion au oui-ouisme et à la culture de mort vient un jour ou l'autre, et c'est ainsi qu'une civilisation finit par s'enfoncer alors qu'elle s'imagine sur la sagittale et illusoire voie du "progrès".
Et nous, justement, nous qui avons lu ce que d'autres ne lisent pas, par répugnance ou par ignorance, nous qui nous réclamons de valeurs autres, nous qui allons jusqu'à devoir assumer des obligations dites de "service public" au sein de cet âge de fer, afin d'assurer notre subsistance, ne sommes-nous pas un peu responsables? Je ne dis pas "coupables", et je ne souhaite nullement paraphraser telle ou telle baderne de la vie politique française. En d'autres termes: si nous sommes une élite (et cela reste à prouver, mais pas au regard de ce monde), nous devons faire la distinction entre d'une part l'instruction, le formatage scolaire et médiatique, et d'autre part l'exercice bien plus rigoureux de l'intelligence, du discernement. Ce seul mot de discernement suffit d'ailleurs à attirer les foudres des croisés de la "libertitude expressionnante", comme on le sait (mais ça se résout, en ce qui me concerne, en un risible chatouillis).
Faire cette distinction ne suffit pas. C'est alors qu'il faut réellement éduquer, mais de quelle manière? Avons-nous l'obligation de proposer une parole autre? Et puis, quelle parole? Devant le meurtre d'Ilan, devant la haine de Fofana, haine fièrement assumée, on a l'impression de se retrouver devant l'échec absolu de la civilisation "transactionnelle", devant le naufrage terminal de quarante ans d'enseignement socialo-soporifique, devant la déroute complète des shadoks autogérés. Alors, quelle parole, devant tout cela? Une parole qui se ferait glaive, peut-être, et pour celui qui s'en sert, probablement la mise à l'écart et la conspuation. Mais qu'importe, au fond: encore une fois, nous n'avons pas de comptes à rendre aux pseudo-élites de ce monde. Les choses se passent à un autre niveau. Qu'on me laisse dire une énormité, du fond de la malebolge française: dans la vie, il y a la foi et les oeuvres. Se contenter de croire à la remédiation divine, sans effort humain dans ce travail, c'est ce que j'appelais ce matin la naphtaline quiétiste. Cela fait bien rire Fofana et ses semblables, d'ailleurs. Alors, quoi? Prendre les armes? Probablement, d'une certaine manière (ou d'une autre). Il ne s'agit pas de nous faire plus importants que ce que nous sommes. Mais c'est ici (également) qu'une certaine "réacosphère", par exemple, a toute son utilité (et sa noblesse), parce qu'elle sait encore que l'horizon destinal d'un peuple ne se borne pas au journal télévisé de vingt heures, pas plus qu'aux abominations commises par un "barbare". Les "barbares", ou on les éduque s'il y a espoir d'y arriver, ou on les passe au fil de l'épée. Trève de complaisance.
Écrit par : Stéphane Normand | 02/05/2009
Juan j'ai lu avec attention votre texte, qui est saisissant et émouvant, mais probablement sera à moitié compris par le grand nombre.
Je distingue dans ceci l'ébauche d'un crime contre la France, voire une silencieux auto-génocide d'un grand peuple réduit à un état végétatif.
L'enfer gagnera sur terre ?
On sait jamais.
Mon symbole préféré l'image de mythologie qui "bluff " l'humanité dans son parcours est le Phœnix.... Lire la suite
(PS. ...ne m'a pas échappé le passage sur "les tueurs sans goût de vengeance" et "le devoir", me rappelant mon 1è commentaire; petite parenthèse en parenthèse : tuer sans plaisir n'est pas synonyme de tuer sans passion ou sans conviction).
Écrit par : Georges | 02/05/2009
Très beau texte que celui que vous venez d'écrire, ainsi que ceux de Frédéric Gandus et de Sarah Vajda. Quasiment impossible, en effet, de fixer l'activité électrique des tissus cérebelleux fort avariés de Fofana: être parlé, ventriloqué par le nihilisme davantage qu'être parlant, à mon humble avis. Individu aussi gangrené par le ressentiment et la surestimation de soi. " La question politique est toujours unique. La question politique c'est: prévoir le passé qui guette. La question n'est jamais: quel avenir pour nos enfants? La question de la terreur est toujours imminente. La question de tous les temps est toujours: Qu'est-ce qui est sur le point de revenir? (...) Il faut TOUJOURS prendre de vitesse la mort qui fascine le social." Pascal Quignard, LES OMBRES ERRANTES, dernier royaume I
Je redoute la fascination que Fofana peut exercer qui lance un défi terrible à toute la structure du contrôle social, cette violence directe de réciprocité sauvage et symbolique de la mort pour laquelle il ne semble plus exister de réponse. Ce silence du juge et des magistrats lorsque Fofana donne en guise de date et de lieu de naissance la date et le lieu du décès de sa victime, ce silence, était-ce la meilleure réponse? J'en doute. Daniel Dienne
Écrit par : DIENNE | 02/05/2009
la jeune fille dans le tentateur est consentante,elle est fascinée par ratti et le sacrificateur agit face à la masse du village sous l'emprise totale de ratti. revenant lucide il se suicide...mais nous reste la connaissance de la mère gisson qui en mourant et c'est le sommet de la pensée de broch!!!donne sa connaissance son savoir sa sagesse dans des pages inouies à la jeune agathe qui va mettre au monde un enfant co-naissant au monde.mais ratti converti de page en page les habitants du village (d'en bas)et le pic est ce sacrifice rituel,ou à lire ou ne sait plus dans quel monde on est,dans quelle nature,on n'a perdu la notion de temps, le meurtre est court,sans tortures.et peu à peu le docteur voit le village d'en bas reprendre sa vie normale et marius ratti est même conseiller ou adjoint à la mairie.ce qui affecte et désespère le docteur et moi en lecteur,j'étais abattu,mais il me reste la mère gisson ce qu'elle dit est sacré.j'avais lu ce livre juste au moment du cimetière de carpentras,j'avais eu devant cette nouvelle peur dégoût révolte,j'ai pris un livre ce fut le tentateur,il répondait à mon dégoût mon désespoir mon abattement.mais cet acte était d'un jour,d'une nuit,on avait nos livres anciens,il nous faut maintenant pour "ça" des nouveaux,des modernes,ils sont maintenant UTILES comme Barry Seaman (quel beau nom et dire que c'était Marius Newell qui aimait tant la mer et les étoiles de mer).mais n'est pas moderne lecteur,celui qui a tout misé sur le postmoderne,c'est le voyeur,c'est le lecteur qui est postmoderne toujours en avance!!le lecteur doit être comme le disait rimbaud absolument moderne et voyant (enfin faire au mieux avec "ça"!).
Écrit par : bob | 02/05/2009
Après le beau texte de Bob et le commentaire si juste de La Taupe, que dire de plus? Quelques mots, histoire de me palinodier, surtout sur un tel sujet...
Sur ce texte de JA, on pense à Bloy, à Bernanos, et aussi à Péguy dans les anaphores, le rythme, à scander à haute voix comme dit La Taupe. Une écriture différente de la prose coutumière de Juan qui garde toutefois son style, cette manière de poétiser en laissant bruire les voix des morts.
Un texte poétique qui ne vaudrait rien s'il se limitait à un jeu formel, qui regarde en face et assume sans prétendre l'expliquer le Mal, avec majuscule, le Mal qui a eu lieu, réellement lieu, dont la source cachée - thème familier aux lecteurs de JA - est tapie dans le langage, la fausse parole, les mensonges donnés comme des vérités qui appellent en réponse la langue de Kurtz, cette langue première d'avant la Parole.
Pourquoi "s'évertuer à trouver un bouc émissaire", "faire des tartines" ? écrit Gabriel.
Requiescat in pace? Comment Ilan le pourrait-il? Comment les morts et nous les vivants pourraient-ils reposer en paix?
Le bouc-émissaire, Gabriel, ce n'est pas la France mais une fois de plus, un juif. La France, dit le texte de JA, elle est devenue la foule anonyme plus que complice, responsable par sa lâcheté aveugle. Ceux qui "servaient" Youssouf, dit le texte, incarnent cette France qui ne voit ni n'entend rien parce que Youssouf-Kurtz leur parlait si bien que tout ce qu'il avaient à faire et faisaient, "c'est pas grave". "Y pas de souci", "c'est pas grave", comme dirait le Recteur de Créteil pour qui les adolescents "sont ce qu'ils ont toujours été" . Youssouf leur parlait si bien parce que depuis son enfance les phrases qui tournent dans sa tête viennent de nulle part, de lieux non identifiés, de bouches sans nom, d'une Histoire décomposée à force de passer à la lessiveuse de la bien-pensance laïque et de repasser sous le fer à vapeur du consensus social pour effacer les plis.
Le texte de JA est en parfaite cohérence avec d'autres notes, récemment "La malfrance", et le beau texte de Sarah Vajda écrit en 2006. Un désaccord de taille avec cette dernière: ce n'est pas à cause de Heidegger que perdure l'antisémitisme, au contraire, Heidegger est l'un des rares à penser le nihilisme accompli, la maladie de la langue et conséquemment, la haine des juifs. Passons.
Ilan a servi de bouc-émissaire parce que les juifs ont plus que la France, parce qu'ils ont cette Parole immémoriale qui a inventé la conscience.
Si je puis me permettre une légèreté sur un sujet aussi grave, une devinette pour Juan. Qui a écrit ceci?
"L'énoncé SOLUTION FINALE* circulait, dans les années 20, parmi les logiciens positivistes. On l'appliquait au sens. Il s'agissait alors de forger une langue entièrement instrumentale et soumise au calcul.
Autre signification du terme dans l'idiolecte nazi. Le massacre des juifs vise à exterminer LE PEUPLE ELU DE LA PAROLE*, que les hitlériens définissent comme Anti-race. Là où la Torah NOMME* des élus, les Nazis hallucinent en retour une ANTISELECTION BIOLOGIQUE*. Au chiffre de la lettre, ils ripostent par le chiffrage du crime. Une conception biologique de l'espèce humaine a en vue l'ANEANTISSEMENT* - et commence le travail en détruisant les juifs. [...]
Les SS n'employaient jamais le mot: "tuer". Ne parlaient même pas de "supprimer" ou de "liquider".
Ils disaient plutôt: "activités de transfert".
Ils ne voulaient pas entendre les vocables "cadavres" ou "victimes".
Comme le montre Claude Lanzmann dans "Shoah", ils leur préféraient le mot "figuren", qui veut dire: marionnettes, poupées.
Ainsi l'anéantissement a-t-il lieu d'abord dans le langage.
Les Nazis ont voulu MATRICER l'espèce dans le biologique. Ils ont eu la folie de faire de ce matriçage un projet messianique. Dans ces conditions, le "peuple du Livre" devenait l'Ennemi absolu--- et chaque juif une trace à calciner.
Qualifier de "crime contre l'humanité" l'anéantissement des juifs enferme la qualification dans le cadre mental des Temps modernes. La "mort de Dieu", voyait déjà Nietzsche, comporte un BATTEMENT DE CRIME. Ce n'est pas une mort naturelle. Le délire des Nazis consiste à éradiquer le signifiant "Dieu" en supprimant des milliers de corps; c'est pour en finir avec le signifiant divin qu'ils font fonctionner nuit et jour les chambres à gaz."
* mots soulignés par l'auteur soit en italique, soit en capitales, dans un livre dont je vous laisse deviner le titre, cher Juan, et vous aussi, lecteurs...
Écrit par : Elisabeth Bart | 02/05/2009
J'ai lu ce texte d'une traite. Rapide, excité, affolé. En toute sincérité, je pense être de ceux qui vivaient cette prodigieuse neutralité. Peut-être parce que j’aime la France, parce que je suis francophone donc son enfant et que je l’aime encore plus depuis que j’y vis pour mes études. Mon amour a toujours été lâche, et ma tristesse de la voir ne plus exister à sa valeur, n’est pas une tristesse qui s’insurge, elle n’a pas le courage de se révolter contre la décrépitude de celle que j’aime. Je pense secrètement que mon amour devrait suffire à sa manière, qu’elle est déjà chose grande puisque tant la haïssent. Je ne peux pas la frapper, même par amour, je ne peux pas haïr cette France plus que ne le font les enfants de sa race. Je suis d’une race et d’un pays autrement plus pourri spirituellement pour pouvoir haïr la pourriture qui nous a produit, tout ce que nous avons de beau, nous les Haitiens, la Grandeur et le Christ.
Youssouf, les Juifs, les gauchistes, les journalistes, j’ai préféré taire mon dégoût. Je préférais ne pas comprendre ce qui n’a que trop de sens. En un sens face à la coulée de boue qui dévale chaque jour dans l’actualité sur le net, dans la bouche des politiques, il me fallait un peu croire que tout cela était trop lourd et devait crouler sous son propre poids, s’assécher un jour et que ce qui devait rester c'est ce qui compte, l’air pur qui est là au milieu des miasmes. La beauté d’un sang vénérable, ne peut pas mourir. Elle n’est pas morte.
Je veux simplement dire que Youssouf n’a pas tué pour rien. Si ce cri a pu s’épandre et me faire vibrer pour la langue française, encore une voix, chez un vivant, Youssouf n’a pas tué pour rien, si son crime a pu jaillir dans cette voix, horrible, lancinante, si elle a pu se faire connaître comme la petite voix du mal, nous l’aurons entendu.
Son crime nous a fait mal. La réponse de la SOCIÉTÉ face à son crime est encore plus douloureuse. Mais le silence, la peur, la neutralité, la stupidité sont autrement indignes. Merci de m’avoir fait voir cela.
Écrit par : Mehdi | 02/05/2009
Stéphane : oui, il me semble que YF est l'emblème de ce que vous décrivez. Des années d'assistanat et d'éducation laïcard-repentante, où on demande à des jeunes d'aimer un pays dont ils ne maîtrisent pas la langue et qui a lui-même peur de son passé, de son présent et de son avenir.
Il va de soi que, étant un adepte de la loi du Talion, je ne verrais aucune difficulté morale ou philosophique à ce que ce chien, qui n'exprime pas une parole de compassion ou de regret, soit passé sous les armes. Le rétablissement de la peine de mort est un autre débat.
Georges : j'ai voulu évoquer deux cadavres, qui n'en sont ptobablement qu'un, oui, mystiquement : celui d'Ilan et celui de la France.
Daniel : c'est cette petite musique, oui, que j'ai essayé de capter. La cervelle de Fofana, je laisse cela à nos experts qui nous apprendront peut-être que c'est un gentil garçon qui a été traumatisé par son oncle, sa tante ou par un texte de rappeur.
Bob, oui, je connais bien ce grand roman et n'en gomme aucune des différences d'avec notre lamentable histoire. Mais je parie moi aussi sur une forme de connaissance débouchant de ce sacrifice, non consenti.
Mon rapprochement visait uniquement la puissance d'une parole tentatrice.
Elisabeth : vous avez absolument tout compris, comme toujours.
Une simple recherche sur Google donnerait je crois une réponse à votre ironique question mais je dirais : un des gars de la bande à Sollers (Guest, Meyronnis, Haenel) je suppose, cela leur ressemble tellement...
Mehdi : si ce texte (et d'autres, restons modestes) ont eu le pouvoir de laver votre regard, tout, en effet, n'est pas perdu.
Aux uns et aux autres, merci de la qualité de vos commentaires.
Écrit par : Stalker | 02/05/2009
Juan, en citer trois, c'est trop facile!
Il s'agit de "L'Axe du Néant" , éditions Gallimard, L'Infini (2003) pp. 18-20, du derviche tourneur, votre cher cacographe, François Meyronnis...
Écrit par : Elisabeth Bart | 02/05/2009
Stalker, c'est le Déroulède du 21ème siècle, mais comme il n'y a plus d'Alsace-Lorraine à conquérir, il sort son clairon au moindre fait divers (celui qui sert son discours).
Écrit par : Louis | 02/05/2009
Oh, Elisabeth, je n'étais franchement pas loin ! J'ai même pensé à Dantec un instant.
Louis : tiens, il suffisait que j'affirme la qualité de nos échanges pour qu'un connard laisse sa crotte.
Critiquez mon texte tant que vous le souhaitez mais dire du meurtre d'IH qu'il s'agit d'un fait divers, c'est n'avoir rien compris, donc être un pauvre con, ou alors provoquer, par antisémitisme, ce qui revient à dire que dans les deux cas vous êtes bien ce que j'ai écrit : un connard.
Ce sera votre dernière crotte déposée ici, rassurez-vous.
Écrit par : Stalker | 02/05/2009
Elisabeth, je crois que vous ne m'avez pas bien compris.
Peut-être me suis-je mal exprimé.
Le principal moteur de la haine des juifs, ce n'est pas la "maladie de la langue" (quelle ineptie!), c'est bien plutôt ce complexe messianique dévoyé qui légitime l'illégitime, qui justifie l'injustifiable. Faut-il développer?
Ce n'est point la "possession d'une Parole immémoriale" qui aurait "inventé la conscience"
Non d'autant que ceux-là qui se disent juifs ne possèdent rien de tel.
Que Dieu ne leur appartient pas.
(ah oui, au fait, Dieu n'est pas juif)
Et si un reste est sauvé, comme il est écrit, ce ne sera qu'en vertu de Son infinie miséricorde.
Rm 2:17- Mais si toi, qui arbores le nom de Juif, qui te reposes sur la Loi, qui te glorifies en Dieu,
Rm 2:18- qui connais sa volonté, qui discernes le meilleur, instruit par la Loi,
Rm 2:19- et ainsi te flattes d'être toi-même le guide des aveugles, la lumière de qui marche dans les ténèbres,
Rm 2:20- l'éducateur des ignorants, le maître des simples, parce que tu possèdes dans la Loi l'expression même de la science et de la vérité...
Rm 2:21- eh bien ! l'homme qui enseigne autrui, tu ne t'enseignes pas toi-même !
Rm 2:22- tu interdis l'adultère et tu commets l'adultère ! tu abhorres les idoles, et tu pilles leurs temples !
Rm 2:23- Toi qui te glorifies dans la Loi, en transgressant cette Loi, c'est Dieu que tu déshonores,
Rm 2:24- car le nom de Dieu, à cause de vous, est blasphémé parmi les nations, dit l'Écriture.
Je note au passage qu'en France, la parole antisémite tient lieu de blasphème.
On peut blasphémer Dieu, on ne saurait blasphémer le juif.
Qu'est-ce à dire? Parlant d'inversion... (Pardon, je n'ai pas lu votre ouvrage, Juan. Je ne revendique aucune originalité pour ma part)
Pour conclure, vous pouvez vous gargariser tant que vous voulez avec vos arguments tarabiscotés, la haine des juifs perdurera tant que ces derniers ne seront pas revenus à Dieu, et ce, en toute simplicité de coeur.
Mt 23:37- " Jérusalem, Jérusalem, toi qui tues les prophètes et lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants à la manière dont une poule rassemble ses poussins sous ses ailes..., et vous n'avez pas voulu !
Mt 23:38- Voici que votre maison va vous être laissée déserte.
Mt 23:39- Je vous le dis, en effet, désormais vous ne me verrez plus, jusqu'à ce que vous disiez : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! "
Écrit par : Gabriel | 02/05/2009
Gabriel : non.
En France, la parole antisémite ne tient pas lieu de blasphème. Il ne s'agit que d'une pure course opportuniste à la bonne conscience.
Je ne veux absolument pas être plus juif que les Juifs mais enfin, vous citez, comme par hasard, le Nouveau Testament et, vous le savez sans doute, l'Épître aux Romains, que les intellectuels juifs ne portent pas exactement dans leur coeur.
Cela n'est rien car, citant l'Ancien Testament, vous auriez pu trouver des textes tout aussi violents qui stigmatisent l'oubli de Dieu par les Juifs (je songe aux Prophètes, prenez celui que vous voudrez ou presque).
Les Juifs, merci bien pour eux, n'ont donc pas besoin d'une apostille à leur livre le plus saint pour savoir qu'ils manquent à leur parole.
Mon propos était tout autre car enfin, je vous le rappelle, il faut réfléchir à Ilan Halimi non point comme s'il était une espèce de plante hydroponique mais bel et bien : un enfant de la France.
Et cette France, YF le dit pour s'en gausser, est chrétienne, jusque dans son apostasie (surtout, peut-être, dans celle-ci).
Et cette France, chrétienne, a un rapport, qu'elle le veuille ou pas, singulier avec la Parole, une parole dévoyée en régime démocratique.
Vous voyez que je ne reprends pas les arguments d'Elisabeth, qui vous répondra si elle le souhaite.
La haine des Juifs perdurera peut-être tant qu'ils ne seront pas revenus à Dieu, peut-être, oui. Mais pas le Christ. Le Dieu des déserts et des plateaux de granit, El Shaddaï et El Roi.
Peut-être que, d'ailleurs, revenir à Celui-ci sera, immédiatement, accepter son Fils.
Reste que, fille aînée de l'Eglise, ne pouvant effacer son baptême, la France doit garder ses Juifs en vie, comme autant de parcelles de lumière flottantes.
Jusqu'à la fin, qu'elle existe ou pas pour voir cet accomplissement.
Écrit par : Stalker | 02/05/2009
Aïe! Je suis prise à mon propre piège! J'avais promis de ne plus participer à des débats qui dépassent le cadre des commentaires et je ne peux me dérober à l'interpellation de Gabriel.
Cher Gabriel, vous me ressortez l'argumentation qui a longtemps servi à l'Eglise catholique romaine: les juifs coupables de ne pas avoir reconnu le Christ. Si là est votre conviction, si vous vous en tenez là, le dialogue entre nous n'est pas possible, d'autant plus que je ne suis pas théologienne, nous allons nous perdre dans des arguties. Allez plutôt sur le blog d'Isabelle des Charbinières où vous trouverez un théologien érudit qui se fait appeler Zacharias.
Je crois que selon le grand théologien qu'est Benoît XVI, cette épitre aux Romains n'est plus interprétée dans le sens que vous lui donnez. Cette épitre clarifie la Nouvelle Alliance, la thèse est énoncée en 1-16: " Car je ne rougis pas de l'Evangile: il est une force de Dieu pour le salut de tout homme qui croit, du juif, d'abord, puis du Grec. " Vous avez bien lu: "le salut du juif d'abord." Les juifs auxquels s'en prend Paul sont les pharisiens qui prétendent respecter la loi de Moïse à la lettre mais ne la respectent ni dans l'esprit ni dans les œuvres. Le changement essentiel, dans la continuité, de l'Ancien au Nouveau Testament, c'est le passage de la lettre à l'Esprit, une révolution qui a lieu dans la Parole, l'interprétation et le statut de la Parole.
Les Grecs ont inventé la raison, les Romains, le droit, les Juifs, la conscience. Le christianisme vient de ce triple héritage. L'invention de la conscience advient avec la révélation du décalogue à Moïse. Le Verbe brûle dans le buisson, puis parlera dans un souffle léger au prophète Elie. Sans Lui, pas de Christ, comme le rappelle l'incipit de l'évangile de Jean: " Au commencement était le Verbe et Le Verbe était avec Dieu et le Verbe était Dieu", le même incipit que dans la Genèse: " Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre." Je traduis: le Verbe créa le ciel et la terre, la conscience du ciel et de la terre. Naissance de la Parole. Avant , c'est le langage de Kurtz-Youssouf.
Cher Gabriel, vous n'apprécierez peut-être pas que je cite Maurice G.Dantec, honni de la Consanguinie avec laquelle vous avez sans doute peu d'affinités, lorsqu'il dit quelque part ( je crois que c'est dans un entretien avec Juan publié dans "La critique meurt jeune") "qu'il faut que les chrétiens redeviennent des juifs". Je suis d'accord avec vous sur un point, et j'ajouterai: "il faut que les juifs redeviennent juifs." Beaucoup de juifs, l'Etat d'Israël, sont pris eux aussi dans la gangue du nihilisme accompli. Certains qui se disent juifs ne le sont que par ascendance et ont oublié la Parole d'où ils viennent. Dejà, l'Ancien Testament raconte l'Histoire de ces trahisons, détournements...
Il n'empêche qu'Ilan a été CHOISI pour être torturé, déshumanisé, anéanti PARCE QU'IL ETAIT JUIF et derrière le vieux préjugé des juifs qui ont de l'argent, oui, je vois la haine de la Parole, la mort de Dieu toujours recommencée.
Écrit par : Elisabeth Bart | 02/05/2009
car le nom de Dieu, à cause de vous, est blasphémé parmi les nations, dit l'Écriture. si paul parle des écritures là c'est dans les livres des quatre grand prophètes et je crois dans isaïe!le livre d'isaïe est prophétique et la prophétie à bien eu lieu!mais dans isaÏe c'est dieu qui parle,et qui gronde et qui responsabilise les juifs et forme dans l'informe la conscience pour les hommes,pour le souvenir,pour la mémoire.et paul ne blasphème ni les juifs ni les romains,et pour le christ paul ne crie pas blasphème,il se rèvele lui saul,par le sacrifice de christ après la loi par la foi!en paul!
la haine des juifs perdurera tant que ces derniers ne seront pas revenus à Dieu, et ce, en toute simplicité de coeur.mais seront revenu où à dieu?quel est ce lieu,cette manière d'être au monde,quel est ce retour,vous êtes là?vous êtes au début,vous êtes gabriel qui murmure aux oreilles des hommes la loi,mais vous faites parler paul qui est celui de la foi.
saul était l'homme de la loi dans isaïe,paul dans ses lettres sort d'isaïe,il prend le recul de la grâce:et isaïe crie sur israel:quand le nombre des fils d'israel serait comme le sable de la mer il n'en saura sauvé qu'un reste.
mais toujours on cite les première pages de paul,on ne lis ni relis paul ni non plus isaïe(pascal lui savait le lire)et par contre on parle en intellectuel,et ce langage est l'avertissement même d'isaïe et de paul.mais on parle plus qu'on lis et c'est danger.
pour le tentateur juan tu as eu raison de parler du livre car on doit lire se livre et lire ratti,car c'est le prototype du charmeur envoutant mais l'homme qui ne maitrise pas son savoir en l'occurrence c'est du nietzsche mal lu pas maitrisé et du nietzsche de pas nietzsche,c'est à dire de celui de sa soeur et de la volonté de puissance.puissance du retour du " qu'il ne seront pas revenu à dieu"nature et éternel retour,c'est ce que veut hamsum passée la faim.plus maitriser sa langue,sa pensé,mais voulant,volonté de puissance,chercher comme l'a si bien montré littell une langue autonome qui se suffit à elle même,l'ami de max aue le génial philologue,dit aue c'est cela que les nazis veulent,c'est pas nouveau les hollandais pensaient aussi leur langue seule utile,mais la voix d'isaïe, de jérémie d'ézéchiel de daniel des douze petits poètes,les psaumes(il faut lire la traduction des psaumes par claudel,il traduit pas essaye juste de répondre)le livre de job les proverbes le cantique des cantiques etc tout comme notre nouveau testament restent neufs,l'ampleur du livre de littell,parle bien mieux que moi!
mais j'ai pris contrairement à vous la traduction de michel léturmy,qui a traduit aussi le coran comme jean grosjean aussi,avec dévoument au texte.grosjean s'est occupé des dernière méditations de malraux sur l'homme précaire et la littérature.léturmy lui était le maitre d'oeuvre des oeuvres de voltaire dans la pléiade et c'est très précieux pour traduire le sacré et penser le sacré,moi que le siècle des lumières souale voltaire est très très différent et barry seaman le sait avec son livre fétiche en prison:les oeuvres abrégées de voltaire.2666
Écrit par : bob | 02/05/2009
Juan,
Ce n'est pas l'Épître aux Romains mais Dieu que les intellectuels juifs ne portent pas exactement dans leur coeur. L'intellectualisme, c'est d'ailleurs un des grands travers dans lequel a sombré tout un pan du judaïsme. Il n'est que de penser au pilpoul, cette "gymnastique" où certains aiment à voir la quintessence de l'esprit juif. Faudrait-il peut-être qu'ils relisent les textes, débarrassés de tout ce bric-à-brac, histoire de revenir un instant à cette "parole immémoriale qui a inventé la conscience".
Sg 1:1- Aimez la justice, vous qui jugez la terre, ayez sur le Seigneur de droites pensées et cherchez-le en simplicité de cœur,
Sg 1:2- parce qu'il se laisse trouver par ceux qui ne le tentent pas, il se révèle à ceux qui ne lui refusent pas leur foi.
Sg 1:3- Car les pensées tortueuses éloignent de Dieu, et, mise à l'épreuve, la Puissance confond les insensés.
Sinon vous avez tout à fait raison. J'aurais pu citer un prophète de l'ancien testament. Mais voilà je ne fais pas la distinction pour ma part. Je ne cherche pas à plaire non plus ou à convaincre. Je me contente de dire, et si je trouve un propos bien formulé, je le cite, n'ayant pas la prétention de le dépasser. Je ne chercher pas l'argument d'autorité. En revanche l'actualité d'un texte vieux de deux mille ans donne à réfléchir.
Pour ce qui est de la France, autrefois fille aînée de l'Eglise, son destin est en quelque sorte comparable à celui de d'Israël, à deux mille ans d'intervalle. Aussi si un dialogue s'instaure entre ces deux-là, est-ce sur une base pourrie, celle du reniement partagé.
Autre problème que soulève votre allusion aux "parcelles de lumière flottantes", celui de savoir si l'on considère le juif selon la chair ou le juif selon l'esprit.
Le juif selon l'esprit, c'est le membre de l'assemblée, de l'église invisible, le dépositaire de l'alliance avec Dieu. L'église invisible, la seule qui importe, celle dont personne ne connaît les limites précisément
On est ici au delà de la religion et des catégories humaines. De fait, l'esprit souffle là où il veut.
Ceci étant dit, les prophéties bibliques se lisent à plusieurs niveaux. Et s'il existe une interprétation littérale de l'apocalypse de Jean, si la fiancée du cantique, l'épouse de l'agneau et la femme du chapitre douze ne sont qu'une, si l'esprit est appelé à pénétrer la matière, la vision, à s'incarner, alors force est de reconnaître que l'épouse est juive, qu'elle figure l'Israël redressé, celui de la troisième alliance, sans lequel il n'est de salut. Mais vous êtes, à ce que je sais, un grand lecteur de Léon Bloy, lequel en la matière s'est trouvé assez bien inspiré. Aussi je ne vous apprends rien.
Ma chère Elisabeth,
Je ne suis pas catholique. Disons que je suis orthodoxe mais ça n'a pas d'importance (toutes ces catégories...). Je ne cherche pas à argumenter d'une part et d'autre part je me soucie fort peu des interprétations actuelles.
Les Juifs n'ont rien inventé. Il n'y pas de génie du judaïsme. Il y a le génie de Dieu, de sa parole, dont Abraham et ses fils ont été les premiers dépositaires. Tout vient de Dieu. Aussi n'y a-t-il pas lieu de s'enorgueillir. En Abraham, il y a la foi et l'obéissance. C'est tout. Pas d'invention, pas de "génie". Un acte hautement irrationnel, un acte fou dont vos intellectuels seraient précisément incapables. En cela seul réside son mérite.
«derrière le vieux préjugé des juifs qui ont de l'argent, oui, je vois la haine de la Parole, la mort de Dieu toujours recommencée»
Mince vous en remettez une couche! Si vous voulez absolument en revenir à la langue, on peut dire que les juifs sont les premiers à l'avoir trahie, à l'avoir prostituée, eux, qui de surcroît ont crucifié le Verbe, c'est à dire la parole vraie, la parole-acte (comme le souligne Tarkovski quelque part)
Evidemment, on va pas réussir à se mettre d'accord. Néanmoins, je vous remercie de m'avoir répondu si gentiment.
Bonne soirée.
Écrit par : Gabriel | 02/05/2009
La mort de Dieu toujours recommence dès la première argutie qu'on emprunte à l'expliquer à autrui. Le meurtre et la cruauté aussi. Une croix a sablé ce champagne,il y a 2000 ans. Il serait temps de la regarder telle qu'elle fut élevée, au début de notre horizon.
Écrit par : Serge Rivron | 03/05/2009
Je ne comprends pas ce la France a à voire avec toute cette horreur, laissez là donc tranquille et occupez-vous, chère parents de vos descendants, qu'ils soient rouge, jaune, blanc,noir.
Juan vous délirez ou vous faites volontairement de la provocation.
Bon, pourquoi pas.
Cordialement.
Écrit par : un terrien | 03/05/2009
@ Juan,
j'ai lu. Te dire que j'ai aimé sans réserve serait faux, toujours le problème de la limite... Mais parmi tous les commentaires que j'ai lus eux aussi il en est certains que je trouve encore plus limites, voir même hors limites... mais tu as la chance d'avoir des commentateurs qui parlent du fond du problème, et cela que l'on soit d'accord ou non avec eux eux. Tu ne t'étonneras pas que ma préférence aille à Elisabeth (que je ne connais pas).
Dernière pirouette, car tu me connais...
Je pars jeudi matin en Israël et vais imprimer ton texte pour le faire lire à quelques "intellectuels" locaux, il n'est pas exclu que la presse israëlienne (beaucoup plus ouverte et "démocratique " que la nôtre soit intéressée par un texte pareil...
Cela me ferait assez marrer que tu sois publié là-bas et pas ici, et de plus je pense que ce n'est pas impossible...
Très bonne fin de journée;
P.S si l'un d'entre vous sait qui est "la vipère" il faut lui dire d'oeuvrer à visage découvert !
Écrit par : Gillou le Fou | 03/05/2009
Il me semblait que le grand apport des théologiens c'est la recherche de la connaissance de toutes les modalités suivant lesquelles on peut penser la jonction de l'âme et du corps, sans même recours au sacré (de l'aliment pour disputer !). De récents explorateurs en font part et je ne crois pas que l'on puisse ne pas entendre ceux qui refont ce trajet dans les terres reculées avant qu'elles ne soient totalement inhabitées ou simplement détruites. Et il me semble intéressant de considérer qu'il y ait une âme à distinguer de l'Esprit, (la seule chose que l'on peut finalement perdre), qu'elle se dit de différentes manières et que le danger n'est-il pas qu'il ne reste plus qu'un corps pour les vautours.
Bref, pour faire un peu de poésie (?), jusqu'à ce que le soleil ne se lève pour toujours à l'Occident, au couchant, les paroles ne sont-elles pas avant tout entendues depuis l'étranger ?
Écrit par : hélène | 03/05/2009
Hélène : euh, oui et alors ?
Gillou : en effet, ce serait drôle, pas franchement étonnant, la presse française étant sans doute l'une des plus nulles, partant arrogantes, et que dire de sa mollesse intellectuelle, du monde...
Je te rappelle que j'ai avancé ma propre petite idée concernant la vipère, dans une note que tu trouveras aisément sur Stalker en cherchant (moteur de recherches en haut, colonne de gauche, je sais que tu n'es pas très doué en informatique et autres joujous virtuels !), en cherchant donc Bernard Quiriny.
Je pense que c'est lui, pour tout un tas d'excellentes raisons, pas toutes avouables...
Et même si ce n'était pas lui, ce dont je doute fort, il lui resterait à s'expliquer de son usage, dans Chronic'art même, d'un autre pseudonyme (et oui, je suis bien informé...!).
Un terrien : redescendez donc sur Terre l'ami, voire en France, vous semblez vivre depuis quelques années dans un ballon se laissant porter aux grés des vents. Une fois redescendu, ouvrez les yeux et revenez me parler de provocation ou de délire.
Serge : tout est dit en quelques mots, merci.
Gabriel : je n'ai pas affirmé le contraire de ce que vous dites. Oui, les "punitions" et "châtiments" que Dieu réserve, a réservés et réservera à Son peuple, je ne vous apprends rien en vous disant que les Juifs eux-mêmes les ont toujours interprétés comme des manquements à leur devoir.
Relisez-moi bien : je ne dis pas autre chose. Bloyennement si je puis dire, j'ai "lu" l'assassinat d'IH comme un signe, non pas de choses pouvant advenir à la France (je ne suis pas encore prophète, pas même voyant) mais comme d'un état qui est le sien : celui du pourrissement, celui, oui encore, du reniement. L'allusion à la bouchée de pain tendue par une main amicale, avant d'entrer dans la nuit de la trahison, est claire pour qui connaît ses textes sacrés, et je crois les connaître assez bien.
Je vous laisse dialoguer avec Elisabeth : elle est d'une patience infinie, méfiez-vous.
Bob : il faudrait, un de ces jours, que je publie tel quel un de tes textes, qui renverrait à des petits jeux solipsistes bien des tentatives du Nouveau Roman, enfin, de ce qu'il en reste dans la mémoire de quelques vieux nostalgiques !
Je vois que tu y réponds à Gabriel, je vous laisse donc.
D'accord sur le reste.
Amitiés à tous, sauf à l'ectoplasme non-terrien et au connard Raoul, plus haut envoyé promené.
Écrit par : Stalker | 03/05/2009
Merci pour ce très beau texte.
Le sentiment de culpabilité que nous, nous ressentons, les chantres du "laisser-faire" en sont exempts.
Et comment avons-nous pu arriver à une situation qui explique (sans la justifier) qu'un homme, apparemment mûr, qui a failli vivre, quelques jours auparavant, la même situation Qu'Ilan, n'ait pas parlé? La peur, oui.
Et il continue à témoigner dans les media visage brouillé, parce qu'il sait que Fofana et ses assassins sortiront peut-être demain ou après-demain...
Jusqu'où, la peur?
Écrit par : Marine | 03/05/2009
Bonjour,
Je ne sais précisément à quoi je vais répondre, ici, ni à quel commentaire, ni à quelle rumeur ou allusion, ni encore à quelle certitude.
Peut-être est-ce mal à propos...
A l'une de vos interventions, cher Juan, je ne sais plus laquelle. Je la relis, au moment où j'écris ceci.
"La haine des Juifs perdurera peut-être tant qu'ils ne seront pas revenus à Dieu"... Ce manquement à leur Parole. Mais quel Dieu, pour quelle fidélité à la Parole? Vous semblez répondre, "revenir à Celui-ci sera, immédiatement, accepter son Fils". Je reconnais bien ici ceux que vous avez aimés, et suivis. Je pressens, en vous, cette étrange obédience au séculaire antijudaïsme européen, dans ce qu'il a de plus définitif, de plus irrémissible. Pourtant, avec vous, je veux parler, moi, homme juif, homme si profondément juif (vous ne saurez pas), homme de France, homme du doute aussi, de la peur, de l'effroi, du sursaut, parce que vous êtes un écrivain de la conscience, et non de la haine. Je crois, cependant, que vous vous trompez.
Les Juifs ont à revenir à leur Dieu, à leur Parole, à leur rituel. Cette religion (ce que je vais dire va peut-être vous faire bondir), quand elle n'est pas dévoyée, n'a jamais été, à la différence des autres, une religion de conquête, ni de prosélytisme; elle n'a pas de sang sur les mains. Et pourtant, elle propose aux Hommes un universalisme. Aux autres, d'accepter, d'admettre, de tolérer, en eux, cette permanence, cette épine, cette présence singulière, inaliénable mais généreuse. Aux autres de la reconnaitre enfin... Le rejet de cette fidélité immuable des Juifs à leur Dieu a fait tant de mal, dans l'Histoire de l'Europe.
La torah, ou les cinq livres de Moïse, ou encore ce que vous appelez l'Ancien Testament, n'est pas le livre des Juifs. Leur véritable livre est le Talmud. Sans cette connaissance de Talmud (connaissance active, c'est à dire, foi, étude, pratique, c'est à dire aussi que cela est réservé aux seuls Juifs, à ceux qui choisissent de le devenir), du judaïsme vous n'aurez jamais qu'un 'entendement du seuil'. Savez-vous comment le Talmud définit l'antisémitisme? Dans le champ des Hommes le peuple Juif sera toujours un trou ou une bosse. Deux antisémitismes, en fait, mais la même volonté de disparition: dans l'enfouissement (le meurtre), ou l'altération (l'assimilation, sociale, plus largement la soumission au "Fils", comme vous dites...). C'est avec cela qu'il faut en finir. C'est ce qu'attendent les Juifs. C'est ce qu'ils ont toujours attendu. Rien de plus. Rien de moins. Appelez cela tolérance, ou voisinage, ou bienveillance... Je ne dis pas 'créolisation', ni métissage. Cette acceptation de l'Autre en est peut-être même une forme d'antinomie.
Votre texte est grand, parce que c'est un texte de l'effroi, et du tremblement.
Amitiés.
Écrit par : lataupe | 03/05/2009
La Taupe : oui, me relisant, j'ai immédiatement su que j'allais me faire allumer, et pourtant, mes propos étaient tout de même plus nuancés que certains, lus ici-même en commentaires !
Vous avez donc entièrement raison et je précise : je ne cherche aucune forme d'adultération des Juifs et surtout pas, grands dieux non, me laisse bercer par le (beau, mais sot) rêve assimilationniste qu'avait stigmatisé, en son temps, un Scholem.
La volonté d'assimilation a été un échec en Allemagne, il existe là-dessus une abondante littérature.
George Steiner dit quelque part que la destinée des Juifs est d'errer, pas même d'avoir leur propre terre. Facile, comme on n'a pas manqué de le lui dire, lorsqu'on est couvert d'honneur et que l'on ne vit pas en permanence avec le danger des attentats-suicides ! Il a reconnu ce point...
Je disais simplement que le retour des Juifs à leur Dieu juif (donc, je dois tout préciser : UNIVERSEL, que cela soit clair) serait, peut-être, théologiquement parlant, l'acceptation de son Fils. L'acceptation, pas la reconnaissance.
Car, voyez-vous, s'il y a bien qui veut, A TOUT PRIX, l'irréductibilité des peuples, surtout lorsqu'ils ont un passé aussi grandiose que celui des vôtres, c'est moi.
Je ne suis pas un Basque pour rien (une foi et une langue, admirable, il y aurait peut-être à creuser ce parallèle, entre les deux).
Reste que j'ai reçu un baptême qui est chrétien, catholique, je dois donc bien faire avec cela et tenter de sonder, à ma petite échelle, un dialogue qui soit éminente reconnaissance de l'Autre (qui pour moi est toujours juif, qu'il soit papou ou thibétain) mais point subordination.
Ai-je été un peu plus clair ?
Écrit par : Stalker | 03/05/2009
Totalement clair. Je vous remercie d'avoir précisé, et rempli les espaces vides (intelligibles vous dites). Vous avez vocalisé votre pensée, je l'entends.
Écrit par : lataupe | 03/05/2009
La taupe, vous écrivez:
«La torah, ou les cinq livres de Moïse, ou encore ce que vous appelez l'Ancien Testament, n'est pas le livre des Juifs. Leur véritable livre est le Talmud.»
Vous rendez vous seulement compte de l'énormité de cet aveu?
Effectivement, la Torah, c'est le livre de Dieu; le talmud, le livre des "juifs".
Vous éclairez mon propos d'une façon tout à fait radicale!
«Son peuple». Juan, s'il est un service que l'on puisse rendre aux juifs (selon la chair), c'est s'abstenir de nourrir en eux cet orgueil insensé qui procède d'une incompréhension fondamentale du sens de l' "élection". Le peuple de Dieu, encore une fois, ce n'est pas l'Israël selon la chair, conception biologique étroite récupérée et transposée au vingtième siècle par les théoriciens de la race élue, mais l'Israël par le coeur et l'esprit. Rien à voir, il va sans dire, avec l'état sioniste (Elisabeth a cité Dantec alors je me permets). Le peuple juif déifié, qui trouve en lui-même sa propre finalité, est une des figures, sinon la figure-même, de l'antéchrist, ni plus ni moins. Et ce n'est pas l'amour de Dieu ou un quelconque sentiment élevé qui pousse les nations à s'incliner devant la prostituée fameuse mais bien plutôt leur bassesse et la fascination qu'exerce à leur endroit le pouvoir de la bête sur laquelle elle est assise. Ce n'est un mystère pour personne.
PS: Je ne cherche pas à nuancer mes propos. Ce serait trahir mon sentiment. Chacun est libre de penser ce qu'il veut.
Écrit par : Gabriel | 03/05/2009
Gabriel, pour moi, la chair est spirituelle et l'esprit charnel, n'y voyez pas de la dialectique mais une lecture de Charles Péguy.
L'Israël selon la chair ne me pose aucun problème : j'ai fréquenté beaucoup de Juifs et, ma foi, au risque de vous choquer, j'ai vu quelque chose jusque dans le regard du plus stupide d'entre eux que je n'ai jamais vu dans le regard du crétin français équivalent.
Où avez-vous lu que je déifiais le peuple juif ? Ce serait là, en effet, le transformer en idole.
J'affirme qu'il est élu, ce qui est déjà bien suffisant. Et que cette élection est mystère, que vous soyez d'accord... ou pas.
L'antichrist ? Voyons, une simple petite étude de cette question vous montrera que, au cours des siècles, l'antichrist, plutôt mystérieuse en tant que figure censée précédée la parousie, a été vu en bien des peuples (jusqu'aux Turcs selon les Grecs) et personnages historiques (Napoléon bien sûr, et que dire de Hitler !).
Si vous voulez y voir les Juifs (déifiés) libre à vous, vous ne serez le premier ni le dernier mais cette discussion, certes intéressante, nous éloigne tout de même quelque peu du sujet de ma note, qui n'est point, je vous le rappelle, un exposé de théologien.
Écrit par : Stalker | 03/05/2009
La taupe, je ne peux m'empêcher de revenir à vos propos:
«Sans cette connaissance de Talmud (connaissance active, c'est à dire, foi, étude, pratique, c'est à dire aussi que cela est réservé aux seuls Juifs, à ceux qui choisissent de le devenir), du judaïsme vous n'aurez jamais qu'un 'entendement du seuil'.»
Que dire des Juifs d'avant le talmud, de ceux du tanakh, faut-il comprendre qu'ils n'avaient qu'un "entendement du seuil"? mais de quel entendement s'agit-il déjà? de celui de Dieu ou de celui du judaïsme?
Juan, je n'ai pas dit que vous déifiez le peuple juif (enfin c'est possible ;-) mais je ne pensais pas à vous), je faisais allusion à cette idée assez répandue chez les juifs eux-mêmes selon laquelle le peuple juif serait son propre messie. Pour l'antéchrist, j'ai bien précisé, "une" figure.
Voilà, maintenant je me tais. Je n'ai plus rien à ajouter. Merci de m'avoir accordé la parole.
Écrit par : Gabriel | 03/05/2009
@Gabriel: Bonjour,
Disons que la Loi écrite reste indissociable de la Loi orale. Sans elle, elle demeure sans lumière, sans prolongement, sans 'fécondation'. D'autres l'ont tellement dit avant moi, tellement mieux.
Ne me faites pas dire ce que vous voulez entendre, je vous prie. Effectivement, il faut tout préciser...
Les juifs d'avant le Talmud avaient la loi Orale. Ils l'ont depuis Moïse. Le Talmud n'est qu'une volonté de fixer cette tradition, sans la trahir, sans la figer à jamais. C'est un livre ouvert.
Renseignez-vous.
Écrit par : lataupe | 03/05/2009
Désolée de ne pas apporter grand chose au débat mais je ne comprends qu'en faisant des commentaires, si possible destinés !
Écrit par : hélène | 03/05/2009
Hélène, eh bien moi, je ne comprends absolument rien à ce que vous racontez, hormis, votre toute première intervention mais comme vous n'avez rien expliqué ni poursuivi.
Alors lisez avant d'écrire je vous prie. Puis réfléchissez un peu à ce que vous allez écrire.
Écrit par : Stalker | 03/05/2009
Texte à la fois subjectif et objectif, miséricordieux et dialectique, compatissant et intellectuel : inspiré poétiquement.
Et les commentaires sont riches.
J'ajoute ma pierre critique à un de ces riches commentaires:
"Les Grecs ont inventé la raison, les Romains, le droit, les Juifs, la conscience. Le christianisme vient de ce triple héritage."
écrit Elisabeth Bart.
Elisabeht Bart est cultivée, bonne lectrice et elle a également pris partie contre Sarah Vajda sur Heidegger d'une manière intéressante qui résume un très ample débat sur le sens métaphysique, politique et historique de sa pensée.
Ce n'est pas sur ce débat-là que je veux intervenir mais sur sa formule du christianisme qui me semble suggestive mais un peu succincte : la conscience était aussi bien grecque, romaine que juive dans l'histoire générale comme dans l'histoire des religions comme dans l'histoire juridique.
Absalon, Eschyle, Lucain appartiennent à des temps différents, à des espaces différents, mais... dans leur histoire, mythe, oeuvre rationnellement construite et écrite, ces divers éléments, ces diverse qualités apparaissent aussi bien.
Aucun peuple n'a, au demeurant, le privilège d'avoir inventé la raison, le droit, la conscience. Chaque peuple a cultivé la forme qui lui convenait, en visant à travers elle l'universalité, ce qui est naturel.
Toutes ces qualités sont ontologiquement humaines : saint Thomas lisait Aristote et Platon, les méditait autant qu'il lisait l'Ancien testament et le Nouveau testament.
Et si on lui avait présenté les travaux de Granet sur la pensée chinoise, ceux de Lévy-Bruhl sur les mythologies primitives extra-indoeuropéennes ou ceux de Georges Bataille sur l'érotisme, il les aurait lu avec non moins d'intérêt.
Enfin cela dit, j'en reviens au texte de Juan...
Ce que Juan a mis en scène dramatiquement dans cette méditation tendue, c'est le problème ontologique de la liberté humaine, d'une part, celui dialectique du déclin des cultures, des civilisations, des religions. On peut réunir et penser ces deux problèmes dans une perspective religieuse catholique : il le fait et c'est intellectuellement licite.
Écrit par : francis moury | 03/05/2009
Commentaires riches, en effet, qui démentent mon pessimisme sur ce type de débat.
Cher Francis Moury, je commence par vous, le dernier à m'interpeller. J'admets volontiers que ma formulation était succincte et beaucoup trop rapide, " qu'aucun peuple n'a le privilège d'avoir inventé la raison, le droit, la conscience". Je situais mon propos dans la sphère de la civilisation judéo-chrétienne, à l'intérieur d'un échange sur la spécificité du judaïsme, son apport au christianisme, sur les origines du christianisme et en particulier du catholicisme romain, héritier du logos rationnel des grecs, du droit romain, de la pensée biblique. Sur l'histoire de cet héritage, vous, philosophe ( ce que je ne suis pas, loin s'en faut!) en savez infiniment plus long que moi, mais croyez bien qu'il ne me viendrait pas à l'esprit de nier ces "qualités ontologiquement humaines" chez tous les peuples.
Gabriel, vous ne cherchez pas à convaincre, moi non plus, nous ne tomberons sans doute pas d'accord mais nous pouvons nous entendre. Je précise, pour vous et Francis, que j'employais le terme d'inventer au sens de "découvrir". Loin de moi l'idée de "génie" du peuple juif. J'ai écrit exactement : " L'invention de la conscience advient avec la révélation du décalogue à Moïse" . Je n'ai pas dit que Moïse a inventé le décalogue de lui même mais qu'il lui a été révélé par la Parole, le Verbe de Dieu,qu'il a su écouter et entendre.Je ne saisis pas très bien, Gabriel, votre phrase: " Un acte fou, un acte hautement irrationnel dont vos intellectuels seraient incapables". Je ne vois pas ce que vient faire ce "vos". Les penseurs que je cite ne sont pas à moi et ne sont pas des "intellectuels" avec la connotation péjorative que vous semblez leur attribuer. Ensuite, je ne vois pas ce que vous entendez par "acte irrationnel". Le fait que Moïse donne le décalogue à son peuple?
Par ailleurs, sur Paul, Bob vous a répondu magnifiquement : " Saul était l'homme de la Loi, Paul dans ses lettres sort d'Isaïe, il prend le recul de la grâce." Tout est dit.
Je reviens maintenant sur la haine contre les juifs. Très bel échange La Taupe-Stalker. Nous sommes d'accord. Ni l'anéantissement, ni l'assimilation. Je retiens ces deux beaux mots de Silvère, "voisinage" et "bienveillance" que je préfère à la "tolérance" pour laquelle il y a(vait) des maisons, comme chacun sait.
Gabriel explique (voire justifie) l'antisémitisme par l'orgueil des juifs "selon la chair". Juan répond avec Péguy: la chair est spirituelle, l'esprit est charnel. Là est le nœud que je n'aurai pas la prétention de dénouer. Simplement, plutôt que d'opposer la chair à l'esprit, il me paraît plus clair d'opposer le temporel, l'étant, au spirituel, à l'être ,et de revenir à la question du nihilisme laquelle nous reconduit au texte de Juan, j'y reviendrai. Je n'ai pas de problème avec l'Etat d'Israël, qui est là et qu'il faut défendre en même temps qu'un Etat Palestinien, mais j'en ai un avec l'idéologie sioniste que je vois comme un judaïsme sécularisé au même titre que notre démocratie relève d'une sécularisation du christianisme. L'Etat d'Israël lui aussi est pris dans le nihilisme accompli que Heidegger identifie au déferlement de la volonté de puissance, que les prophètes, comme le rappelle Bob, dénonçaient déjà. Je rejoins Gabriel mais non pour dénoncer "un orgueil juif" en général puisque cet orgueil est justement trahison de la Parole et que les juifs n'ont pas besoin de nous pour savoir que le mystère de l'Election n'autorise en rien cet orgueil mais au contraire impose le devoir de fidélité à la Parole.
Toujours selon Gabriel , l'antisémitisme disparaîtrait avec la 3e Alliance, quand les juifs reconnaîtront le Christ. Juan est plus nuancé, si j'ai bien lu: "quand ils l'admettront". Il me semble que dans l'état planétaire du nihilisme qui est si accompli que nous ne le voyons pas, qu'il nous paraît normal, que la dévastation et la ruine nous paraissent normales, qui n'est pas seulement ni exactement un "déclin de civilisation" comme le dit Francis, la question de la 3e Alliance est bien... prématurée!
Là, je reviens au texte de Juan et j'en remets une couche , comme vous dites, Gabriel.
Il n'est pas possible de clarifier en quelques lignes le lien entre la mort de Dieu, l'oubli du Verbe, de la foi en une Parole vraie transcendante, ou du moins, comme dit souvent Juan, d'un pari en la possibilité de cette Parole , et la maladie de la langue. Disons pour faire vite (trop vite, forcément) que sans ce pari, c'est le règne du relativisme et de la subjectivité, maîtresses de l'idéologie sous-jacente à l'enseignemet laïc actuel ( je sais de quoi je parle, par expérience). Ce point a été maintes fois abordé par Juan dans ses notes et par d'autres commentateurs, ici (Stéphane Lenormand). Je ne peux que répéter ce que dit le texte de Juan, ce que je disais plus haut: la langue qu'a entendue Youssouf depuis son enfance, c'est la langue des cités. La connaissez-vous, Gabriel, cette langue que les adolescents bourgeois ou petits-bourgeois adoptent par mimétisme, fascinés, où les mots n'ont plus qu'un sens relatif, subjectif? Quand ils vous disent: " POUR MOI, juif, ça veut dire ..." ?La couche, je l'étale: c'est bien parce qu'il est un homme creux, un beau parleur, un jongleur de mots qui ont perdu toute portée symbolique voire toute signification que Youssouf est né une deuxième fois, de son crime, le 13 février 2006.
Merci à Bob, La Taupe, Francis, à tous les autres et bien sûr à Juan pour cet échange. Soyez indulgents si mon commentaire est confus,à 1h06, un lundi matin...
Écrit par : Elisabeth Bart | 04/05/2009
Cette idée que la langue la plus adaptée à la conscience du sacré fut la langue juive, prédestinant ainsi son peuple à sa réception religieuse originale, et cette autre idée que la maladie de la morale provient d'une maladie de la langue devenue oublieuse du langage originel, qui reviennent assez souvent dans les textes de Juan et dans les commentaires de divers lecteurs, sont des idées intéressantes.
Mais il est assez piquant de lire ce qu'un Juif estimé, et spécialiste de l'Islam au demeurant, en a pensé : je veux parler d'Ignaz Goldziher (1850-1921) dont je lis en ce moment - habent sua fata libelli, comme le sait Juan - LE DOGME ET LA LOI DANS L'ISLAM, trad. par Félix Arin éd. de L'éclat & éd. Paul Geuthner 1927-2005.
Dans son Hommage biobiliographique à Goldziher, rédigé en 1927 et placé par les éditeurs en préliminaire à ces leçons, Louis Massignon nous apprend que Goldziher fut d'abord un disciple convaincu d'Ernest Renan, "profondément impressionné, dès ses débuts, par les derniers résultats de la critique scripturaire, concluant, avec Wellhausen, à l'hétérogénéité radicale de la Thora, et, avec Renan, à la précellence des Aryens sur les Sémites, finit par réagir là-contre de deux manières... d'abord en se refusant péremptoirement à nier l'originalité foncière des langues sémitiques, et de la culture dont elles sont le véhicule : Goldziher n'admet pas le postulat de l'infériorité a priori des langues sémitiques comme instrument de pensée (...) s'élevant contre les prétentions des langues indo-européennes à régir exclusivement les échanges intellectuels et autres dans l'univers, ce qui aboutirait, au surplus, à l'éviction de toute autre culture que la nôtre. (...)"
op. cit. p.XVIII
Goldziher écrit pour sa part, au § 1 ou la leçon n°1 intitulée "Muhammed et l'Islam", p. 14-15 le texte remarquable que voici et qu'on ne m'en voudra pas de citer un peu longuement, je l'espère, tant il est au coeur du débat initié depuis les origines de Stalker-Dissection du cadavre de la littérature :
"Pour démontrer le peu de valeur religieuse ou morale de l'Islam, on a aussi invoqué des arguments tirés de la langue dans laquelle ses doctrines se sont fait jour. On a dit par exemple que l'Islam était dépourvu de la notion morale que nous nommons conscience, et l'on veut fonder cette assertion sur le fait que "ni l'arabe lui-même, ni aucune autre langue musulmane ne renferment un mot propre à exprimer exactement ce que nous entendons par conscience."[Tisdall, The Religion of the Crescent, Londres 1906] De telles conclusions pourraient être faites aussi facilement dans d'autres domaines. Il est démontré que c'est un préjugé d'admettre qu'un vocable est le seul témoin digne de créance en faveur de l'existence d'un concept. "Une lacune dans la langue n'implique pas nécessairement la même lacune dans le coeur." [Sproat, Westermarck 1908, etc]. S'il en était ainsi, l'on pourrait prétendre à bon droit que les poètes des Védas ignoraient le sentiment de la reconnaissance, parce que le mot "remercier" est étranger à langue védique. [Oldenberg, La Religion des Védas, trad. française 1903]. Dès le IXe siècle, le savant arabe Djahiz réfute la remarque d'un dilettante de ses amis qui croyait pouvoir tirer de la prétendue inexistence d'un terme signifiant "libéralité" (djud) dans la langue des Grecs (Rum) une preuve de leur caractère avare. il critique aussi ceux à qui l'absence d'un mot signifiant "sincérité" (nasiha) dans la langue des Perses paraissait une preuve certaine de la fausseté innée de ce peuple.
Une force probante plus grande que celle d'un mot, d'un "terme technique", doit être attribuée à des sentences morales, à des principes reflétant la conception éthique,, comme il s'en présente dans l'Islam, et dont plusieurs font justement allusion à la "conscience". (...)
Le fait que ce premier manuel d'islamologie - "ce fut notre premier manuel d'islamologie" écrit Louis Massignon dans son hommage à son maître -ait été publié en allemand en 1910 sous la plume d'un Juif hongrois disciple initial d'Ernest Renan a quelque chose d'infiniment rusé.
"Ils méditent une ruse, et moi (aussi) je médite une ruse" (CORAN, Sourate 86 versets 15.16 cités et traduits par Goldziher, op. cit., p.22)
"Ils ourdissent des machinations contre nos signes. Dis : Dieu est plus prompt à ourdir des machinations" (CORAN, Sourate 8, verset 30 ibid. p. 22)
En somme, du côté juif comme arabe, hébraïque comme musulman, on est d'accord avec la culture indo-européenne pour privilégier la réalité d'un degré ontologique par rapport au langage. Celui qui corrompt le langage ne peut corrompre la réalité trop avant : elle a préséance ontologique et demeure incorruptible. La seule corruption possible est celle de l'esprit, qu'on nomme erreur en théorie de la connaissance, faute en philosophie morale, péché en terme religieux.
On connaît le précepte stoïcien fameux : "le fou qui affirme que le soleil brille dans le ciel à midi ne dit pas la vérité".
Écrit par : francis moury | 04/05/2009
Voilà Francis Moury a bien dit ce que je pense. Et puisque vous parlez des peuples, on peut tout autant dire que les peuples de l'orient ancien se gouvernaient selon le droit, que les égyptiens se gouvernaient selon la religion et les grecs puis romains selon la politique. Je verrais bien le fil conducteur judéo-chrétien uniquement du point de vue du sacrifice.
Adam aurait pu se gouverner selon la parole ...mais bon, il vaut mieux que je retombe sur terre tout de suite !
Écrit par : hélène | 04/05/2009
J'attendais impatiemment ce procès; j'étais certain que, comme dans à peu près tous les procès de racailles de nos jours, l'accusé ne demanderait aucun pardon mais au contraire se glorifierait de son crime. Je savais aussi que l'islam serait présent dans ce procès, et que les premiers coupables seraient tous ces fantômes présents dans la salle qui savaient, entendaient ou voyaient et se sont tus. Ces Kévin, Jennifer et autres clones zombifiés qui sont bien plus que Fofana l'Ivoirien, le signe le plus tangible de la mort de mon pays. Ces clônes gauchistes, mondialistes, pacifistes que d'instinct je hais depuis que je suis adolescent, ces âmes noires.
J'ai pris le journal ce matin-là et lorsque j'ai lu ce qu'avait déclaré Fofana quand le juge lui demanda sa date de naissance: j'avoue que les bras m'en sont tombés. Ca n'est pas Fofana qui a prononcé cette phrase, mais Satan. C'est exactement le processus girardien par excellence, le nihiliste paumé allé et revenu au bout de toutes les illusions modernes, et qui pour exister malgré tout pactise avec le diable. De ses lèvres sont sortis l'aveu qu'il est né le jour du meurtre, comme une préméditation du futur, comme si une renaissance de la France qui n'en finit plus d'être post-chrétienne ne pouvait venir que si une immense explosion de violence barbare sur un ou des innocents, ne donnait naissance à un nouveau sens. Un sens satanique, un sens antique, un sens primitif, un sens éternel, un sens non-chrétien. Un non-sens. Le meurtre fondateur, celui qui soude une communauté en pleine décomposition - Fofana n'a pas pu inventer ni comprendre cela, c'est donc Satan qui a parlé.
La messe est dite. Il aurait fallu en coller des taloches aux petits écoliers depuis des décennies, pour une insulte, une casquette sur la tête, un mot de travers. Dès le tout début, d'énergiques et christiques profs auraient dû faire preuve d'une sévérité inouïe afin d'espérer les convertir, ces barbares. La banlieue, les bobos, tous ces zombies n'ont pas besoin de relance économique, de confort, de respect, de multi-culturalisme, de vivre-ensemble et de tolérance - tous ces mots creux et maléfiques; ils ont besoin du Christ, de la Lumière, d'Autorité, de Claques dans la Gueule, du Péché Originel, d'Humiliations et donc d'Humilité pour qu'ils aient une chance d'être un jour de bons pères de famille et d'honnêtes chrétiens. Dès que Satan pointe sa tête hideuse en chacun de nous il faut le combattre pied-à-pied, sans relâche. La démocratie, les droits-de-l'homme, le marxisme et toutes ces immenses conneries ne furent que des dérobades pour toujours refuser le combet, refuser de voir et de regarder ce mal qui sans cesse ronge l'homme.
A force de reculades voici l'avenir: la France sera barbare. Elle tombe de haut alors ça prendra du temps, mais elle sera barbare. Si certains d'entre nous en avons encore le courage, y survivra une petite minorité chrétienne (voire judéo-chrétienne) qui aura toutes les chances de devenir le bouc-émissaire idéal de tous ces zombies mais qui parce qu'elle aura Dieu de son côté peut encore avoir un avenir. Il faut travailler avec rage et passion à son avènement, à sa sécession intérieure d'avec la pourriture qu'est la république française. Seul ce petit groupe saura regarder les yeux dans les yeux, Satan qui parle par l'entremise de Youssouf Fofana et plus largement de nos jours à travers le ressentiment islamique un peu partout sur le globe.
Écrit par : aquinus | 04/05/2009
A tous : si vous aviez quelques doutes quant à la qualité de vos (différentes) lectures, allez donc faire un tour sur Agora Vox (en lien) qui m'a demandé la permission de reproduire mon texte.
Attention, les commentaires y sont... extraordinaires, de stupidité, de racisme, d'incompréhension radicale du moindre mot écrit !
Écrit par : Stalker | 04/05/2009
Cher Juan Ascensio,
Lecteur récent mais assidu de vos splendides critiques littéraires (merci pour elles), je croyais vous situer assez précisément en matière politico-théologique. Toute une partie de votre Zone, Kirkegaard, Bernanos, Péguy, Conrad, Faulkner, Bloy, Dostoievski, Gadenne et quelque autres pas si nombreux, je l’avais déjà fréquentée dans la bibliothèque de mon père, laquelle me servit de repères en l’absence hâtive de son propriétaire. Voilà qu’avec votre texte à propos de Youssouf F et avec les commentaires joints, ce large champ s’est replié sur un coin de la Zone plus spécifiquement catholique romain. Ce rétrécissement faisant effet d’éloignement, il me fait voit le point où je me sépare.
Vous faites dire à Youssou f F ? : « Qu’elle crève (la France) si elle n’a pu me donner des raions de l’aimer. De la respecter. » Or une république, au sens de société politiquement organisée ou de Loi, ne saurait aimer ni se faire aimer – sinon perversement – et pas plus d’amour désir que d’amour charité. Elle ne peut être objet du désir de ses sujets, car une de ses fonctions est de rendre le sujet capable de désirer. Elle ne peut non plus bénéficier de la bonté de ses sujets parce que ceux-ci ne seront jamais ses prochains, ni, contrairement au mythe de l’Etat providence, leur donner quoi que ce soit, car elle ne donne pas, elle fait les comptes pour chacun, au besoin lui règle son compte, n’assiste que pour équilibrer les comptes, ne remets une dettes que pour apurer les comptes. Bien sur, de l’amour, le pouvoir aimerait en recevoir et ceux qui le combattent lui reprochent d’en manquer. Ce n’est pas d’aujourd’hui. Nos rois se prétendaient grands amateurs et pourvoyeurs d’amour comme n’importe quel Mitterrand ou Sarkozy. La différence est dans le jeu entre apparence et réalité. Dans France d’autrefois - disons celle d’avant la Grande Guerre - quand il s’agissait de l’amour d’elle, personne n’ignorait qu’on était dans la posture, la sérieuse posture sacrificielle. Dans la France d’aujourd’hui, on s’y croit et on en jouit, comme à un jeu de politique-réalité. Et certains en viennnent à appeler la France la maman de chaque Français (si ce n’est de chaque être humain sur terre),non par métaphore mais littéralement. L’effet de ce tour de langage est magique. Si la France est la mère de ses citoyens,elle ne peut plus désigner parmi eux aucun coupable. C’est elle la coupable à tous les coups. Coupable à gauche d’avoir fait de son enfant un criminel en ne lui donnant pas assez d’argent ni assez de savoir faire pour en gagner. Coupable à droite d’avoir fait de son enfant un criminel en ne lui inculquant pas les valeurs morales dont il est entendu qu’elles seules valorisent les valeurs monétaires. Dans tous les cas, l’enfant criminel est déchargé de toute culpabilité, comme il était déjà déchargé de toute culture, de tous sentiment, de tout manque. Le voila lui, l’inculpabilisable, plus vague et plus soluble dans l’air, carrément inexistant. De voir Stalker rencontrer inopinément, par ce biais piégé, le consensus qui prive le criminel de la faute pour mieux en délecter la société, je suis bien embarrassé.
Laurent J.
Écrit par : Laurent Jézéquel | 05/05/2009
"De ses lèvres sont sortis l'aveu qu'il est né le jour du meurtre" a dit Aquinus.
C'est effectivement horrible, si on prend cet aveu pour ce qu'il semble dire...
Mais quand on sait que la célébrité leur tient lieu de vie, que le fait d'être pris pour un "caïd" est fondamental dans les cités, que la loi tribale dicte de réduire les autres en esclavage, ne peut-on aussi imaginer que la naissance du sombre Fofana date de son entrée en "médiatisation"?
On entend sans cesse dans les media des idiots professionnels avouer qu'ils ne seraient rien sans... qu'ils n'existeraient pas si...
Bref, ne sommes-nous pas les "anonymes", nous qui ne sommes pas des "people"? On nous le redit assez à chaque occasion de rassemblement médiatique (obsèques, cérémonie... où les badauds affluent, en face des célébrités).
Écrit par : Marine | 05/05/2009
Laurent, vous plaisantez j'espère ?
Moi, dédouaner YF de ce qu'il a commis ?
Lisez les deux articles que j'ai mis en lien, sur le même sujet.
Lisez ma charge contre les bénis-oui-oui dans celui sur le meurtre d'Anne-Loraine Schmitt.
Il me semble, jusqu'à preuve du contraire, que je n'ai pas écrit la république française mais bel et bien : la France. Vous avez lu Péguy me dites-vous ?
Alors vous savez aussi bien que moi ce que je mets derrière ce beau nom, ce qui est un peu plus qu'une société politique organisée (quel charabia, au passage !).
Reste que Fofana est une création de la langue que les Français parlent depuis une bonne cinquantaine d'années (un peu plus même) et qu'il est décidément bien trop facile de faire comme si YF n'était qu'un taré improbable.
C'est au contraire un concentré de ce que je vois, ne demandant qu'à naître, en France...
Et puis, n'oubliez pas ce que j'ai tenté de faire avec ce texte : moins entrer dans la cervelle vide de Fofana que d'y tenter d'écouter telle petite voix que je connais bien...
Catholique romain ? Zut alors, d'autres m'ont trouvé, sur ce texte, plus juif qu'un Juif !
Écrit par : Stalker | 05/05/2009
Cher Francis, j'avais bien lu ton passionnant commentaire (prélude, je l'espère, à quelque recension future ?) et ai complètement oublié de te remercier.
Oui, je t'ai bien lu mais je reste du côté de Benjamin, Rosenzweig et Scholem, ainsi que de toute une partie de la patrologie chrétienne : il y a, entre le langage et l'esprit, un rapport infiniment plus subtil et profond que celui que tu désignes par le truchement de cet auteur.
Tu as lu Klemperer et sa formidable LTI ? Tu y verras comment le raccourcissement du langage, si je puis dire, raccourcit les idées.
Et Kraus bien sûr, et même Orwell dans le fameux 1984, et Canetti, et Broch, et Michelstaedter, moins connu mais passionnant (et édité par L'Eclat) !
Mes amitiés.
Écrit par : Stalker | 06/05/2009
Juan,
Vives félicitations pour ce texte très impressionnant et important !
Félicitations à Bob, Elisabeth Bart, Serge Rivron et Francis Moury pour leurs si intéressants commentaires !
Amitiés.
Samuel Gourio
Écrit par : Samuel Gourio | 06/05/2009
De rien cher Juan...
Oui je pense que je le recenserai (j'ai déjà relevé quelques coquilles : une recension doit d'abord être matérielle avant d'être intellectuelle !) mais il faut que je le lise d'abord intégralement, donne-moi du temps donc.
Je viens juste de terminer ma chronique de LES DEUX VISAGES DU Dr. JEKYLL (G.B. 1959) de Terence Fisher : entre l'histoire et l'esthétique du cinéma d'une part, et l'histoire de la philosophie, sans parler des exigences de la politique, de la morale et de l'histoire contemporaine qui veulent sans cesse qu'on les pense malgré tout, d'autre part, tu sais que mon coeur balance d'un mouvement régulier et que ce mouvement dévore mon propre temps d'écriture.
Oui tu m'as bien lu concernant ce commentaire "ontologique" et, oui encore, je me doute que tu restes du côté des trois philosophes contemporains que tu me cites.
Cela me rappelle, tout cela, une bien savoureuse conversation que j'avais eue avec le cinéaste José Benazeraf dans son Audi A8 ou A6 il y a déjà presque 15 ans je pense tandis qu'on roulait dans une rue parisienne. Je lui avais demandé, à bâtons rompus :
"Entre le langage et la réalité, si on vous demandait de choisir, que choisiriez-vous ?"
"Le langage, évidemment" m'avait-il immédiatement répondu.
Quelqu'un qui donne comme titre à un de ses films une expression tirée de Maïmonide pouvait-il répondre autre chose ?
Pour ma part, je préfère une réalité sans langage : les animaux me semblent, à mesure que je les observe toujours davantage, vivre une vie presque aussi riche, et peut-être bien plus pure que la nôtre.
Et je ne pense justement pas aux mammifère évolués dont le comportement est trop proche du nôtre car ils possèdent un langage relatif eux aussi, je pense, précisément en écrivant cela, aux animaux plus primitifs : les oiseaux, les reptiles, les batraciens, les poissons, les insectes.
Le langage m'apparaît toujours davantage comme un médium piégé - peut-être piégé par Dieu à dessein d'éprouver l'homme par une épreuve supplémentaire qui serait de parler à propos et de dire toujours le vrai, ce qui serait pourtant surhumain ou au-dessus de nos forces : la sagesse ancienne se méfie du langage pour cette raison, parce qu'il est un appel à une force surhumaine, et elle lui préfère le silence, l'extase, le repos - qui forme un paravent masquant la réalité davantage qu'il ne la dévoile.
Peut-être est-ce là ce qu'on pourrait appeler mon côté heideggerien ? Je fais en passant un clin d'oeil éthéré à Elisabeth Bart en écrivant cela, bien entendu. Et je sais que tu entends bien les soubassements conceptuels ce que je veux dire...
J'en reviens à ce que tu me dis, me cites aussi.
Klemperer pour moi, c'est Otto Klemperer, le chef d'orchestre allemand. Il y a un écrivain Klemperer ? Tu me l'apprends ! Une preuve de plus de mon inactualité foncière qu'il faut équilibrer par ta lecture !
Parmi les autres, Broch m'intéresserait assez, et Michelstaedter aussi car je ne les ai pas encore lus mais les résumés de l'Eclat sont assez tentants.
L'Eclat fait un bon travail en publiant tout cela, il faut le redire.
PS : la commentatrice Hélène dont je n'oublie pas la petite note sous un de mes textes, a eu, plus haut, une intuition juste concernant le sens du sacrifice dans la religion - bien davantage dans la religion catholique que dans la religion hébraïque, évidemment - mais il faut ajouter à cette intuition que le sacrifice est un fait constaté par l'histoire des religions dans de très nombreuses autres religions, et qu'il a plusieurs sens, outre le sens christique auquel nous autres, d'éducation catholique, sommes bien habitués. Ce fut le rôle des historiens, sociologues, psychologues des profondeurs d'étudier la nature, la fonction, le rôle, les sens du sacrifice dans les religions, des plus primitives aux plus élaborées et sophistiquées, y compris les religions monothéistes qui se classent de l'avis général dans la seconde catégorie pour cause d'épuration conceptuelle supérieure. Une bonne introduction : Mircéa Eliade. Puis Freud qui avait lu Frazer et quelques autres, Lévy-Bruhl, Mauss, Caillois, Batailles, Girard.
PS 2 : ce qu'ecrit Laurent J. concernant les relations du citoyen à sa république est contredit par Platon, Cicéron, Montesquieu et la grande majorité des grands penseurs politiques. La République ne se réduit pas à un jugement d'expert-comptable sur ses ayant-droits. Elle est autre chose, et repose sur bien d'autres rapports. Ce qu'il écrit concernant la culpabilité n'est guère plus rigoureux...
Écrit par : francis moury | 06/05/2009
Juan Asensio,
Dix ans après c'est un peu votre "France moisie" que vous nous proposez. Curieux que personne parmi les nombreux commentateurs (53 à ce jour) n'ait fait référence à ce texte de Philippe Sollers qui avait fait scandale, pas même la très subtile Elisabeth Bart.
Je vous souhaite sincèrement le même destin.
En envoyant mon chèque de réabonnement à ma revue préférée (l'Infini), j'ai indiqué à Philippe Sollers votre texte. Peut-être en parlera t-il dans sa chronique mensuelle du JDD?
Sur la question de la culpabilité juive face au Christ, sur celle du rapport entre langue et barbarie, je serais curieux de lire ce qu'en pense l'écrivain Stéphane Zagdanski, c'est pourquoi je me propose, via son site internet "Paroles des jours" , de lui envoyer votre texte (ou d'indiquer votre site).
Sur la maladie de la langue, encore une fois Sollers est là:"Le langage est la pomme du Paradis. Il n'était pas prescrit de jouer avec (pourquoi pas?), mais il était strictement interdit de l'avaler, sinon chute, péché. Et ça dure".
Plutôt que la France moisie, n'avez-vous pas écrit la France maudite? (mots dites).
Denis Lair
Écrit par : Denis Lair | 06/05/2009
Denis : voyez comme il est plus agréable d'être poli, non ?
France maudite tout autant que moisie, oui, excellent rapprochement, même si, ayant récemment relu le papier de Sollers, permettez-moi de vous dire, en toute immodestie sollersienne, que mon texte va ou plutôt descend infiniment plus bas que le sien.
Je creuse et il ne reste qu'à la surface des choses.
Or il faut creuser lorsqu'on écrit, un véritable tunnel, et traverser, tant que faire, les apparences.
YF n'est qu'une apparence, le symptôme d'un mal infiniment plus profond et qui a nom : la France, voilà bien pourquoi ce texte dérange et n'est pas relayé sur la Toile (hormis sur le site Agoravox, catégorie Tribune libre, où il a déclenché des commentaires d'une rare stupidité)...
Sollers se trompe toutefois, permettez-moi de vous le dire, Denis : il faut avaler le langage, de la même façon que le prophète avale les mots marqués au fer rouge, qu'il ingurgite le tison divin.
Ce qu'il ne faut pas faire avec lui, en revanche, c'est jouer.
Et Sollers joue beaucoup trop avec le langage, de sorte qu'il le moisit un plus, voici le sens de tous mes textes contre lui.
Écrit par : Stalker | 07/05/2009
Là, entièrement d'accord avec votre belle réponse, Juan.
Sollers dira que "vous ne savez pas danser".
Danser pendant que l'Apocalypse se prépare, cela me fait penser au conte de Poe, "Le masque de la mort rouge". Il y a à creuser... dans votre réponse. Pas le temps, sorry. Message écrit en vitesse.
Denis Lair: je danse entre Stalker et Paroles des Jours, entre les deux pôles les plus intéressants de la littérature française aujourd'hui. Il faut une certaine souplesse pour faire le grand écart! Je suis chez moi dans la Zone, l'autre pôle est le nécessaire contrepoint, pourvu que le tempo soit juste!
Écrit par : Elisabeth Bart | 07/05/2009
Moi non plus je n'ai pas dit République française, mais république, en rappelant, justement pour éviter la confusion, la définition classique du mot dans son usage ancien. Charabia ? On trouve le mot dans ce sens chez Platon, Aristote, Montaigne, Rabelais, La Fontaine, Diderot , Rousseau, tous excellents auteurs de langue charabia et pas très catholiques.
Non je n'ai pas lu vos autres textes auxquels vous me renvoyez, comme vous me renvoyez à Péguy. Ce qui m'importe c'est que vous avez bien écrit ce que vous avez écrit dans le seul texte que vous proposiez aux commentaires. Si c'est la lâcheté de la France qui a tué Ilan Halimi, vous faites de Youssouf Fofana un innocent. Si c'est la France qui a fabriqué Fofana, vous en faites même une victime. Débrouillez-vous avec ça.
Jamais un Juif ne dirait "la France et ses Juifs", vos amis s'égarent
Écrit par : Laurent Jézéquel | 07/05/2009
Cette métaphore de l'écriture comme tunnel à creuser me plaît assez. Mais je pense que la véritable image, c'est celle de la descente dans les profondeurs, à la manière physique des spéléologues vérifiant l'état des fondations de la Terre, gorgée d'eau et de feu.
Psychologie des profondeurs, ontologie des profondeurs.
C'est peut-être la rudesse de la tâche et les dangers collatéraux qu'elle peut toujours faire encourir qui sont la raison profonde de la peur suscitée en moi par un des derniers grands films fantastiques vus ces dernières années : THE DESCENT.
Un Néo-platonicien, autant que son ennemi Gnostique, pourraient y voir une métaphore symbolique du cheminement de l'âme à travers la matière. Pourquoi pas ? Ce ne serait pas une interprétation si déshonorante intellectuellement.
On peut cependant y voir également, d'une manière plus moderne et même contemporaine, une symbolique de l'écriture : d'abord tentative pure de description, de repérage, puis tentative plus risquée de création originale, enfin danger que la réalité initiale et la réalité nouvellement accouchée ne se heurtent en un conflit dont les enjeux sont rien moins que la vie ou la mort de l'une des deux, de leur accord ou de leur lutte, de son résultat in fine. Combat infini par essence, comme par existence, au demeurant.
PS : L'infini est une notion orientale introduite dans la philosophie grecque à l'époque de Plotin... avant il était l'indéterminé, négatif simple du déterminé, du formé, qui lui était par essence supérieur. L'idée d'un Dieu infini n'allait pas de soi...
PS2 : amitiés à Samuel Gourio que je remercie, comme toujours, de sa chaleureuse appréciation.
Écrit par : francis moury | 07/05/2009
Texte superbe, merci.
Écrit par : XP | 07/05/2009
Excellent texte, Juan.
Parmi tous les commentaires, Élizabeth m'a fait réfléchir le plus.
Salutations canadiennes
Écrit par : Pascal | 08/05/2009
Salut,
« Au commencement était le verbe », non !, disait Céline, au commencement était l’émotion. Et c’est là que nous avons chu, précisément, dans la rue émotive, la poésie de trottoir, l’émotion de caniveau carnavalesque, dans laquelle on ignore les symboles au profit des laudateurs médiatiques du grand simulacre, qui ont bien-pensance en bandoulière et novlangue superlative au râtelier.
Juan, vous savez tordre la plume pour qu’une fois plongée dans l’eau du récit on puisse la voir droite ! En d’autres termes si vous l’avez raide, ça bande, comme un arc, boutant l’architecture mentale victimaire hors de ses oripeaux fascistes, pour mettre à nu la bigoterie barbare des Citoyens du Monde… (oserais-je souligner, car « ils se sentent » moins français eux aussi que touristes internationaux, terriens -nul doute que pour ceux là on n’ait jamais marché sur la lune… épris qu’ils sont de complots en théories… mais qu’ils écrivent ou votent sur les sites de la grande démocrassie agoresque ouaibistique citoyenne, ça n’étonne guère). Quel strip-tease !
La novlangue contemporaine n’a rien à envier à celle du IIIème Reich – on peut relire Victor Klemperer précisément et Wilhelm Reich ; elle n’est pas celle de cette sorte de IVème Reich contemporain que nous vivons, elle en est l’aboutissement en temps de paix relative, pour dire vite, la parole étant morte dans les camps.
A la suite de ce mutisme, le Français à d’abord adopté le terme d’Holocauste, provenance germanique, avant d’entrer dans le dictionnaire celui de Shoah… quelle langue parle-t-on ? D’où parle la langue ?, comme dirait la psy. C’est la question.
Quels sont les slogans de cette humanité réduite ? Le « devoir de mémoire », pour exemple, n’est que l’aveu ou le symptôme d’une société malade qui a construit la volonté d’oublier.
La répétition banalisante d’un « plus jamais ça », de la fausse bavure policière en passant par les licenciés de chez Danone, la négation du réel depuis le « tous égaux » qui s’oublie de droit, « en droits », jusqu’aux aveugles non-voyant et nains de petites tailles de Murray…
Les amalgames douteux d’une presse enSartré dans la fascination Genêtiste, du moisie de la gôche qui avala l’hostie Vichyste au communautarisme ethnique de l’union populaire qui boit le calice aux sabbats…
La gangsta kultur…
La culpabilité coloniale ayant remplacée l’ontologique…
Fofana est bien le fruit pourri de cette énorme forfanterie machinique, ce présent qui n’en finit plus, ce nihilisme qui pue le Zyklon B, qui étouffe et contraint le réel ; l’écrire et le comprendre ne le disculpe en rien, ce tortionnaire meurtrier ; le contexte permissif, voire incitatif dans certains non lieux, n’est pas l’argument de son innocence, juste la condition de son crime avéré, de sa répétition possible, de sa propagation probable tout comme de son éventuelle disparition orchestrée. Son geste n’est pas le fait du hasard, son crime n’est pas qu’un simple fait divers. Le qualifier comme éclairer ses tenants hors trivialités policières, au-delà des manœuvres juridiques n’atténue pas la cruauté de son acte, n’aboutit pas à l’excuser, mais à une mise en garde.
L’exercice de style était périlleux, il est plutôt bien mené.
Écrit par : Bardamu | 08/05/2009
Voici un excellent texte autour des rapports entre la vérité et le langage: http://www.lettres.uottawa.ca/vanden/verite.htm
Écrit par : Pascal | 08/05/2009
Laurent J, je n'ai pas de problème avec mon texte, pour la simple et bonne raison que je n'exonère absolument pas YF de son crime abject.
Relisez-moi sur ce point.
Je ne fais pas de YF, comme le font les bien-pensants de tous bords, un pauvre type de banlieue victime d'une odieuse ségrégation ou je ne sais quoi. Dans quelques jours, les sociologues et les psy nous diront, la main sur le coeur, que ce pauvre garçon, jeune, a vécu un choc traumatique qui ne pouvait que le faire basculer dans la violence et le crime blablabla.
Non.
Je pense, bien plus difficilement, une compénétration métaphysique ou même, à mes yeux, mystique, entre les actes de YF et le discours (et donc la politique, et les actes, et notre vie de tous les jours qui en découle) qui est celui de la France, que j'hypostasie, depuis une bonne cinquantaine d'années et j'affirme autre chose : YF n'est que l'un de ces signes parmi tant d'autres, la barbarie n'étant point à nos portes mais au sein même de... l'Empire, ai-je écrit en premier, je ne corrige pas !
Aux autres : merci infiniment, je suis frappé par la qualité de vos commentaires, cela me change des immondes crétins racistes qui ont dépose leurs crottes sur Agora Vox.
Un autre basculement aussi : avez-vous remarqué que les patrons de blogs historiques, disons certains de ceux qui figurent encore dans mes liens, ne commentent pas ce type de texte, alors que j'ouvre pour le moins rarement les commentaires ?
Il y a là plus qu'un changement de régime : Stalker est tout simplement passé à la vitesse supérieure, alors qu'ils en sont toujours à nous pondre de petites notes une fois sur deux égolâtriques donc insignifiantes.
Ah !
Écrit par : Stalker | 08/05/2009
Pour Pascal :
votre lien est intéressant et suggestif car cela évoque pas mal de problèmes importants mais cela mélange tout, cela contient des assertions et des résumés contestables, et cela passe tranquillement par-dessus l'histoire de la philosophie qui n'est pas aussi claire ni aussi simple que le voudrait ce professeur canadien.
Si la conception de la vérité chez Platon était, par exemple, demeurée celle du Cratyle, nous n'aurions pas eu Le Parménide, ni Le Sophiste, ni Le Philèbe et le reste.
Inutile de vous dire que le problème antique puis médiéval de l'adaequatio est un plus compliqué que ce qui est résumé ici.
La rupture épistémologique est ainsi soutenue tranquillement alors qu'elle ne va absolument pas de soi : c'est passer par-dessus le débat Gaston Bachelard qui la défendait et Emile Meyerson qui la niait, Alexandre Koyré qui était son disciple, et quelques autres.
On ne voit pas non plus pourquoi les structuralistes et les sémanticiens structuralistes, parce qu'ils arrivent plus tard, marqueraient un progrès. A.J. Greimas et Derrida étaient des sophistes au sens platoniciens.
Austin est plus intéressant, Wittgenstein aussi.
Ah une chose aussi : pourquoi toute tentative serait-elle vouée à l'échec ? Aristote, Hegel, Auguste Comte auraient "échoué" du fait d'avoir eu cette ambition ? Et c'est ce professeur d'Ottawa qui les remplacerait ? Vous n'y croyez pas un instant, n'est-ce pas ? Moi non plus.
Le reste à l'avenant...
Si vous vous intéressez au problème de la vérité et du langage, cher Pascal, commencez donc par le commencement : lisez les Présocratiques, puis Platon, puis Aristote, puis les Stoïciens, les Epicuriens, les Sceptiques, enfin les Néoplatoniciens.
Embrayez ensuite sur les Pères grecs et latins puis sur la philosophie médiévale.
Ensuite seulement la philosophie moderne (XVII, XVIII, XIXe siècles) et contemporaine (XXe siècle).
Cela représente une durée d'étude de quelques années, inévitablement plus longue que le temps nécessaire à lire l'article de ce brave professeur mais cela vous donnera les moyens de vérifier ce que je vous dit.
Bref il faut lire les philosophes et les études classiques d'histoire de la philosophie avant de croire les cours de ses professeurs contemporains.
Seconde partie du travail : les études sur la vérité, le langage dans l'histoire de la philosophie. Je vous donne deux pistes qui me viennent immédiatement à l'esprit mais qui exigeront que vous ayez déjà lu ce que j'ai déjà mentionné.
- Le N° Spécial LA VERITE de 1958 de la revue Etudes philosophiques (P.U.F.)
et
- Brice Parain, Réflexions sur la nature et les fonctions du langage.
Aussi, plus bref mais tout aussi dense, les chapitres sur la vérité et sur le langage dans les anthologies de textes classiques et les manuels français à l'usage des classes terminales : je vous renvoie à mon article paru chez Juan, donc sur ce site, sous le titre de
- « Exégèse d’un non-sens (presque) commun » ou « Contre le livre collectif de Gilles Grelet, « Théorie-Rébellion, un ultimatum » », Paris 27 janvier 2006
PS pour Elisabeth Bart
Chère Elisabeth Bart, une phrase d'un de vos précédents commentaires m'a fait tiquer et j'avais négligé de la reprendre dans mon intervention antérieure :
"Je n'ai pas de problème avec l'Etat d'Israël, qui est là et qu'il faut défendre en même temps qu'un Etat Palestinien."
Que vous n'ayez pas de problème avec lui ne m'étonne pas trop puisque, si j'ai bien compris, vous habitez en France.
Mais je crois, en revanche, que pas mal de Palestiniens ont un problème sérieux avec cet Etat depuis qu'il "est là" pour reprendre vos propres termes et qu'il ne va absolument pas de soi qu'il soit là ni qu'il faille le défendre.
Il va encore moins de soi qu'il possède l'arme atomique en quantité relativement importante : le président Obama vient de prendre la mesure de l'erreur américaine qui a consisté à soutenir inconditionnellement cet allié avide de domination et de guerre. Je parle de l'Etat pas d'une partie de son peuple sincèrement épris de paix et qui le manifeste à la moindre occasion : une autre partie en est nettement moins éprise, c'est l'évidence.
Pour vous dire le fond de me pensée, je pense même qu'il devrait - bien qu'il ait vocation à exister et à se fixer en un point de la Terre, ou d'une autre planète lorsque les voyages intersidéraux seront à bas prix, étant donné la faible valeur de sa monnaie et son inconvertibilité sur les marchés des changes - partir, s'exiler, quitter ce territoire et aller s'installer ailleurs si nous voulons avoir une chance de connaître à nouveau la paix sur cette Terre.
Je vous signale quand même que cela fait environ 70 ans que la création politique de cet Etat a créé une situation de guerre qui perdure...
Il fallait créer un Etat juif pouvant défendre ses ressortissants et unifier politiquement son peuple disséminé, c'était légitime mais la faute fut de l'installer à cet endroit précis pour des motifs religieux.
C'est en outre une durée de guerre, vous en conviendrez aisément, à laquelle on n'était plus tout à fait habitué durant la période moderne et contemporaine en matière de guerre.
Revenir là-dessus pour la énième fois, et dans une telle occasion (un Juif assassiné et torturé par des voyous criminels et antisémites) m'est pénible mais je considère cette précision comme un devoir moral et politique, malgré le cadre pénible dans lequel cette précision est apportée.
Écrit par : francis moury | 08/05/2009
C'est un texte odieux et terrible. De haine et de terreur.
Et peut-être en effet à la hauteur, enfin, à la bassesse, de la chose.
C'est également, à la lecture, un texte éprouvant : on vous voit à chaque ligne donner votre pensée et le contraire aussi de votre pensée et votre langue à ce sinistre abruti de Fofana.
Ce n'est pas tant ce que vous dites par exemple de la France et de son état qui est terrible (quoi que cela le soit aussi), c'est que vous le fassiez dire à Fofana, ou à son double avoué, si l'on prend au sérieux votre titre, qui le fait naître - mais naître à quoi ? - au jour de la mort d'Ilan Halimi; et meurtrier.
Tout ce que vous écrivez là est au moins tordu deux fois, et chaque chose dite gagne immensément en puissance, d'inquiéter autant : qui parle-là ? Est-ce Asensio pour lui-même, ou quelle torsion fait-il subir à ce qu'il pense pour pouvoir écrire "moi, Youssouf Fofana" ? Et que ne lui donnez-vous de vous, qui faites lire à Fofana Conrad ? Cette ambiguïté-là est réellement violente ; elle place le lecteur en porte-à-faux, refuse de lui donner sa soupe de prêt-à-rabâcher et dévaste tout ce qui est affirmé.
J'ai entendu dans votre texte parler à la France morte le spectre de Fofana, la parcourant à sa guise, pour ainsi dire en maître - tout le reste est abandonné. L'image a l'air shakespearienne pour rien, pardon, mais en même temps votre texte m'a donné à y penser.
Ce n'est pas tant votre courage qui est impressionnant (je ne doute pas de lui), c'est votre générosité. Elle est immensément dissimulée derrière tout ce qu'il y a à lire dans votre texte, avec sa richesse et ses strates de sens paradoxales - sans compter qu'obstruent grandement sa lecture les tombereaux ordinaires de fadaises médiatiques.
Et à un moment, il importe peu que ce que dit ce texte soit "vrai" ou emporte je ne sais quelle adhésion, ce qui importe, c'est que soient posés clairement et violemment tous les mots qui sont posés là, pour ainsi dire en situation : le Juif, la France, la chrétienté, la haine, la lâcheté...
Écrit par : Pascal Adam | 09/05/2009
Juan, bonjour,
Que ce soit du site d’un Piwi Plenel comme de l’olibrius Clark Kent Schneidermann ou que cela sorte d’Agoravomix, je ne doute pas que cela pousse ou sente plus du côté scatologique qu’eschatologique ; le peu de fois que j’ai eu à lire les immondices de ces « mutins de Panurges », je l’ai fait en apnée, pour ainsi dire, tant les commentaires, par leur nombre terrifiant autant que par l’indigence intellectuelle qui les caractérise, m’étaient envahissants.
Faut pas être trop maso. Bref merci à vous, qui « nous » sortez de la torpeur participative.
Pascal. Ouep, intéressant l’article. Rien ceci dit sur l’hyper criticisme de Chomsky, grand négateur du réel par ses sophismes et contre-vérité répétés, la manière éristique de sa non pensée… sans doute est-il trop apprécié là bas… faut dire qu’y est allé scèner dans l’bout, le Noam, l’a pas faite la job à moitié, pour niaiser son monde l’est pas l’dernier pantoute pis faut être full majeur pour pas finir les mains dans face avec ce gars là, ! Chuis tanné de watcher le « big brain » sticker aux post d’internautes décérébrés… c’est le faux fana de la linguistique ce type, un meurtrier de la pensée critique. Faut l’dire !
Et puis, ds l’allocution d’Ottawa tjrs, quelques assertions ou postulats et exemples sont parfois un peu courts. Je ne développe pas je dirai juste qu’il n’y a pas un glissement de l’épistémè… cela ne veut rien dire, mais un glissement de l’épistémè vers la doxa, ce qui est autre chose.
Bien conduite l’épistémologie est intéressante mais le blabla universitaire… les idées y’en a plein le dico, comme disait l’autre... parfois en quelques mots seulement… comme chantait Lou Reed par exemple :
There is a difference between wrong & right, but Billy said both those words are dead, that’s the story of my life…
Ciao.
PS Bardamu hier aujourd’hui Sacater, parce que je viens de découvrir sur votre site, Juan, qu’un premier Bardamu officiait déjà, était allé en janvier au casse pipe à propos de Sollers.
Le papier sur Nib, pardon Nabe, cette petite vermine, un régal !
Écrit par : Sacater (Bardamu d'hier) | 09/05/2009
Ce texte ne me pose aucun problème de fond : la fonction d'un écrivain est, notamment, de pouvoir assumer la parole de tous. On va dire que l'écriture, dans certains cas, a presque un aspect christique dans le genre : "Je prends tous les péchés du monde..." Sur cela, je ne veux même pas revenir. Ce qui me gêne davantage dans le texte, c'est le manque de respect envers les faits, puisque vous vous donnez comme celui qui parle à la place... Vous oubliez de mentionner qu'il y a eu plusieurs tentatives d'enlèvements sur différentes personnes, et même des non-juives. Vous oubliez de vous oublier , et c'est le plus important à mes yeux : autant je crois que le plus grand respect est dû à la victime de ces atrocités, autant tout le monde se croit obligé de "chosifier" Fofana, d'en faire sa chose, et ça c'est insupportable à mes yeux. Vous lui manquez de respect en utilisant vos mots pour tenter de l'expliquer, lui ; vous lui manquez de respect en n'assumant pas du tout sa parole ; vous lui manquez de respect parce que le lieu de la littérature n'est pas le lieu du mensonge, mais de la vérité cachée. Or, vous avez édifié une muraille de mots autour de Fofana, si bien qu'on ne le voit pas, et que votre rôle aurait été de le faire voir. Dans ce texte, vous vous montrez aussi. Trop sans doute. Je ne pense pas que ce soit dans les termes immédiatement lisible, mais dans la forme et la syntaxe, c'est indéniable. Pour ce qui concerne le fond de cette affaire, je pense aussi qu'elle dépasse les limites du simple faits-divers, qu'elle est symptomatique d'un malaise, mais je ne crois pas que ce malaise soit raisonné, ni même perçu comme vous le croyez. Ce crime est antisémite par hasard, comme il aurait pu être autre chose : les circonstances ont commandé les motifs de "dépersonnaliser" la victime. Si une fille avait été enlevée, je suis presque certain que Fofana aurait prétendu que c'était une putain. S'il est intelligent, il est aussi "bestial", et comme les animaux, il cherche toujours la meilleure issue pour s'en tirer. Il y va à l'instinct, et c'est, je pense, en cela que je vois votre texte comme un "mensonge".
Ceci étant dit en toute cordialité.
Écrit par : mon chien aussi | 09/05/2009
MCA (comme c'est ridicule) : vous ne m'avez pas lu, j'ai répété que je n'avais pas tenté de capturer la petite musique de YF mais la voix qui lui parlait, la mienne peut-être, ceci étant dit en toute cordialité.
Vous avez cependant raison, en tant qu'écrivain, je lui ai manqué de respect et il eût fallu un Faulkner pour entrer dans la tête de ce Benjy meurtrier. Je crois l'avoir dit aussi quelque part.
Ceci dit, écrivant ce texte, j'ai tenté d'être assez, oui, christique, non par goût mais parce que l'écriture veut ce parcours, surtout lorsqu'il s'agit de "pénétrer" dans la conscience de pareil type.
Francis : je connais ta position et il me semble qu'Elisabeth pourra la retrouver exprimée sur Stalker.
Pascal : merci.
J'ai pour le moment supprimé un seul interminable commentaire, aussi odieux que lamentable, d'une connasse de première magnitude s'appelant Fleur et qui commente régulièrement sur le blog de Roman Bernard (Criticus) où elle n'a pas aimé que je moque son goût pour le pitre Bourdieu.
Son adresse IP est définitivement bloquée chez moi.
Écrit par : Stalker | 09/05/2009
"Il eût fallu être un Faulkner." Je vous le répète, votre texte ne me perturbe pas du tout par son contenu, mais bien par la position que vous y prenez en tant qu'écrivain. Et à ce niveau-là, je vous trouve beaucoup plus faible que dans toute la mise en scène verbale des justifications. Un écrivain ne "s'exprime" pas par des mots mais par des formes, et votre forme, je la trouve hésitante. (Je ne parle pas du style, mais du condensé que fait le style, l'éthique de l'écriture et l'éthique de l'écrivain). Un peu comme un boxeur qui cogne, qui cogne, qui cogne pour gagner, sans se poser la question de la signification de cette victoire, ni ce que cette victoire implique. Alors, vous évitez la question en disant : "Il eût fallu être Faulkner." Quand vous avez dit cela, vous n'avez rien dit, sauf que vous aviez renoncé. En même temps, vous "publiez" un texte dont vous avouez d'emblée la "faiblesse" intrinsèque. Vous n'êtes pas Faulkner. Bon. Faulkner non plus n'était pas Faulkner. Si vous avez la possibilité, procurez-vous les entretiens de Faulkner confronté à une classe de littérature dans je ne sais plus quelle université américaine. Vous y ferez une constatation : être fort en gueule (ne prenez pas cela comme une injure, ce n'en est pas une) ne suffit pas, être audacieux ne suffit pas : il vous manque cette ultime audace de l'humilité (vertu chrétienne que vous devriez connaître). Et j'ajouterai un autre élément que vous aurez bien du mal à conquérir : un léger dégoût de votre propre écriture, ce qui vous empêcherait une certaine complaisance.
Pour terminer : mon pseudo. En vous en moquant, vous avez fait preuve d'une naïveté qui vous sauve à mes yeux. Faites parler davantage cette naïveté.
Si vous le permettez, je continuerai à vous lire.
Cordialement.
Écrit par : mon chien aussi | 09/05/2009
Mon chien aussi, je vous remercie pour vos bons conseils, surtout lorsque vous me rappelez, sans rire, qu'un écrivain ne s'exprime pas par des mots.
Continuons : si je devais publier un texte dont je n'avoue point l'impuissance, je ne publierai rien, remarque valable pour n'importe quel auteur quelque peu conscient de ses possibilités et impossibilités...
Merci encore pour les conseils de lecture, je ne lis pas que vos contributions sur le Post.fr, rassurez-vous, sans cela...
Vous parlez beaucoup, et apparemment de très haut, preuve sans doute de votre humilité : rassurez-vous, la mienne est énorme, de même que le dégoût à l'endroit de mes textes, léger élément qui, si vous connaissiez mieux ce blog, ne vous aurait point échappé je crois.
Je dis cela, bien sûr, en toute modestie, vous me connaissez.
PS : n'abusez pas trop tout de même de mon infinie patience, je n'ai aucun goût pour les drôles pseudonymiques, y compris même lorsqu'ils sont aussi intelligents que donneurs de leçons que, pour l'essentiel, j'ai intégrées apparemment à votre insu...
Écrit par : Stalker | 09/05/2009
Et oui sans rire : de même qu'un peintre ou un dessinateur ne s'exprime pas que par les figures représentées.
Et pour mon pseudo, je m'étonne que vous n'ayez pas vu, étant donné votre appareillage intellectuel, qu'il faisait allusion à un passa ge du Gai Savoir. C'est pour cela que j'ai parlé de naïveté. Croire que c'était uniquement une blague !...
Pour terminer : je ne pense pas que votre patience est infinie. Vous aimez le croire, c'est tout.
Écrit par : mon chien aussi | 09/05/2009
@ Francis
Merci de la rétroaction. Mon ancien maître Christian Vandendorpe (un rhétoricien accompli) a - sans nul doute - lu tous les livres que vous aviez eu l'obligeance d'énumérer. Néanmoins je prendrai soin d'imprimer votre commentaire pour me plonger plus avant dans les rapports entre Vérité et la langue.
Juriste en herbe, j'ai étudié HLA Hart, l'une des plus grandes figures du positivisme juridique non moins qu'un fils à la fois spirituel et critique de Wittgenstein et d'Austin. Je vous dis cela parce que la pensée de Hart m'apparait en adéquation avec le petit texte de Christian Vandendorpe. Grand lecteur du Stalker et de vous aussi, mon cher Francis, je préfère les Dworkin et le jusnaturalisme.
@ Juan, Elisabeth, Francis
À la lecture de la fable "L'écolier, le pédant et le maître d'un jardin" par le classique La Fontaine, Juan réussit à corroborer sa position, osé-je croire. N'oubliez pas que "Pédant" vient de l'italien "prof".
http://www.lafontaine.net/lesFables/afficheFable.php?id=178
@ Sacater (et pendant que j'y suis, Bob aussi)
De grâce, arrêtez de caricaturer le joual (l'argot québécois)! Je viens ici en lecteur fidèle, parce que Juan mobilise un langage à la fois personnalisé et irréprochable et, pour tout dire, à la portée de toute la francosphère, par opposition à des argots comme le verlan ou le joual, lequel, en fait, n'est autre qu'une preuve de la colonisation francophone sous la botte des "God Save the Queen". Richard Millet (que l'ami Juan prend de très haut) n'a pas eu tort de rappeler à la francosphère que le Traité de Paris tua la francophonie. Et puis, Bob, moi le littéraire francophile, je ne te comprends point. ("M'est avis que"; "ratti", autant de pédanteries indignes de ce blogue)
À la base, le français du Québec est celui de Rabelais, auteur qui fit appel à un riche vocabulaire de 25000 mots, alors que Molière se borna à 5000 mots - en partie - pour cause de l'empire de l'Académie. C'est dire le potentiel créateur du Québec!
Amitiés à tous.
Écrit par : Pascal d'Ottawa | 10/05/2009
Francis,
vous me rappelez Tertullien, dont je ne citerai que cet extrait
"Car tu as fait de ton ventre un dieu, de ton poumon un temple, de ton estomac un autel. Ton prêtre, c'est le cuisinier; ton Saint-Esprit, c'est la fumée d'un plat; tes grâces, se sont les sauces et les ragoûts; ta prophétie, c'est le hoquet de la satiété."
L'imitation est une arme autant qu'un art...
Écrit par : hélène | 10/05/2009
At Pascal :
Mon cher Rétif de la Bretelle,
de l’argot dites-vous ?! Du slang oui ! Merci pour la leçon.
M’est avis que votre forme est toute aussi désuète que celle que de Bobby vous critiquez. Pédanterie mise à part, à peine, descendez de vos ergots et plaignez le temps de vos études auquel vous avez moins qu’à votre tour gallé… «pendant que vous y êtes».
Droit dans vos Saussure ne faites pas la Greimas aux cingles de ces petites-musiques, étrangères à votre couche, vous seriez grand fol et ce serait faire le fat, si dans les pas d’un Destouches, vous voyiez raison molle ou à mauvaises mœurs dédiée. Souffrez qu’on s’y colle, que l’on aille de ce côté ou dans son dos grenouiller, cher Ignatius, ce n’est pas le moindre de mes vœux malgré quelques ratures… vous pourrez toujours vous chatouiller l’hibiscus de ma maigre littérature ; quant à votre maître que l’on devine morveux, eh bien, qu’il se mouche !
Que diriez vous du TdO sinon qu’en Taddei ?! Quelques pensées interlopes, éructées plus que de votre bouche en cul de poule, d’ensablées escalopes bien carrées dans le moule.
Châtrez, châtrez vos expressions !, vous finirez par boire de votre vertu le bouillon.
Et puis le grandiose, je ne le dis pas en mauvaise part -excusez la litote, mais avec Cézanne, finit par fatiguer ; je ne suis pas de ces braillardes têtes de linotte ou de ces ânes en sinistrose qui d’une époque peu couillarde font une montagne en n’osant s’écrier «Nom de Dieu !», tenez vous le pour dit, mais morbleu !, pour tous les jours un simple coteau suffit.
Écrit par : Sacater | 10/05/2009
Cher Francis Moury, vous êtes d'une rigueur implacable qui m'oblige à préciser mes propos d'autant plus que je suis plus proche de votre position que vous croyez.
Dans mon commentaire du 2/5, j'ai écrit: "Beaucoup de juifs, l'état d'Israël, sont pris eux aussi dans la gangue du nihilisme."
Et dans celui du 4/5: "Je n'ai pas de problème avec l'état d'Israël [...] mais j'en ai un avec l'idéologie sioniste que je vois comme un judaïsme sécularisé."
Pour Juan, l'état d'Israël est une "écharde" dans la conscience du monde en ce sens qu'il rappellerait au monde arabo-musulman ses origines spirituelles, si j'ai bien compris, position qui n'est pas la mienne. J'ai lu il y a longtemps un article où Elias Sanbar rappelait une parole prophétique de son père, en 1948 : " La nakba sera une arête dans la gorge du monde."
Je n'ai pas de problème avec l'état d'Israël en ce sens que j'admets que les juifs aient un état, et qu'il me paraît difficile, maintenant, de "rejeter les israéliens à la mer", comme le craint Alain Finkielkraut, ou de leur trouver un état ailleurs. Ailleurs, mais où? Comme Serge Rivron, je crois que le destin de l'homme est terrestre et je ne vois pas les Israéliens coloniser une improbable planète en dehors d'un roman de Dantec. Et où, ailleurs, sur terre? En Patagonie? C'est trop tard, maintenant qu'il est là.
J'ai un problème avec l'idéologie sioniste de Theodor Herzl qui sécularise le judaïsme. Steiner s'est dédit, nous précise Juan, sous la pression d'un rappel à la dure réalité des attentats terroristes, sa vision du destin juif était pourtant intéressante: destin dans la diaspora, pour moi, plutôt que dans l'errance. Dans la diaspora, notamment en Europe centrale, ils ont été un ferment intellectuel, artistique, autant, sinon plus qu'une écharde (Prague, au temps de Kafka, ce n'était pas rien!)
L'idéologie sioniste a effacé la dimension spirituelle de la terre promise. Dans la diaspora, la "terre" des juifs, leur lieu d'habitation, c'était le Livre. Ils habitaient leur Livre et leur Livre habitait le monde.
Je n'ignore pas dans quel contexte colonial est né l'état d'Israël, que 50 000 colons juifs arrivent dès 1914, fuyant les pogroms russes, le jeu des puissances occidentales à la chute de l'empire ottoman, que dès 1891, l'écrivain russe Ehad Ha'am, chef de file du sionisme spirituel, opposé au sionisme politique de Herzl, exprime sa crainte des effets de ce dernier, ni que Balfour, ministre britannique des affaires étrangères en 1917, négocie secrètement avec le mouvement sioniste, promet l'état d'Israël à seule fin de s'en faire un allié pour servir les intérêts britanniques au Proche-Orient.Le colonialisme et l'antisémitisme européens ont inscrit l'histoire d'Israël dans ce processus d'une volonté de puissance qui vise la maîtrise de "l'entièreté de l'étant" ( je cite Heidegger en boucle, disent certains imbéciles, je n'y peux rien si ses formulations sont si justes!)
Donc, la surpuissance militaire et la politique d'Israël depuis 1948 m'indignent autant que vous. J'habite en France mais j'étais en Syrie en avril 2002, lors de l'attaque israélienne contre Jenine --- le massacre, selon certains que j'aurais tendance à croire ---- et je n'oublie pas les hélicoptères militaires dans le ciel syrien, l'énervement sensible de la population et surtout, mes conversations avec un ami syrien chrétien qui exprimait avec désespoir son sentiment d'impuissance, y compris par rapport à son gouvernement.
Oui, la politique israélienne est indigne de la Parole: même la loi du talion ne justifie pas le mur de la honte soit-disant antiterroriste car elle présuppose l'égalité de forces entre ennemis, ce qui n'est pas le cas.
Oui, l'état d'Israël est paradoxalement une nouvelle Babylone quand il pompe les nappes phréatiques palestinniennes pour irriguer ses champs et construire les piscines des bourgeois israéliens. L'ONG "Vétérinaires sans frontières" qui œuvre discrètement depuis des décennies en Palestine le sait et reste impuissante à sortir du marasme l'agriculture palestinienne.
Mais pour revenir au texte de Juan, je m'inquiète aussi du compost idéologique qui occupe la tête des adolescents français, de cette parole décomposée qui les pousse à la violence dans les manifestations de soutien aux palestiniens, je m'inquiète du délire de Dieudonné, je m'inquiète même de cette mode du keffieh fabriqué en série on ne sait où que portent des adolescents qui ne savent situer sur une carte ni Israël ni la Palestine et confondent l'Iran et l'Irak.
Néanmoins, j'espère. Quand vous dites, cher Francis, que nous n'aurons la paix sur terre que lorsque l'état d'Israël sera ailleurs, excusez-moi, il me semble que ce propos reste nihiliste. J'entends dans ce propos que JAMAIS les Israéliens et les Palestiniens ne pourront s'entendre, que JAMAIS, deux états pourront cohabiter. Juan m'a dit un jour : " Dire JAMAIS est un péché contre l'Espérance". Leçon péguyenne: la petite sœur Espérance PRECEDE la Foi et la Charité.
Amitiés à vous, à Samuel Gourio, à Pascal Adam dont les fines et justes remarques sur l'énonciation ( et l'image shakespearienne du spectre Fofana) apportent un éclairage intéressant au beau texte de Juan, et amitiés à tous.
Écrit par : Elisabeth Bart | 11/05/2009
Chère Elisabeth Barth
Je voulais m'en tenir là, estimant avoir assez contribué à cette série sous ce beau texte de Juan - un de ses meilleurs commentaires récents de l'actualité française avec celui admirable sur la Malfrance, la vraie qui, je le lui ai immédiatement écrit, exprime souvent mot pour mot ce que j'ai pensé en mon for intérieur en visionnant cette remarquable vidéo de surveillance qu'il fallait mettre en ligne - le policier qui l'a fait doit être récompensé et félicité, loin d'être sanctionné ! - et en lisant l'entretien accordé par sa victime au Figaro - dont l'écho me comble d'aise.
Je dois vous remercier de votre réponse qui est très remarquable : c'est un devoir bien agréable pour moi de reprendre le clavier car son niveau le mérite absolument.
Merci donc - au lieu de s'excuser en permanence comme certains croient utiles de le faire, nous préférons nous remercier et je trouve cet usage plus honorable et tout aussi bénéfique spirituellement ! - pour ce commentaire de votre antérieure "petite" phrase : il très "bien construit" (comme dirait l'autre !), bien informé et très utile à lire pour celui qui serait novice en la matière, et sur le fond très sympathique car on ne peut que trouver sympathique votre critique lucide d'Israël, votre bel amour de l'humanité et votre désir de voir mettre un terme aux guerres et aux conflits.
Nos positions sont donc, en effet, plus proches que je ne l'imaginais, vous avez raison, mais - faut-il le préciser à ceux qui m'ont déjà lu ici et là ? - elles ne sont pourtant pas identiques.
Car je ne sais pas, du moins ne suis pas convaincu qu'un livre et une religion pouvaient tenir lieu d'Etat pour sauvegarder la vie d'un peuple et l'unifier. Le sionisme - défini comme simple désir juif d'avoir un Etat réel le protégeant, indépendamment de son emplacement - ne me semble donc, en son fond, nullement illégitime d'un simple point de vue logique et pratique, politique donc, même si ses conséquences actuelles sont désastreuses pour les intéressés. L'erreur, la faute, est ce que j'ai dit et on peut encore la réparer.
Il suffit que le gouvernement israëlien annonce qu'il va déménager son peuple sur un nouveau territoire et qu'il souhaite en acheter un plutôt que de vouloir le conquérir sur ses occupants antérieurs.
Qu'il passe une petite annonce à l'ONU lors de la prochaine réunion à laquelle il participera : "nous déménageons et souhaitons acheter une portion de terre ou une île ou un groupe d'îles permettant d'installer notre population estimée à tant d'habitants"
La messe sera dite et la guerre terminée !
Je suis certain que des Etats comme l'Inde, qui vend en ce moment un certain nombre d'îles de la mer Andaman, pourrait donner une suite favorable à une telle annonce. Il y a encore bien des portions de la Terre qui sont inhabitées, hospitalières, voire bien plus hospitalières qu'un désert comme celui de la Vallée des rois. Il y a des peuples qui ont une Terre mais pas encore d'Etat, il y en a d'autres qui ont un Etat mais pas de Terre ou très peu : ce qui est réel surpasse aisément ce qui est possible.
Enfin bref, laissons-là cette question qui pourrait être la matière à l'ouverture ou à la création d'une section à part entière que Juan pourrait intituler de plusieurs manières. Il pourrait y regrouper ses textes relatifs à cette question ou proches d'elle, voire même y regrouper certains des nôtres. Juan a d'ailleurs raison : ma position fut exprimée ici-même le 09/02/2005 sous le titre "Les Romains se croyaient élus" qui était écrit contre un texte de Sarah Vajda, puis reprise le 12/09/2006 dans mon "Sur des illusions perdues... et sur des illusions à entretenir !"
Cela me fait souvenir d'une anecdote amusante : le directeur de la collection "Figures du savoir" aux Belles-lettres - éditeur libéral des C.U.F., des Etudes antiques série grecque et série romaine, de la collection Shakespeare, et de bien d'autres choses encore (vous pourrez bientôt lire une chronique écrite et envoyée il y a quelques mois déjà relative à PLATON ET LA CITE GRECQUE, thèse de doctorat rééditée et intéressante d'un savant belge sur LES LOIS) - s'était étonné, lors de notre première - et dernière, inutile de le préciser ! -conversation, du fait que (je le cite de mémoire car ladite conversation date d'une année environ) les intellectuels français osassent prendre position sur ce conflit qui ne les concernait nullement. Je lui avais répondu qu'il était dans la tradition française qu'un intellectuel prisse position et s'intéressât, en règle générale, à ce qui se passait dans le monde : cela nous semble aller de soi, mais cela ne vas pas de soi pour tout le monde, apparemment...
Un site comme celui de Juan est au demeurant, comme vous le savez chère Elisabeth, la preuve éclatante de la vitalité intellectuelle française et de sa vocation à l'universalité : l'intellectuel français est par vocation un intellectuel catholique, au sens étymologique du terme et il est naturel, et sain, qu'il veuille penser le monde et prendre ensuite position morale et politique sur lui.
Un Thailandais assez âgé me disait récemment : "Vous autres Français voulez toujours gouverner le monde". Fatigué, je n'ai pas répondu. Nous avons ensuite discuté du fait que les bons du Trésor américain ne trouveraient plus preneurs et que le dollar américain allait probablement s'écouler face à l'Euro. Je milite d'ailleurs activement en faveur de l'adoption d'un Euro-or, capable de nous débarrasser de l'emprise du dollar américain, désormais injustifiée et qui a fait son temps. Laissons le dollar américain régenter les échanges intra-américains, mais pas davantage !
Et puis le soir, en y repensant, j'ai réfléchi à ce que j'aurais pu lui répondre. J'aurais pu lui répondre par un simple jugement de fait, à défaut d'un jugement de droit logique : "Vous faites erreur : nous le gouvernons déjà, de facto, dans la mesure où nous occupons un siège au Conseil de Sécurité de l'O.N.U" c'est-à-dire que nous pesons d'une manière sérieuse sur la paix et la guerre du monde.
Mais surtout, j'aurais dû lui répondre plus longuement que nous pesons spirituellement encore bien davantage : bien des étrangers sont amoureux de la France non pas telle qu'elle est - le cadavre disséqué et critiqué par Juan les décevrait bien rapidement par certains de ses aspects peu reluisants, même si, Dieu merci, les membres sont encore rattachés à la tête par un solide squelette - mais telle qu'il la pense eux-mêmes, telle qu'il la rêve, telle qu'il la désire ou l'idéalise. Ils sont amoureux d'une idée de la France et c'est cette idée que nous devons maintenir, face et contre les autres idées qui voudraient la remplacer ou l'annihiler.
On connaît le mot de Bichat, "La vie, c'est l'ensemble des forces qui luttent contre la mort". Entendons-le de la nation française, comme l'avait fait Renan et bien d'autres mais surtout de la pensée française : "La vie intellectuelle française, c'est l'ensemble des Français qui luttent contre la mort de la France, et contre la terrible possibilité que l'idée de la France soit un jour identique à sa réalité".
PS pour Hélène : tout comme Juan plus haut dans cette série, c'est à mon tour de ne rien comprendre à votre comparaison entre Tertullien et... moi-même. Ni sur son fond, ni sur sa forme : compliment ou critique ? J'avoue en outre que l'extrait cité - mais pas cité suivant les règles de l'art bibliographique puisqu'il n'indique ni l'oeuvre, ni l'édition - ne m'éclaire pas davantage...
Écrit par : francis moury | 12/05/2009
Corrigenda à mon (ultime) commentaire précédent:
"... Il [est] très bien construit..."
"... que le dollar américain allait probablement s'éc[r]ouler..."
"... mais telle qu'il[s] la pense[nt] eux-mêmes, telle qu'ils la rêvent, telle qu'ils la désirent ou l'idéalisent..."
Écrit par : francis moury | 12/05/2009
Bonjour,
Je voudrais réagir au dernier commentaire d'Elisabeth Bart.
Propos très juste, singulièrement juste. Cette idée, connue par ailleurs, que le sionisme, et la présence de juifs sur cette terre aujourd'hui, sécularisent le judaïsme. Qu'elle est 'une infidélité' à la Parole. Ne parlons pas d'indignité. J'ignore si vous êtes juive, Madame, qu'importe. La Parole juive n'appartient pas aux juifs, exclusivement. Disons qu'ils ont appris à se méfier du regard de l'Autre, au cours de l'Histoire. Disons qu'ils en ont nourri, parfois, aussi, une forme d'aliénation de la méfiance.
J'ai, pour ma part, 'activement' vécu dans les quartiers ultra-orthodoxes d'Israël et de France (et mon discours n'est pas pour autant plus valable que le vôtre), et peux témoigner d'une chose: cette idée, la vôtre, par ailleurs connue, y est présente. Bien sûr. Dans ces quartiers où réside quelque chose d'une quintessence du judaïsme (j'allais dire une pureté, mais n'ose pas) cette présence est à la fois légitime (parce qu'historiquement, quand même, une part de cette terre est juive, liée au juifs, à leurs rêves séculaires, millénaires, à leurs aspirations les plus profondes ; je dis une part (mais laquelle, tout est là...), ne nous querellons pas ici...), et illégitime (parce que le retour des juifs se fera, sur cette terre, aux temps du Messie (je rapporte la Parole, la leur, qui fut la mienne, un jour)). Grand danger que cette sécularisation, dans ces milieux. Grande menace, pour la Parole même. Immense contradiction. Disons épreuve, encore, dans cette illusion du retour que représente l'Etat d'Israël, après celle, longue et douloureuse, de la dispersion parmi les peuples. Voilà. Les religieux, vous l'aurez compris, ne sont pas les plus farouches ennemis de la paix (mais laquelle...). Souvent, ils ne portent pas les armes, et vivent enfermés, dans une frontière à l'intérieur des frontières. Israël est ainsi un pays très morcelé, infiniment complexe...
Mais il se trouve qu'il faut, cependant, composer avec certaines réalités non transcendantes, physiques, concrètes, terrestres, humaines, territoriales, sécuritaires... C'est cela, la politique, et la nation. Et il me semble que la politique israélienne (mais mon regard est-il objectif? Non, mais pas moins que le vôtre, finalement) est maladroite, désordonnée, illisible, une politique de la peur et de la menace, mais 'mesurée'. J'assume ce mot. Mesurée. Et confrontée à une haine, une folie, une béance, elles, sans mesure.
Vous êtes dans la mesure. Merci
Écrit par : lataupe | 12/05/2009
Sacater, j'applaudis votre tour de force rhétorique. J'aime...
Histoire de se protéger des fades linguistiques et de la prolifération anarchisante de greffes inutiles que charrient en choeur l'hypertexte, la pub, les journalistes, la langue française, si vous le permettez, mon cher Secater, doit évoluer très lentement. D'un mot, il faut être humble devant la syntaxe française et non « tordre » cet héritage millénaire doublé d'un destin idéel où, des Québécois aux Français, l'on serait tous jeté. Pièce à verser à la « pensée thétique » dont Renaud Camus s'est fait l'héraut dans « Syntaxe ou l'autre dans la langue », l'un des livres de chevet de notre cher Juan.
À trois reprises, j'ai dû lire « Le voyage au bout de la nuit » du grand Destouches rien que pour en épuiser le très laid et bel et bien pédant argot parisien. Je répugne à attribuer à Céline, pour descendant direct soit-il de Rabelais, la même valeur que l'on eût reconnue à ce dernier.
Et puis Paris, c'est si américanisé le Nord Américain que je suis s'y voit pris d'une nausée à l'aspect des banlieusards en tant qu'ils s'affublent en rappeurs américains. Fofana est de ces Américains en miniature. Comme si les Américains se réjouiraient devant la très inassouvissante « mêmeté » de cet Occident « nouveau-riche »! (Je suis citoyen américain.) Au contraire. Quant au verlan, la pauvreté intellectuelle dont il procède ne laisse présager absolument rien de génial. Un peu comme Jésus le fit à saint Pierre, la grande France ne parvient plus à « baiser les pieds » de ses nains, de ses néo-Français et faillit donc à faire de tout l'Hexagone un corps un et indivisible. Vu de mon point de vue nord-américain, l'élection de Sarkozy apparaît, à ce compte, comme encore une autre américanisation suiviste d'une France cocufiée ou bâtarde, tellement ce Sarkozy - avec ses idées simili-américaines, son vocabulaire à 100 mots, son goût kitschissime - n'apparaît guère « français ».
Écrit par : Pascal d'Ottawa | 13/05/2009
Salut.
Si l’on souhaitait -comme me souffle-t-on c’est écrit-, la réunion des descendants des fils d’Agar et de Sara, j’ai du mal à voir en quoi le choix du territoire en question serait une faute.
Neve Shalom/Wahat al-Salam est sans nul doute un exemple d’unité disons plus pacifique que tout à fait paisible, mitoyen qu’est ce village au conflit, dont un premier mariage mixte, que je qualifierai d’enfin exogame est une preuve tangible.
Acheter plutôt que conquérir sur des occupants antérieurs ? Des occupants antérieurs ? L’Egypte et la Jordanie ?
Acheter plutôt que conquérir ? La sentence place le discours.
Le fait est que la tradition française ne s’interdit nullement de prendre position, une position éthique, c’est même ce qu’on lui demande encore, à la France… au regard de l’histoire qui fut la sienne, douée d’universalisme.
On peut tout de même interroger la légitimité des français à prendre partie. Car voilà ce dont on nous somme régulièrement : de prendre partie pour un camp et contre l’autre. Ce « on » qui n’a de cesse de critiquer la pensée binaire, hurlant de toute sa Bush comme une harpie de boulevard du Droit, nous intime le devoir de dénoncer avec partialité… voire, dans le pire des cas, de rendre justice… on y est. C’est fofanesque.
Etrange proposition, onusi, comme dirait MGD, que celle de demander à Israël de faire ses bagages ! L’Inde ? Pourquoi pas tout de suite demander à Saint Barak de leur concéder le Liberia ? L’or des juifs paiera, ou le dollar newyorkais ?
Une section à part… c’est formidable…
Que ne fais-je pas dire aux mots ! On dira que je pédale. Il ne faut rien entendre. Le jugement est hâtif, vous ne faisiez que dire : « Qu’on leur vende un récif ! »
Je vois le tableau. Guidé par l’âne atoll Antoine, improbable moïse à double foyer, tout un peuple dans une arche, c’est Noël.
Écrit par : Sacater | 13/05/2009
Finalement, vous ne me comprenez pas parce que vous vous méprenez sur la rationalité de mes propos. Pourtant je peux en expliciter le fil conducteur : J'ai évoqué Tertullien, que j'ai lu sur la toile (il suffit de connaître le titre du texte... donc..., c'est Du Jeûne ou Contre les Psychiques...), pour étayer l'idée selon laquelle il existerait une lecture de l'héritage religieux fondé sur la pratique du sacrifice, ici c'est le jeûne, donc le sacrifice de la nourriture. Je l'ai évoqué aussi parce qu'il n'est pas question pour moi d'expliquer la religion par la sociologie ou autre ... Sinon, on pourrait aussi expliquer la littérature par les mathématiques ? Il répond donc à l'objection qui serait celle de montrer que les sacrifices ont toujours eu cours, par l'idée de la contrefaçon des rites véridiques dans certaines croyances. Contrefaçon maligne que j'ai appelé imitation.
J'ai cité l'extrait parce qu'il montre bien que la seule constante dans le problème c'est que tous, s'adonnant aux rites contrefaits ou pas, ont un corps humain et que partant il ne faut pas s'étonner que les mêmes causes engendrent les mêmes effets. D'autre part, j'ai écrit plus haut que cet odieux assassin ne goûterait pas du fruit de sa langue maudite parce que je considère que bien entendu une langue maudite ne donne aucun fruit, en ce monde. Et je voulais aussi dire par là que moi aussi, je veux savoir que je me trouve dans cet état de jeûne et même que je veux vivre après la mort d'un supplicié, jusqu'à confondre la contrefaçon.
Seulement, j'ai voulu dire aussi un mot des théologiens parce que je ne peux me résoudre à l'évocation des versets, comme ce fut le cas dans la discussion, pour cela. Parce que je suppose, comme Wittgenstein le supposait aussi je crois, que la langue que parlait tous ces pères de la pensée est morte, je ne veux donc pas imaginer qu'une parole bien vivante n'en passe par ces structures. Je suppose même que la noblesse de tous les peuples est dans ce mouvement qui refuse le matérialisme pour lequel il n'y a que des corps et de la vie sans que la jonction des deux ne pose d'autre problème que celui de survivre à n'importe quel prix.
Bref, je finirai en disant que la mémoire est un vrai problème pour moi et que c'est pour ça que quand je dis qu'on me rappelle quelque chose ce n'est pas une affaire de personne mais comme le récit d'une remontée de la conscience.
Merci quand même pour vos conseils de lecture ...
Écrit par : hélène | 13/05/2009
La Taupe.
Vous donnez des raisons d'espérer ( quoique la vertu d'Espérance doive être sans raisons, justement) si cette quintessence du judaïsme est présente en France et en Israël.
La sécularisation, "immense contradiction", "épreuve", oui, celle de l'absence de Dieu dans un monde nihiliste, plus que jamais le deus absconditus de Pascal.
Je ne suis pas d'accord avec l'opposition par trop manichéenne entre la politique d'Israël qui serait mesurée et la folie en face, mais laissons cela, qui fait partie de l'épreuve, justement...
Je ne suis pas juive mais catholique romaine et, en tant que telle, JUDEO- chrétienne. J'aime mes racines juives, je voudrais leur être fidèle. Sans ces racines, pas de christianisme.
Francis, merci de votre commentaire qui ne m'a pas convaincue bien que vous ayez peut-être raison.
Il nous faut lire "Témoins du futur" de Bouretz, si ce n'est déjà fait, la note de Juan ci-dessus nous y invite, en parfaite cohérence, comme toujours, avec ce texte et cette passionnante discussion.
Écrit par : Elisabeth Bart | 13/05/2009
Cher Pascal d’Ottawa,
Je vous remercie d’avoir bien voulu goûter la forme de ce premier jet sans vous heurtez du ton ou de sa direction. J’en doutais à peine, réunis ici que nous sommes, en bonne compagnie ; nous ne sommes pas sur Egoravox… mais, sur la Toile, voyez, on ne sait jamais.
Vous n’êtes pas insensible à l’ironie ni à sa pratique, je vois ; je vous remercie donc encore une fois… de votre réponse, qui d’une altérité bienveillante va droit à mes zygomatiques.
Pour rebondir, je vous dirai honnêtement que je préfère à l’humilité la simplicité, celle-là devant être la conséquence de celle-ci, si cela se peut, histoire de préserver par devers soi, contre les formes d’arrogances contemporaines que vous évoquez iniques, un certain quant-à-soi, si possible critique.
-Donc je vais faire simple, ou essayer. Vous me pardonnez le peu de nuance éventuel. D’accord avec le constat, pas avec le propos. L’intertexte contre l’hypertexte. Métaphoriquement une sorte d’anthropophagie textuelle quasi christique contre l’empathie lyrique de la romance quotidienne, du vaudeville contemporain. Une polarisation de la syntaxe, peut-être rotatoire… dans cette optique…
-Raté. Disons apprendre de l’excellence comme du vulgaire.
Le verlan c’était, de longue date, la langue des apaches, un je social autant qu’un jeu verbal, au même titre que la javanais par exemple, moins que la contrepèterie que je qualifierai vulgairement de mentale.
Dans un autre genre l’écriture texto n’est autre qu’un mince succédané du Surréalisme… tout de même.
Contre l’anorexie syntaxique et le cannibalisme langagier de cette époque qui verbalise à corps et à travers, sans doute à tort, à cri c’est certain aussi, seul l’Anibal lecteur -ou peut-être aussi le Wendigo phraseur, est de taille à mener la lutte. Attendu que le problème de la posthistoire ou de la « période anhistorique », me semble être qu’elle ne va pas même à rebours.
Il faut avaler la pilule, à dose infinitésimale, plutôt que se faire vacciner, aller au rabe laid, dévorer le festin cru, puis régurgiter, pour tordre (si l’extrapolation est encore permise) ce qui tortille et le faire apparaître dans sa nudité infernale.
P.S. J’ai pu entendre qu’une personne de grande taille à handicap moteur léger, fan des indiens moins qu’amer, a produit quelques allitérations digne d’un Boby Lapointe. Au milieu de la misère intellectuelle, des procès râpeux et procédés râpés, le Slam, rapé ou non, n’est, je crois, pas à ignorer totalement.
Jérôme de La Rochelle
Écrit par : Sacater | 13/05/2009
@ Sacater
Voici mon adresse courriel: tintin613@gmail.com
Écrivez-moi.
Écrit par : Pascal | 15/05/2009
Elisabeth, je me réjouis de vos propos sur la nécessité de rester fidèles à nos racines juives lorsqu'on est chrétiens. J'aimerais que davantage de mes coreligionnaires (je suis également catholique romain) aient conscience de cela.
Écrit par : Stéphane Normand | 17/05/2009
Merci, Stéphane , et excusez moi d'avoir écorché votre patronyme dans un de mes commentaires ci-dessus, où j'espère que vous vous êtes reconnu, néanmoins.
Écrit par : Elisabeth Bart | 17/05/2009
Très belle, très forte, mon cher Juan, cette "confession" post - "dostoïevskienne", même si bien trop romantique pour moi. En prenant Fofana trop au sérieux, tu en fais une incarnation un peu idéale du mal à l'état pur (et du mal français, ce qui est une autre histoire), tu en fais un nihiliste exterminateur qui comme tel ne peut qu'avoir un panache satanique - et j'aurais bien peur qu'il ne soit ravi de ton texte s'il tombait dessus. Alors que Fofana, comme le Stavroguine des Démons, est avant tout un bouffon sinistre, un barbare grotesque qui prend très au sérieux son acte, qui en fait un destin, un trou noir - et finalement toi et tes commentateurs font de même. Vous essentialisez ce crime abominable, y trouvant toutes les raisons du monde pour prouver le déclin de la France, la mort de Dieu, le triomphe du néant sur le Verbe, un Auschwitz à une personne, etc, et ce faisant vous faites de Fofana une Bête d'Apocalypse, tombant ainsi dans son piège, car c'est exactement ce qu'il veut. Vous essentialisez et vous romantisez à mort, et c'est là que ce texte me pose problème. Dostoïevski avait bien vu l'aspect risible de l'horreur. Car oui, comme le dit Tikhone à Stavroguine, sa "confession" risque de provoquer autant la haine de ses victimes que leur rire... Quoi de plus ridicule que cette seconde naissance dans laquelle Fofana croit "ressusciter" ? "Je suis né le jour de mon meurtre et je vous emmerde tous, ha ha ha ha ha ha !" Quoi de plus grotesque que cette arrogance d'assassin en manque de reconnaissance ? La pire chose qu'on peut faire à Fofana, c'est de se moquer de ses prétentions d'antéchrist. La pire chose qu'il a fait, ce n'est pas tant son crime abject, c'est qu'on le prenne au sérieux, au "métaphysique", à l' "onto-théologique". En fait, Juan, ce que tu fais avec YF, et cela malgré le lyrisme indéniable de ton texte, est que tu le gonfles de sens, alors qu'à mon avis, il aurait fallu plutôt le dégonfler.
Mais relisons un moment la page canonique des Démons. Tikhone vient de lire le manuscrit infâme de Stavroguine (dans lequel celui-ci "se vante" d'avoir violé une fillette puis de l'avoir laissé se suicider de désespoir) :
"- C'est parce que j'ai peur pour vous, ajouta [Tikhone]. Vous avez devant vous un gouffre presque infranchissable.
- Peur que je ne tienne pas ? que je ne supporte pas leur haine avec humilité ?
- Et pas seulement leur haine.
- Quoi d'autre encore ?
- Leur rire, laissa échapper Tikhone, en se forçant, dans un demi-chuchotement.
Stavroguine se troubla ; de l'inquiétude s'exprima sur son visage.
- C'est une chose que je pressentais, dit-il. Donc, je vous ai paru un personnage très comique, une fois que vous avez lu mon "document", malgré toute la tragédie ? Ne vous en faites pas, ne soyez pas gêné... je le pressentais moi-même, n'est-ce pas.
- L'horreur sera générale, et bien sûre, elle sera plus fausse que sincère. Les gens ne sont peureux que devant ce qui menace directement leurs propres intérêts. Je ne parle pas des âmes pures : celles-là seront horrifiées et s'accuseront elles-mêmes, mais nul ne les remarquera. Le rire, lui, sera général."
Bien à toi.
Écrit par : montalte | 21/05/2009
Très bonne critique, Montalte.
Tu as raison, je n'ai probablement pas suffisamment insisté sur le côté comique de YF même si, relisant mon texte, les éléments grotesques sont présents.
Or, c'est cela la barbarie de notre âge, et probablement celle de tous les âges : horreur, grotesque et rires mélangés...
Je ne suis pas d'accord, en revanche, lorsque tu me parles d'essentialisation du Mal : non, car la logique du démon est toujours, in fine, de priver l'assassin de son soutien. Le diable est l'ami qui ne reste jamais jusqu'à la fin comme l'a écrit Bernanos dans Monsieur Ouine je crois.
Je suis tellement peu d'accord avec toi que je poursuis, te faisant remarquer une chose : tu n'as pas vu que je faisais de YF un rien-du-tout, un pauvre type, un crétin vicieux dont ce qui lui sert de cervelle est gonflée de mots creux.
En somme, une incarnation au rabais, grotesque et labile, uniquement sustentée par des mots qui n'en sont plus.
Privons ces mots de leur apparence de vitalité et YF est ses petits clones ne seront plus rien que des baudruches.
Seulement, cette tâche est autrement plus compliquée (et même urgente) que de coffrer les ordures fofaniennes...
Amitiés.
Écrit par : Stalker | 21/05/2009
Tout de même, tu lui fais citer Conrad à ton pauvre type de rien du tout ! A peine s'il ne connaît pas la Bible et Shakespeare par coeur ! Par ailleurs, on a quand même l'impression, le lisant, j'allais dire, l'écoutant (car c'est en effet un texte oral), qu'il est très conscient de ce qu'il a fait contre la France, contre le monde, contre le Logos, bref, qu'il a tout à fait saisi le sens de son destin d'ange du diable...
C'est un art très difficile que de dire la parole d'un fou, d'un crétin, ou d'un criminel. Je le sais, j'en ai fait moi-même quelques tentatives. Et Philippe Muray l'avait tenté en son temps avec ses "chers djihadistes". Et rencontrant d'ailleurs ces mêmes problèmes de locuteur.
Écrit par : montalte | 21/05/2009
Montalte, vois-tu, le fait que YF soit un très probable crétin congénital n'enlève absolument rien à sa ruse et à sa capacité de faire le mal !
N'as-tu jamais rencontré de ces très jeunes enfants ou bien de ces vieillards qui paraissaient intelligents uniquement par le fait de leur malice, au sens premier du mot ?
YF est probablement un imbécile si j'en juge par ses réactions mais il a une réelle volonté de blesser.
Autre chose : j'ai moins essayé de faire parler YF que d'écouter la petite musique qui trottait dans son cerveau, remplie de mots de Shakespeare et même de la Bible.
Voyons, ce n'est tout de même pas à toi que je dois rappeler cette idée de Chesterton selon laquelle le monde moderne est rempli de vieilles idées chrétiennes devenues folles : c'est un peu ce qu'il se passe avec les déclarations de ces meurtriers. A une certaine profondeur, on aura vite fait de retrouver les grands mots racines qui sont à l'origine de tous les autres, et ces mots mon vieux, YF a une oreille pour les entendre.
Enfin, je veux bien que tu sois un adepte de la traduction de Dostoïevski par Markovicz mais s'il n'y avait que de la drôlerie et du grotesque chez lui, cela ce saurait, non ?
Etrange que personne n'ai remarqué que le titre de mon texte en calquait un autre, en lien...
Écrit par : Stalker | 21/05/2009
Et qui fait d'ailleurs lui-même allusion à "Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, mon frère et ma soeur".
Sur la drôlerie de Dostoïevski, d'ailleurs présente aussi dans les traductions de Pierre Pascal, je fais surtout allusion aux analyses girardiennes de Mensonge romantique et vérité romanesque. "Nous ne savons plus rire de l'homme du sous-sol", dit Girard, etc, etc.
Écrit par : montalte | 21/05/2009
Exact !
Je sais à quoi tu fais allusion, mon cher mais moi, l'histoire pitoyable de l'homme du sous-sol m'a plutôt ému jusqu'aux larmes la première fois que je l'ai lu, pas encore ado...
Écrit par : Stalker | 21/05/2009
Mais moi aussi, que crois-tu ? Et c'est un livre que je connaissais pas coeur à l'époque, que j'adorais, et que j'adore encore, même si en effet, j'ai appris à le lire autrement. Comme j'ai appris à me déromantiser (il peut y avoir des rechutes) - la lecture de Dostoïevski en étant du reste encore plus grande.
Écrit par : montalte | 22/05/2009
Alors nous en sommes au même stade, éthique sans doute : j'ai écrit plusieurs textes sur la transformation de la figure du diable dans la littérature française, passant (pour faire vite) du romantisme à un fractionnement de son "identité"...
Ah oui, je suis désolé mais ce n'est pas Girard, ni un autre, qui m'ont appris à lire...
Écrit par : Stalker | 22/05/2009
Cher Godwineur,
« Vous essentialisez ce crime abominable, y trouvant toutes les raisons du monde pour prouver le déclin de la France, la mort de Dieu, le triomphe du néant sur le Verbe, un Auschwitz à une personne, » dites-vous.
Est-il encore besoin de le prouver ? L’apostiller c’est le minimum.
Traduire les symptômes, les passer par quelque prisme que ce soit, chacun selon son registre, comme pour isoler le viral, qu’aurait-ce à faire avec la nature de ce cave des caves ?
Lui prêter des lectures dont il ne fait aucun doute qu’elles lui font défaut est en l’espèce un démenti. C’est l’acte qui est décortiqué. Pas la personne ou ce que l’on en pense.
C’est bien pour ça qu’il ne saurait être question non plus de disculper. Symptômes et symboles ne sont pas des raisons ou des circonstances, atténuantes ou aggravantes.
Par contre lorsque MGD, par exemple, fait de Fofana une « chose », il a beau y coller un trou pour en faire une « chose-trou »… c’est un contresens assez obscène. Chosifier c’est précisément fofanesque. Car c’est Ilan Halimi qui l’a subie, la chosification, qui s’est fait traité de la sorte. Il n’est pas devenu savon ou oreiller mais un cendrier (nous dit on), comme dans une blague nauséabonde de cour de récréation.
Du coup, l’antiphrase, botte du bretteur Dantec, ne passe plus, elle coince, se fait répétitivement puérile, reléguée très vite au rang des insultes qui suivent dans le texte.
(Il y a plus de pudeur à penser que nous sommes des romains en attente de nos barbares. Ah ! Ben tiens ! Y sont là, dans nos murs !)
Ceci dit MGD a comprit une chose importante et il n’est pas le seul, c’est que cette ultime blessure narcissique faite à l’humanité que fut la Shoah est l’événement historique constitutif de notre contemporain.
Ce n’est pas « le devenir-monde de la marchandise qui est aussi bien le devenir-marchandise du monde »,c’est le devenu-marchandise de l’humain qui présuppose le Spectacle Mercantile.
…
Les associations de termes issus du lexique biologique à ceux du technique dans la LTI, que décrit Klemperer, sont les prémices de cette infernale industrie. C’est parce que le Verbe, avec ou sans majuscule, engendre le monde que cette novlangue fit de même. Le LTI n’est pas un dialecte, comme chaque langue qui a politiquement réussi, c’est une construction purement intellectuelle qui n’a pas d’âge. Une construction qui s’est établie contre le peuple élu, pas contre quelques juifs allemands, mais contre l’élection de la Parole, contre « son peuple », tout un peuple, contre une civilisation dont nous sommes issus, étant donnée la judéité du Christ.
Voilà des crimes dont on dit qu’ils laissent sans voix et c’est sur le décès de la parole, sur l’impossibilité de dire des rescapés, sur cet indicible, que les idées distillées par la LTI se sont répandues, comme une plaie sur le monde. L’éternité de la langue du IIIe Reich était dès lors acquise. Ses lourds « commandements » n’ont pas été dictés ou gravés, ils se sont –ils ont été insinués dans les esprits.
D’ailleurs, comme pour combler ce vide, le contemporain n’a de cesse de verbaliser ; c’est à entendre, avec Muray, dans la double acception du terme. Ce besoin quotidien de « redonner du sens », l’exprime tout autant.
Il n’y aura plus de Pierre Rivière parce qu’il n’y a plus d’aspiration ; la consommation l’a remplacée. Rivière tue puis écrit pour s’extirper de sa condition. Fofana n’a pas de mots à mettre sur son crime, juste des slogans ; le meurtre est son curriculum, il n’a aucune envie de dépasser sa condition.
S’il est un trou, sa béance est celle du consommateur advenue; un gouffre à maux, un « trou noir » effectivement, sans aucun doute. Je suppose que c’est ce que Dantec aurait pu écrire si quelques complaisances stylistiques hâtives ne l’avaient empêché de tourner sept fois la plume dans l’encrier.
Écrit par : Sacater | 22/05/2009
Vous excuserez la longueur de ce post, Juan l'effacera s'il le désire. Il ne me parait pas, loin s'en faut, hors sujet.
"
(...)
— de mes grands parents morts, leur bénédiction, que personne n'a jamais entendu, elle est le tombeau, le lieu de leur corps affectif.
Elle a grandi, cette bénédiction morte, démesurément comme un souffle perdu de ne pas passer par les fourches caudines de l'articulation de la gorge.
Echappée des temps chronologiques, elle constitue notre lien, intime, familial, personnel, avec ce que vous nommez l'holocauste, la shoah.
Elle emporte des saveurs aussi mélangées que celles du vent, des émotions, pour toute la vie ambiguës, que déposent les souvenirs d'enfance, qu'on en vient à aimer simplement parce que, associés aux commencements, à elles se mêlent la vivacité optimiste des printemps.
S'il faut témoigner de ce non témoignage que nous avons reçu,
ce n'est pour obéir à une injonction morale, par fidélité morbide,
ni pour rendre culte à la mémoire des anciens.
Mais pour contenir les eaux amorphes tumultueuses de la passion
dans les digues d'une raison,
sous peine qu'elles n'emportent tout, qu'on finisse sans avoir commencé,
broyé disloqué sans fleurir dans le déluge d'un châtiment annoncé.
Maboul dans la fusion des eaux élémentales,
submergé dans la piscine primordiale.
C'est là que nous sommes nés, tous, fils et filles de la troisième génération
seulement séparés les uns des autres par le fil de l'image: la représentation. Est-ce cela que les anciens nommaient idole ?
Que le monde en soit au troisième temps,
ceux qui le savent le savent,
ceux qui l'ignorent continueront à l'ignorer.
Entre ceux-ci et ceux-là,
il n'y a que l'image et le nombre.
Et fut: le nombre engendrera les nombres
et l'image engendrera l'Histoire
et ils bâtirent leur demeure dans l'Histoire.
Et ils la fixèrent là, là où ils l'avaient planté ils fixèrent leur demeure.
L'Histoire a fixé ses demeures dans l'image et dans le nombre,
mais l'Histoire où l'on réside n'est pas l'Histoire réelle.
Entre ceux qui ne peuvent pas ignorer cela
et ceux qui ne veulent pas le savoir,
des guerres auront lieu —
entre ceux qui bâtissent leurs richesses sur la spéculation des images
et ceux qui pressentent la forme des paroles.
Pour nous, de la terreur des victimes des chambres à gaz,
le témoignage premier ce ne sont pas les traces des ongles sur les murs:
c'est d'abord une souffrance singulière qui choisit et se condense
en telle ou telle personne de notre plus proche environnement quotidien.
C'était un mal —
qui, contrairement à ceux ordinaires de la vie quotidienne,
ne paraissait pas relatif à quoi que ce soit qui nous entourait:
il excédait.
Nous lui cherchions des mots comme on cherche des motifs,
sans qu'aucun mot ni aucun motif ne le soulage —
peut-être ne souhaitait-il pas de soulagement.
Entre lui et la réalité, il y avait bien des relations —
à condition d'entendre ce mot de "relation" au sens de "relater", plus que de "lier".
Nombreux étaient les récits estampillés "histoire vraie",
qui tournaient autour de ce que nous en connaissions,
désireux de relater pour nous ce que nous-même ne pouvions pas faire sans en trahir la moelle.
Ils échouaient toujours à s'y lier comme le sens au son dans le signe:
Plus accablant était le récit,
plus exact supposions-nous qu'il était,
plus flagrante était son impuissance à dire ce que nous éprouvions,
ce que nous éprouvions réels,
plus nous nous trouvions orphelins de la réalité exposée,
auto-proclamée réelle.
Les descriptions nous exilaient de notre capacité à reconnaître comme nôtres, réelles, ce que nous ressentions,
nous contraignaient à une alternative également intenable:
soit les descriptions étaient vraies, et nous étions faux;
soit les descriptions étaient fausses, et nous étions vrais.
Ils ne ressemblaient à ce qu'ils prétendait raconter que dans le même rapport que Maimonide affirme être celui qui existe entre les qualificatifs employés pour qualifier les affections humaines et ceux qui tentent de décrire les attributs de Dieu: de même qu'il n'y a entre ceux-ci et ceux-là, selon le grand Médecin de l'Unité, qu'une relation d'homonymie - et ainsi la "bonté", la "colère", dont on parle s'agissant de l'homme n'a rien à voir (que l'homonymie ) avec la "bonté" et la "colère" dont on parle de Dieu - de même il n'y avait, entre les récits qu'ils croyaient faire de ce qui était arrivé et réellement ce qui était arrivé ( dont nous avions, nous, sombre connaissance ) qu'une relation d'homonymie.
Or ce n'était pas bégaiement du signe devant la transcendance,
c'était débâcle de la chose signifiée sur la langue des hommes.
Tel était en effet le risque neuf, la grande faille qui nous séparait de nos anciens, porteurs des songes hanséatiques:
les sens, dont une voix criait en nous qu'ils n'était pas synonymes, étaient devenus ( et par contamination, aussitôt, tous ) homonymes.
La voix nous le disait: ce n'est pas ça ! ce n'est pas ça !
Plus les récits ressemblaient, plus ils risquaient de nous dissembler de nous-même, ou du monde. Car il n'est pas vrai que nous pouvions nous contenter simplement de dire: non ! Ce n'est pas ça ! Je n'y suis pas !
Bon dieu ! par tous les diables ! qu'est-ce que c'est que ça, que des sens homonymes ?
Qu'est-ce que le statut de cette horreur indicible, que nous n'avons pas vécu, qui maintient cette insondable distance d'un récit avec son double ?
La mémoire que la société s'était composé pour qu'elle lui serve de légitimation comportait ces récits, ces images, ces témoignages d'une extraordinaire horreur contre laquelle elle se serait, en luttant contre elle, extraordinairement constituée.
Mais c'est seulement par la maigre ressemblance d'un excès à un autre que ces récits ressemblaient à ce que nous avions su d'emblée. Pour le reste, il faisait pire qu'échouer: ils mentaient, ils avilissaient, ils trichaient, ils truquaient.
— en ceci que quelque chose - nous sommes au troisième temps -
de ce mal se trouve simultanément dans les Nombres de l'histoire
et dans la conscience assurée qu'il n'y est pas —
— appelés à la barre du Mal comme témoins, les récits uns à uns y défilent...
Nous sautons d'espoir: allons les écouter !
peut-être en saurons nous plus...
Tous ! ils sont parjures, partials, pervers.
Ils nous accuseraient encore
s'il leur était permi,
de ne pas nous satisfaire des excuses et des réparations !
Vous dites voici ce qui s'est passé !
Vous dites le temps est passé !
Non ! le temps n'est pas passé !
seul est passé ce qui passe
et vous ne savez rien de ce qui ne passe pas !
A la lumière de ce qui ne passe pas vous saurez ce qui est passé !
Ce n'est pas de bonnes paroles que nous avons soif
pas de réparations honteuses
mais de justice dans le monde
de vérité et d'équité entre les hommes —
Pourtant !
Dieu est et n'est pas;
n'est pas tout-puissant, n'est pas bien n'est pas bon.
Ou bien ferez-vous qu'Il ignore l'Histoire, pour sauvegarder l'image que vous vous faites de Lui ?
Vous gazouillerez des bulles de nourrisson, qui recrache le lait qu'il vient de boire:
"Dieu connaît l'Histoire, oui, mais c'est toute l'histoire qu'il connaît. Oui, l'Histoire de chacun lui est connue, et l'Histoire des peuples, et les secrets cachés dans le futur et dans le monde qui vient. Oui, Il est juste, et le bien qu'il nous prépare dans sa lumière est sans comparaison avec le mal qui est venu. Oui, ils furent guilgoul des âmes imparfaites, ceux-là: quoique il soit vrai que nous ne pouvons pas en être sûrs.
De cela nous sommes sûrs: Dieu est, Il a fait alliance avec nous pour que nous soyons Son peuple et qu'Il soit notre Dieu.
La shoah... La shoah... C'est terrible... Comment comprendre cela ...? Rien a voir !"
Bulles de nourrisson repu !
— ils échouent à mettre des mots sur notre savoir.
Plus se multiplient ces images, plus elles semblent manquer
ce qu'elles essayent de montrer.
Pire: elles laissent croire qu'elles pourraient témoigner.
Or nous, nous savons qu'elles ne peuvent pas.
Nous savons que ce qu'elles disent, quoiqu'elles disent,
ce n'est pas notre connaissance du Mal.
Donnant complaisamment à penser ( de cette complaisance au mal que, lorsqu'elle s'est organisée, nous nommons Société ),
que le Mal peut se représenter,
elles contribuent aussi à exiler ceux qui ne se reconnaissent pas dans ces images,
ceux pourtant qui y sont tant invités,
invités à endosser le rôle et le lieu de victime.
Il y a ce lien entre le mal que nous savons
et les récits qui veulent transmettre les faits des camps;
mais ce lien est de la connaissance du mensonge.
Les récits disent: "voilà ce qui s'est passé";
Nous disons: "de ce qui s'est passé, nous en savons quelque chose,
maintenant. Nous ne sommes pas victimes des camps, du nombre,
nous sommes les victimes de notre savoir.
Et si nous en sommes les victimes, nous du troisième temps,
c'est seulement dans la mesure où vous refusez de savoir, vous,
que ce que nous en savons est réel, plus réel que ce que vous prétendez savoir."
Car si nous sommes victimes, c'est seulement au sens que nous sommes porteurs d'un savoir
que nous sommes trop seuls à porter.
C'est pourquoi il nous appartient de clamer que ce n'est pas d'un passé que nous sommes victimes,
- nous ne sommes pas des survivants des camps, nous ne sommes pas des orphelins -
mais du seul fait que nous sommes encore trop seuls à porter un mode de savoir
que vous persistez à nier.
Et c'est de cette négation que le monde prolonge sa durée.
Cette négation qui est la même qui a conduit l'histoire à Auschwitz,
dont elle ressort impavide, prolongeant ses progrès et passes-passes.
(...)
Écrit par : mg | 23/05/2009
Tous ceux qui savent.
Nous partîmes douze mille, de chaque tribu
Pensant répandre sur le monde La Parole
Sur l’obscur jeter de Son regard le tribut
Et nous les découvrîmes danser la Carmagnole !
Nourris de Sa Voix au calice nous avons bu
Mais les aveugles s’étonnaient des fumerolles
Ce que nous savions écrit ils ne l’avaient lu
Pire, ils sacrifiaient aux idoles
Persuadés du Berger connaître l’attribut
Tout en jetant sur l’humanité l’anathème
Dans La Parole, par elle d’une éthique imbus
Plût au ciel qu’injure nous ne fîmes au baptême
Tout lovés que nous nous croyions dans sa caresse
Des doctrines humaines nous révélions l’abîme
Sans aucune complaisance et sans tendresse
Pourfendant de nos lumières le dit des victimes
Tout comme le Borromini de Sainte Agnès
Dogues, du dogme nous construisîmes l’édifice
Contre les ténèbres des Méphistophélès
Répugnant aux savoirs s’ils ne venaient du Fils
Par quelque imprécation nous voulions qu’ils s’amendent
Ils semblaient le refuser, nous étions craintifs
Et nous clamions le Savoir contre leurs légendes
Le Réel à leurs chimères vindicatif
Nous disons : « Nous suivons seuls la route d’Elie
Hélas ! Vous ignorez tout de ce sacrifice
De la Vérité vous ne serez que la lie
Vous noyez de votre prétention l’artifice »
« Car si nous savons, nous, qu’Il est le lieu du temps
Vous persistez en prolongeant la Négation
Le temps n’est pas son lieu, pauvres impénitents
Nous n’avons que faire de vos divagations ».
- Où sont ces cent quarante quatre mille qui savent ?
Ils comptent les sceaux les trompettes et les coupes
Et les temps de la Valse dont ils font une salve
Et moquent sots aux seins qui se battent la coulpe.
Écrit par : Sacater | 24/05/2009
Votre style est super lourd, Stalker. Il fait chaud, le printemps bourgeonne, les oiseaux chantent ; je n'ai pas le courage de vous lire. Tout juste vous ai-je survolé. Le coup du "Vous puez le Christ", je subodore que vous me l'avez piqué, c'est pour cela je présume que vous m'avez demandé d'intervenir. (Vous vouliez avoir la conscience tranquille ou vous pensiez plutôt m'avoir fait un honneur? lol).
En tout cas merci de penser à moi de temps en temps, c'est toujours flatteur de l'apprendre.
J'aimerais bien vous promettre que je ferai quelques efforts à l'avenir pour me pencher davantage sur votre travail, vraiment j'aimerais. Mais je me vois obligée avec regret de vous avouer que je ne vous ai quasiment jamais lu, et cela pour une raison bien simple qui est que vous passez votre temps à critiquer des oeuvres et des auteurs dont je ne connais pour ainsi dire rien. Que voulez-vous Stalker, vous avez affaire ici à une petite inculte. ^^ Et à une feignasse par-dessus le marché.
A la revoyure peut-être,
et le plus important : prenez soin de vous.
Bises,
Millie
Écrit par : Millie | 30/05/2009
Vous me décevez, Millie.
Le fait que vous n'ayez pas lu tous ces auteurs dont je parle ne vous a pourtant jamais empêché de m'envoyer des tartines virtuelles où vous refaisiez le monde, où vous refaisiez d'ailleurs mes textes par-dessus le marché.
Cela ne fait rien.
Vous piquer quelque chose ? Je vais vous faire une confidence : je vous aime bien, mais je ne vous lis jamais.
Allez donc comprendre !
Bises, et prenez également soin de vous.
Écrit par : Stalker | 30/05/2009
"Vous me décevez, Millie."
Ah ah. Dites cela aux petits bas-bleus dégénérés qui ont peur de vous décevoir.
"m'envoyer des tartines virtuelles où vous refaisiez le monde"
Nuance : je vous ai fait l'honneur et la grace d'un avant goût de la remarquable qualité de mon harrassant travail intellectuel.
"je vous aime bien, mais je ne vous lis jamais."
Oui, je le sais, Stalker. Vous êtes de trop vaniteux pour venir lire une personne dont le nom insuffisamment connu ne fait pas fonction d'étiquette "consommable" sur la couverture de deux ou trois bouquins. Je sais que vous ne daignez mettre votre cerveau en marche qu'avec les personnes susceptible de vous intimider de par leur position sociale ou leur cercle d'amis. Vous êtes un primaire. Ecrivain peut-être, mais esclave du monde des apparences avant tout. Voyez-vous, moi c'est pour cela que je ne vous aime pas. ^^ Nous n'avons pas les mêmes valeurs, au sens véritable et premier du terme.
Quant à refaire vos texte... Ha ha ! Voyons je n'y songerais pas.
Ménagez-vous oui. Je ne peux rien vous souhaiter de mieux. :D
A plus.
M.
Écrit par : Millie | 31/05/2009
Ma pauvre Millie, vous me faites de la peine, vraiment.
Je lis absolument tout voyons, connu ou pas connu et je vous ai lu, durant nos échanges, puis un peu tout de même sur votre blog : un constat, brillante (parfois, n'exagérons rien, je l'ai vu en effet, cet avant-goût de votre harassant travail intellectuel...), mais complètement givrée.
Rassurez-vous, vous n'êtes pas la seule.
Le plus drôle est que vous vous inventez un personnage hors-norme alors que vous êtes l'incarnation même de la petite-bourgeoise, pour ce que je puis en juger.
Vous êtes donc une bas-bleue vous aussi, pardonnez-moi de vous le dire, absolument pas une diabolique aurevilienne.
Prenez bien soin de vous, vous êtes en revanche la seule à pouvoir le faire, car le sujet de cette note dépasse, je le crois et pardon de vous le rappeler, le sujet de votre toute petite personne, quoique fort grande par sa prétention.
Bises.
Écrit par : Stalker | 31/05/2009
"parfois, n'exagérons rien, je l'ai vu en effet, cet avant-goût de votre harassant travail intellectuel..."
Humour, Stalker. Je travaille beaucoup beaucoup moins que vous et vous le savez.
"Le plus drôle est que vous vous inventez un personnage hors-norme alors que vous êtes l'incarnation même de la petite-bourgeoise"
Mon pauvre garçon. Si c'est ce qu'il vous console de croire... Restez-en à vos réductio ad-vulgum puisque c'est ainsi que vous naturellement vous écrivez : en dépouillant le réel de sa part de merveille et les êtres de la poésie de leur complexité.
En matière de prétention en revanche... Ho ho ! Je crois que n'ai rien à vous apprendre. :D
Écrit par : Millie | 31/05/2009
Ma chère Millie, effectivement, vous semblez avoir tout, absolument tout compris : Stalker n'est pas, mais alors pas du tout un blog complexe.
Bravo !
Je vous laisse à vos écrits tout juste passables et à votre auto-complaisance, assez sereinement affichée sur votre Myspace qui vous sert de Meetic, le Verbe en moins ;-)
Écrit par : Stalker | 31/05/2009
"Je vous laisse à vos écrits tout juste passables"
Trop tard pour revenir sur votre première impression. Vous avez dit dans le com précédent que vous me trouviez brillante. Et je vous en remercie.
:=P
Écrit par : Millie | 31/05/2009
Faire parler Fofana, c'est une méthode littéraire, pour lui faire dire ce que VOUS voulez dire, bien entendu puisque c'est la règle. mais en tirer une fable sur la culpabilité collective de la France (une entité soluble ans le discours abscons) parce qu'un malade mental que vous élevez au rang d'indigène dépouillé par la république, donc adoubé ou "missionné" en quelque sorte par la démission collective des français, cela est parfaitement odieux. Je vous croyais un peu plus pertinent et capable d'éviter de tels amalgames, soit cette pitrerie déguisée sous l'emballage d'une narration littéraire. Vous surfez sur la vague d'une "célébrité" passagère et atroce pour nous vendre des théories fumeuses. C'est là Stalker en quelque sorte une escroquerie...
Écrit par : Philippe | 14/06/2009
Bravo Philippe, je vois que vous savez lire, vous avez absolument tout compris à ce texte.
Je ne vends rien du tout, hormis, si vous y tenez, un billet de sortie pour vous et un an d'abonnement gratuit à la bibliothèque de votre choix : vous y trouverez sans doute nombre de livres qui perfectionneront votre propre art de la lecture, à dire vrai inexistant.
Écrit par : Stalker | 14/06/2009
Lorsque l'on sort du confortable refuge de la citation à tout va, quel reste t'il Stalker, très peu, sinon soi même, confronté au vaste monde, une réponse à peine. Vous sombrez dans le conformisme spectaculaire de l'immédiateté. Pourquoi ne parlez vous pas d'ailleurs de ces deux homosexuels, assassinés et enterrés par deux autres fous du même acabit que Fofana, parce que cela ne colle pas à votre thèse ?
Écrit par : Philippe | 14/06/2009
Si je comprends bien, vous voulez en quelque sorte m'excommunier, jouer les néo Torquemada pour cause d'inculture qui vous fut révélée dans votre boule de cristal consacrée ou la fumée magique de votre ostensoir ? C'est me semble t'il bien cher payé pour une faute vénielle, qu'auriez-vous donc fait, me crucifier, pour une inconvenance moins modique ?
N'y aurait-il pas un hiatus entre votre discours et votre comportement, d'autant qu'il m'a semble "entendre" dans votre injonction, une sorte de jubilation du Pouvoir à votre guise balayer du revers de votre si vaste connaissance, les moucherons insignifiants, ces sous-espèces qui vous importunent ? Vous utilisez cependant de bien étranges méthodes, dont la plus connu est celle de jeter le discrédit sur ses ennemis en les traitant d’imbéciles, afin d’éviter de reconnaitre que ce qu’ils avancent contient « toutefois » une part de vérité qui se dérobe et réfute amalgames et généralisations.
Avec Fofana on atteint l’horreur absolue, non, il ya longtemps qu’elle fut consommée ! Mais quel statut attribuer au forfait entre le crime contre l’humanité et le fait-divers ? Vous avez choisi la responsabilité collective et requalifié le meurtre du noyau crépusculaire en faute à partager. Là vous allez trop loin, parce que vous élaborez et légitimez la fiction d’un Fofana porteur d’un trauma commun, relevant globalement d’une société déliquescente et non de ses propres délires.
Sur ce je vais apprendre à lire…
Écrit par : Philippe | 14/06/2009
Vous êtes un pitre, en effet.
Je n'ai pas besoin de vous discréditer, vous le faites vous-même suffisamment bien.
Pourquoi ne parlé-je pas, également, de cette femme de 30 ans enceinte de 8 mois et qui vient, à Marseille, dans la nuit, de se faire faucher par un motard ?
Morte sur le coup, de même, on le suppose, que son enfant.
Ah oui, il y avait aussi sa petite fille de 2 ou 3 ans qui, elle, conduite à l'hôpital dans un état désespéré, a succombé à ses blessures.
Maintenant, du balai.
Je n'ai aucune thèse, et mon texte sur YF, je crois, du moins quand on sait lire, n'est pas exactement un texte à thèse.
Si vous saviez lire, vous auriez du moins compris que je n'excusais absolument pas les actes, barbares, de cet imbécile meurtrier qu'est YF.
Si vous saviez lire et aviez au moins pris la peine de lire et méditer certains des excellents commentaires qui ont fleuri sur cette note, vous auriez remarqué que j'entais les actes de YF a une dévaluation du langage, faisant signe vers l'unique langue sacrée, l'hébreu.
Langue sacrée d'un côté : sa dévaluation quotidienne de l'autre, son mensonge, son meurtre.
Vous auriez alors peut-être entrevu ce que mon texte porte d'énigmatique ou d'énigmaticité, pour le dire à la Bessière.
Mais vous n'avez rien vu de tout cela, comme le prouvent vos navrants commentaires.
Ah si, j'ai tout de même une thèse que je tente d'étayer continuellement sur Stalker : les imbéciles m'emmerdent, surtout les imbéciles donneurs de leçons et qui ne savent ni lire, ni écrire (relisez-vous, c'est truffé de fautes), ni probablement réfléchir.
Bonnes lectures, en effet.
Écrit par : Stalker | 14/06/2009
Non, Philippe, il n'y a pas de délire privé, à plus forte raison lorsque le délire adopte la forme perverse entre toutes de la bêtise.
Il n'y a pas au contraire de délire plus public que celui-ci. Puisqu'il s'agit d'abord d'un acquiescement - pire que tous les petits renoncements de la vigilance ou de la pensée - à ce qui ruine le fondement même de l'homme en l'homme. Je soupçonne pour ma part que cette trahison intime à l'être, que l'on nomme la "bêtise", est ce dont Jésus parlait lorsqu'il disait que le pêché contre l'esprit ne peut pas être remis. On peut - et les chrétiens ajouteraient on doit - pardonner aux erreurs, aussi cruelles soient-elles, on peut pardonner les crimes, - c'est-à-dire réintégrer dans une commune humanité, sous un commun visage d'homme, ceux qui les ont commis - dans la mesure où la portée de ces crimes leur est un tant soit peu perceptible; mais on ne peut pas, on ne doit pas, il est interdit de pardonner à la bêtise, qui est bien autre chose que l'ignorance, que l'inculture ou que la connerie.
Parce que cette bêtise est négation et négation passionnée de ce qui fait que l'homme est l'homme, un croisement entre un intérieur et un extérieur, rencontre paradoxale avec l'autre, sans doute à jamais impossible mais néanmoins dont le désir maintenu en tension est seul humanisant.
Je ne vois pas bien, d'autre part, comment on peut reprocher au stalker de tenter d'être à l'écoute des voix qui sont à l'oeuvre dans cette bêtise qui a conduit fof à reproduire à son échelle des actes digne d'un kapo. Il faut bien aussi pour ce faire qu'il ne parle pas la langue réelle du-dit fof.
On peut d'autant moins lui reprocher cela, au stalker, (mais est-ce bien là ce que tu lui reproches ?) qu'après tout il ne cesse d'affirmer lui-même tout au long de la Zone que telle est la vocation d'écrivain qu'il se reconnait: celle d'être un écrivain-critique, un écrivain dont le "charisme" particulier consiste à se mettre à l'écoute des voix - littéraires avant-tout, et toutes les voix - et à les passer au crible... (De quel crible il s'agit, ce n'est pas si simple à déterminer...)
J'ai tenté de parler entre poire et fromage avec mon frère et son amie il y a quelques semaines de ce procès de fofana et des siens. A quoi il m'a répondu, avec un geste qui signifiait qu'il n'avait pas envie d'en parler: "boh... ! une secte antisémite". J'ai trouvé dommage que le "boh" initial empêche mon frère de prendre la mesure des mots qu'il employait, et qui m'ont soudain parus éclairants à l'instant même où il les prononçait: secte et antisémite. Parce que c'est effectivement ça, mais que ce n'est pas si anodin que boh parraisse. (Il y avait ma toute fraiche nièce qui était là, 9 mois, le jour était clair, le repas était agréable, on n'est pas forcément obligé de causer des saloperies sans cesse).
Le texte de Juan a donc à mes yeux au moins le mérite d'exister, et il me semble juste dans ce qu'il tente de dire et de montrer. C'est d'ailleurs bien la raison pour laquelle j'ai "risqué" d'ajouter à ses commentaires un extrait d'un de mes propres textes. Est-ce qu'il réussit, ce texte du stalker de la Zone des mots ? Je n'en suis pas si sûr.
D'abord, Juan, je ne pense pas que la question à ce propos soit d'être ou ne pas être Faulkner. Vous ne l'êtes pas, c'est entendu, vous n'avez pas prétendu l'être. Non, je ne pense pas qu'il s'agisse d'un degré de "talent".
Le reproche essentiel que je ferais à votre texte - et qui est d'ailleurs le même que je ferais à la plupart des commentaires à ce texte - c'est de ne pas aller assez loin. Et puisque ce n'est pas pour cause de talent, qu'est-ce ?
Il faudrait reprendre point à point... mais je vais essayer d'en extraire une "matrice de l'erreur".
Je prends, par exemple, la question de la langue, de sa sacralité d'un côté, de sa déliquescence de l'autre. Je suis facilement gêné quand on parle du caractère sacré de l'hébreu - j'ai vécu dans cette langue pendant de longues années, pendant lesquelles en hébreu j'ai acheté des chaussures, en hébreu j'ai travaillé comme plongeur dans des restaurants, j'ai fait l'amour et j'ai déconné, - tout à fait comme en français. J'ai également étudié la torah en hébreu, sans pour autant que la langue que je parlais alors en acquiert une quelconque sacralité. En fait, Juan, la tradition orale encouragerait plutôt ses étudiants à se pencher sur ces textes sacrés avec le maximum de toupet possible - il est dit quelque part qu'il faudrait savoir lire avec toute l'ardeur d'un non-croyant... ( et pratiquer naturellement avec toute l'ardeur d'un Zaddik... ! ).
La question du caractère sacré de la langue est posée dans le talmud (cette mise à l'écrit génialement ouverte de la tradition orale qui remonte au Sinaï) comme toutes les autres questions. Je n'ai pas malheureusement étudié cette page elle-même, mais ! ce que j'en sais est ceci: plusieurs opinions, comme toujours, s'affrontent à ce sujet (je m'empresse d'ajouter pour les méchants qui voudraient sauter dans leurs propres conclusions, que ce n'est pas "infidélité" pour la pensée juive que de ne pas suivre un code de la route, bien au contraire: la "vérité", ce qu'on peut en atteindre, se trouve, de temps en temps, jaillir par éclats, d'entre les discussions): pour les uns, il y aurait une et une seule langue sacré, l'hébreu, pour d'autres, trois langues sacrés les langues scripturales: hébreu, araméen et grec), pour d'autres enfin, les 70 langues de l'humanité - façon de dire que la sacralité de la langue est intrinsèque à toutes, et peut-être aussi de récuser une fois de plus l'éternelle question de l'origine.
Vous devinez, Stalker, que je tends vers les 70 langues, alors que vous, vers une ou trois langues... De même, je tendrais à refuser "une" France, vous non. N'en soyez pas pressé de conclure que je me plonge pour autant dans un relativisme déliquescent, encore moins dans un culte du néant quel qu'il soit, quelques soient ses habits de paillettes (comme vous, je n'aime pas Sollers, je suis très déçu par ses émules de Ligne de Risque, de Houellebeq, n'en parlons pas. - je ne sais même plus comment ça s'écrit ! ).
Votre erreur, votre semi-échec à mon sens, ce n'est pas de se mettre à l'écoute des voix qui grondent au fond de la bêtise criminelle, c'est de mal les identifier, - ou bien, ce qui revient au même, de ne pas leur donner assez la parole. Pourquoi ? c'est ... un résidu d'optimisme peut-être, cette foi que vous semblez maintenir malgré tout en quelques piliers sur lesquels s'arcquebouterait (ou qui émanerait d') une parole qui, elle, serait de vérité.
Or c'est précisément là ce qui, après auschwitz, n'est plus recevable.
Après les Camps initiaux à notre siècle, la vérité n'est pas morte bien entendu, mais le nom de la vérité ne devrait plus jamais être confondu avec celle-ci. (argh ! Je m'exprime mal dans cette langue que l'espace des commentaires m'impose - je ne suis pas philosophe).
Pour moi, il ne peut pas y avoir d'un côté une "idée" de la France et de l'autre une France cadavérisée, dont le cadavre pourrait s'autopsier avec le scalpel de cette idée. Le constat que je fais de l'état actuel de la littérature est sans doute aussi sévère que le vôtre - mais il ne procède pas, je crois, du même lieu. De même, il n'y a pas pour moi, quelque part une sacralité réelle - qui se trouverait dans le champs de la réalité comme une pierre dressée chargée de mana - non, mais dans ce champs de ruines que le monde des hommes m'apparait être il ne peut y avoir, et cela au sein même de ce peu reluisant état des faits - au sein de chaque sein des choses - que des paroles vraies.
J'insiste: sans aucun repère ! la vérité n'en n'a plus. C'est là, justement, qu'il faudrait aller pour l'écouter.
Encore une fois, excusez mes lenteurs, mes circonvolutions: je suis lent et ne suis pas philosophe.
Écrit par : mg | 14/06/2009
Si vous saviez lire, vous auriez du moins compris que je n'excusais absolument pas les actes, barbares, de cet imbécile meurtrier qu'est YF."
Nulle part je n'ai avancé cette hypothèse... par contre pour quelques lignes n'allant pas dans le sens de... votre histoire, vous sembliez prêt à m'assassiner, même si cela ne demeure que virtuel. Entez donc les signes qu'il vous plaira pour étayer le constat d’une dégradation du langage et ce que cela sous-tend, soit une décadence qui commencerait par une déperdition de la langue, une perte du sens, celui qui est ancré dans un langage devenu déboussolé, puisque nous ne posons plus (si nous l’avons fait un jour) la même valeur sur les signes.
Pourtant, votre lyrisme ne s’accorde à la réalité crapuleuse des faits, vous mêlez dans un balancement manichéen, afin d’en montrer l’écart, le noble et le sordide et concluez que soudain l’esprit ne soufflait plus, alors qu’il ne s’est jamais agi d’une confrontation linguistique si je puis dire, mais d’une association de malfaiteurs qui n’ont rien à battre des vertus d’une langue profane ou sacrée, ni de responsabilité d’une société que vous considérez comme déliquescente, alors qu’elle n’est prise que dans les remous terrifiants d’une mutation.
Ce que je vous reproche, du moins est-ce un regret, c’est de mêler l’esthétique du discours à la morbidité de la situation et par une connectique qui vous est propre de relier le monde hypothétique d’en haut et celui d’ici bas en d’en gérer l’artifice par une licence littéraire, un procédé ahurissant, une épissure incongrue vous permettant de joindre deux espaces hermétiquement clos. Mais ce que vous tenez là, vous pourrez le cerner d’autant de théories pléthoriques, vous resterez toujours dans l’incommensurable, ce qui ne s’emboîte jamais exactement dans le moule dans lequel vous voudriez contraindre et formater le réel.
Écrit par : Philippe | 14/06/2009
Philippe ou qui que vous soyez, puisque vous changez à chaque fois de courriel, MG vous a répondu.
1 - je ne vois aucun manichéisme dans mon texte : relevez les occurrences, citez, analysez ou taisez-vous.
2- si vous m'aviez quelque peu lu, vous auriez compris que tout bon bloyen, ce que j'essaie d'être, ne peut aisément séparer le noble du sordide, mais vous ne l'avez pas compris.
3 - Relisez mon texte intitulé Larvatus pro Deo.
4 - sans blague, vous pensez donc que je suppose que YF est agrégé de grammaire ? Une fois de plus, vous n'avez rien compris à ce texte et à ce qu'il tente de montrer : un langage avili enferme le meurtrier dans un cachot qu'il ne voit même pas.
5 - l'optimisme, selon Bernanos et quelques autres, est un patent synonyme du couillonnisme, ce terme étant mien.
6 - morbidité de la situation. Non. Un homme, un Juif, un Juif de France a té torturé pendant trois semaines puis laissé pour morts par un gang de crétins meurtriers. Ce n'est point morbide, c'est la réalité, pardonnez-moi de vous rappeler cette évidence.
7 - on peut faire je crois tous les reproches à mon texte, sauf celui d'exploiter quelque prétendue morbidité ou mort, ici un assassinat.
8 - une connectique ? cékoicetruque ?
9 - artifice, licence littéraire : bravo, vous venez, mine de rien, de découvrir ce qui s'appelle, je le suppose du moins : écrire, non point bavarder.
10 - ouvrez les yeux, si vous pensez que l'invisible ne déborde pas le visible de toutes parts. pas besoin d'aimer Jésus, suffit de relire Shakespeare et même Merleau-Ponty, ce qui vous renvoie comme toujours à mon unique conseil : relisez ou plutôt, LISEZ.
11 - effectivement, j'ai tenté, comme je l'ai pu, et MG a eu bien raison de dire que je n'étais pas allé assez loin (mais aller assez loin, mon ami, ce serait écrire un véritable roman), j'ai tenté de dire l'incommensurable, ce dont se moquent l'AFP et les journalistes, auxquels je puis vous renvoyer du reste.
12 - Foutez-moi donc la paix à présent : ce texte, bourré de défauts je n'en disconviens pas, je l'ai écrit en moins de deux heures, mise en page incluse, d'un coup donc, sans même me relire. Le relisant, je ne le trouve point mauvais, en tous les cas, je n'ai lu nulle part son semblable.
13 - Formater le réel ? Vous avez trop regardé Matrix ou êtes un nostalgique de la Pravda. Le réel, c'est Fofana. Le réel, c'est moi. le réel, c'est votre lassant bavardage.
MG
Je ne connais point l'hébreu, je veux dire que je ne le connais point de l'intérieur, comme vous. Mais j'ai lu mon Scholem, mon Benjamin, mon Rosenzweig et une bonne centaine d'autres. Que voulez-vous, sur la langue des Juifs, je suis devenu plus juif que vous apparemment.
Votre argument contre la sacralité ne vaut rien : voyons, n'importe quelle lecture de la plus humble des servantes de Dieu, du saint le plus ignoré, vous apprendra que la petite voie est justement l'icône même du sacré.
Non, j'en vois effectivement une autre, de langue sacrée : devinez laquelle, si vous avez lu l'Art poétique de l'immense Boutang...
Le français...
C'est justement sa déchéance qui nous indique encore de quelle hauteur il est tombé, même si je vous en prie, pas de soupçon réactionnaire dans ce constat puisque je suis de ceux qui pensent qu'une auteur (à Philippe : UN AUTEUR), doit TOUJOURS, qu'il soit du Xe ou du XXXIe siècle, reconquérir sa propre langue.
Je connais la citation par coeur, vous retrouverez par saint Google qui en est l'auteur : J'entrelace, pensif et pensant, des mots précieux, obscurs et colorés, et je cherche avec soin comment, en les limant, je puis en gratter la rouille, afin de rendre clair mon cœur obscur...
Enfin, MG : oui, reste au fond de moi non point un résidu d'optimisme, je laisse cette denrée périssable aux idiots, mais d'espérance.
Si je ne l'avais pas, peut-être serais-je, en effet, descendu plus bas.
Peut-être, aussi, aurais-je été incapable d'écrire quoi que ce soit...
Écrit par : Stalker | 14/06/2009
Je crains que quelque part vous ne vous soyez mélangés les pinceaux, Si la langue se délite, c'est parce que ceux qui l'utilisent se désagrègent. De quelle hauteur sont-ils donc tombés jusqu'à en perdre le sens et l'usage des mots? Mais vous, vous voulez procédez à la sauvegarde du langage en oubliant le fait qu'il faut bien quelqu'un pour la porter, la "délivrer" cette parole !
La réalité de Fofana, vous n'en avez pas vraiment rendu compte ici, vous l'avez vêtue d'un langage, alors que sa pensée tient en une seule phrase, qui est une litanie s'appuyant sur une présupposition du style suivant: "On va se faire un juif, parce qu'ils sont pétés de thunes" Aujourd'hui que va faire Fofana, il va sans doute revendiquer son acte au nom d'une justice qu'il s'inventera à mesure afin de se dédouaner, sortir du fait-divers, réclamer le martyre. Cela sert aussi à cela les mots, étayer le mensonge...
"Car c’est aussi, malgré tout, et ce tout est si vaste, de déchirures de naufrages et de désillusions, le temps d’une splendeur, fut-elle baignée de larmes. Le poète n’est pas tant ce qu’il écrit dans ses formulations dérisoires, même si quelquefois, dans l’émeri d’un graphite il soudoie au monde passant, le nerf vibrant d’un vérité fugitive, mais la chance de dire que rien n’était perdu alors que tout semblait, en cet irrémédiable carène d’abandon, versé dans des puits creusant toujours plus profond les sonores échos du désastre."
Écrit par : Philippe | 15/06/2009
Juste un mot rapide pour préciser, publiquement ici, c'est peut-être plus juste ainsi, que j'ai reconnu la voix de Philippe, avec qui j'ai échangé par ailleurs....et que, même si en désaccord, même sévère, sur tel ou tel point avec lui, cette voix est une voix amie... Pour le reste, je le juge bien capable de dire par lui-même ce qu'il pense avoir à dire, et je suis très loin de le supposer imbécile...
Juan, je vous remercie pour cette si belle citation de Raimbaut d'Orange, elle m'incite à le relire.
Je relève avec intéret votre mise-au-point en ce qui concerne l'usage que j'ai fait, trop rapide c'est un fait, du mot "optimisme", là où c'est effectivement "espérance" qui était juste. Du coup, il va de soi qu'il n'y a pas comme je l'ai fait à "mépriser" cette espérance, mais au contraire à souhaiter que ce soit beaucoup plus en vous qu'un résidu.... surtout si, comme ça me parait évident, vous inscrivez une majuscule à cette vertu théologale. Simplement en passant, je relève aussi ce qui nous sépare probablement: tant qu'elle est théologale, l'espérance n'est pas encore l'espérance. Ce n'est pas un jeu de mots, c'est de dépouillement - extrême - dont il s'agit. ( Relisez ce que je tente de dire dans mon message précédent.)
J'aurais beaucoup à ajouter, à retrancher, à infléchir là-dessus, mais pour le coup, ça dépasserait largement les bornes de ces "commentaires".
Un espace public, virtuel qui plus est, aussi remarquable soit-il que la Zone, ne me permet pas d'en dire plus ici sans risquer de m'abuser. Non pas me tromper, c'est rien, ça ! mais m'abuser.
Votre remarque sur les petites servantes de Dieu... Elle m'a plongée en arrière, jusqu'à une période de ma vie où je vivais en permanence tout près d'un de ses petits-serviteurs de Dieu, et je suis sûr qu'il aurait rougi mais pas démenti si je l'avais appelé "petite servante". J'avais remarqué dans la Zone un message qui vous incitait à lire les livres de son frère, le père Dominique Philippe. Lui, c'était le père Thomas, fondateur de l'Arche. Mon petit père Thomas... je ne suis pas pressé de le transformer en phrases...
J'ai été aussi immergé dans cette "langue" là, si on a l'occasion de discuter encore, c'est sans doute bien que vous le sachiez.
Maintenant, je me retire d'ici — je continuerai sans aucun doute à lire la Zone, surtout maintenant que je le fais avec beaucoup plus de facilité depuis que j'ai mis en exergue cette affirmation que vous faites quelque part selon laquelle vous placez sa "méthode" sous le signe du grand Kierkegaard. C'est très clair pour moi, Kierkegaard ayant été pour moi un grand frère pendant bien longtemps. Oui, "ou bien... ou bien" et un sacré fondement, en effet !
Mes respects pour votre travail et sans doute
amitiés
MG
Écrit par : mg | 15/06/2009
Commentaires réouverts, ce jour, mercredi 27 mars 2013.
Écrit par : Stalker | 16/06/2009